Cyclades : L’île de Santorin risque-t-elle de disparaître à cause d’une méga éruption volcanique ?

Depuis la fin janvier, une crise sismique exceptionnelle s’est déclenchée au fond de la mer entre les îles de Santorin et d’Amorgos, dans l’archipel des Cyclades, au sud-est de la Grèce. Des milliers de séismes ont été enregistrés, dont certains d’une magnitude de 4 à 5. Les autorités grecques ont déclaré l’état d’urgence à Santorin et Amorgos début février, plusieurs milliers d’habitants préférant quitter ces îles.
La crise, dans cette zone connue pour son activité sismique, serait-elle liée à des failles ou à la chaîne de volcans sous-marins ? Les scientifiques ne le savent pas encore très bien. En analysant des données liées à la déformation de la surface de la Terre, enregistrées avec des GPS, ils ont découvert que, depuis septembre 2024, le système volcanique de Santorin est en train de se déformer. Des déformations microscopiques qui ne se voient pas à l’œil nu.
Qu’a fait le magma sous l’île ?
« L’origine de ces phénomènes est probablement liée à une activité du système magmatique sous l’île de Santorin, qui a peut-être généré des mouvements de magma profond à la périphérie du volcan, précise Frédérique Leclerc, enseignante-chercheuse à l’université Côte d’Azur, rattachée au laboratoire Géoazur. Ce n’est pas rare que le magma s’échappe sur le côté, particulièrement si des failles existent alentour. Dans ce cas précis, on ne sait pas s’il y a eu une éruption sous-marine. »
Pour comprendre ces phénomènes, les scientifiques grecs ont densifié les réseaux d’instruments GPS. Et en mer, des campagnes scientifiques, avec navires océanographiques anglais, allemand et bientôt français, vont produire des images pour comprendre si le relief du fond de la mer a évolué, avec d’éventuelles coulées de lave.
« Cela s’est déjà produit »
Y a-t-il un risque de forts séismes, voire d’une grosse éruption volcanique à Santorin ? A priori, non. Mardi, les écoles à Santorin ont rouvert après le feu vert de la commission scientifique grecque. Mais des questions restent en suspens.
« Est-ce que cette crise a permis de vidanger en profondeur la chambre magmatique de cette chaîne de volcans ?, interroge la géologue Frédérique Leclerc. Si c’est le cas, la crise pourrait être terminée. Dans le cas contraire, alors cela peut continuer. En 2011-2012, la sismicité soutenue sous l’île de Santorin avait duré plusieurs mois d’affilée, près d’un an ». Les analyses des données sont toujours en cours. Mais, relève la spécialiste du risque sismique, la situation actuelle est « très différente » de celle de 1956 sur Amorgos, avec un important séisme suivi de répliques et un tsunami atteignant 20 mètres de hauteur. D’une magnitude de 7,6, il avait fait 53 morts.
Rien à voir, non plus, avec la destruction partielle de Santorin à la suite d’éruptions volcaniques, vers 1.600 avant J.-C. Un événement à l’origine de sa forme caractéristique, prisée des trois millions et demi de touristes qui l’ont visité en 2023. Pourrait-on imaginer que ce phénomène cataclysmique se reproduise ? « Probablement, puisque cela s’est déjà produit, estime Frédérique Leclerc. Mais le futur, ce n’est pas demain, cela peut être dans 2.000 ou 10.000 ans. On ne le sait pas. Aujourd’hui, il n’y a pas de raison de penser que l’île de Santorin va vivre une telle éruption dans un futur proche ».
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Cet été, les millions de touristes devraient sans crainte poser leurs serviettes sur les sables noirs de Santorin ou dans les criques d’Amorgos, célèbre en France après le film Le Grand Bleu, de Luc Besson. Mais ils devraient garder en tête quelques conseils, rappelés par Frédérique Leclerc : écouter les messages des autorités grecques, et se réfugier en hauteur si l’on ressent une secousse. « Même si les vagues d’un tsunami ne sont pas hautes, la vitesse du courant peut être assez forte pour vous faire chuter », prévient la scientifique. Un conseil valable pour toute région en bord de mer où il y a de l’activité sismique.