Le futur système de consigne sur les canettes et bouteilles finalisé cette semaine ? “Nous ne sommes plus qu’à quelques mètres de la ligne d’arrivée”

Et la partie n’était pas gagnée d’avance. Cela fait plus de dix ans que l’idée d’une consigne sur les canettes et bouteilles, qui sont encore nombreuses à être allègrement jetées dans la nature, est sur la table des ministères régionaux de l’Environnement. Mais si tout le monde s’accordait à souligner l’importance d’une telle mesure, personne n’était d’accord sur la façon de la mettre en œuvre. Du côté de la Flandre, la ministre Zuhal Demir (N-VA) a depuis longtemps une préférence pour un dispositif numérique, tandis que les ministres wallon Céline Tellier et bruxellois Alain Maron (Écolo) penchent plutôt pour la consigne traditionnelle, similaire à celle déjà en vigueur pour les bouteilles en verre.

Quatre scénarios ont été étudiés :

1. La consigne traditionnelle, qui implique de ramener en commerce les cadavres de canettes et bouteilles.

2. La consigne digitale avec déconsignation à domicile, qui demande aux citoyens de scanner les canettes et bouteilles à l’aide d’un smartphone ou d’une « scanette » avant de les jeter dans un sac PMC pour recevoir l’argent sur son compte en banque.

3. La consigne digitale avec déconsignation automatique en centre de tri, variante du scénario précédent.

4. Un dispositif hybride entre consigne traditionnelle et digitale.

Consignes sur les canettes: les Régions finalisent une note commune

La consigne traditionnelle trop chère

En Flandre comme en Wallonie, des bureaux d’études ont été chargés d’en estimer les coûts, la faisabilité, l’impact social et environnemental. Un rapport remis fin 2023 par l’Ovam, la Société publique des déchets de la Région flamande, se montrait mitigé dans son évaluation des différents projets pilotes de consigne digitale testés en Flandre, et prônait l’instauration d’un système hybride.

En Wallonie, c’est le bureau d’études RDC qui a remis, en septembre dernier, ses conclusions. Selon elles, une consigne digitale serait la plus intéressante, car, en créant une nouvelle filière de gestion de déchets, la consigne traditionnelle représenterait un coût trop important. Fost+, qui gère les déchets en Belgique, défend d’ailleurs la consigne digitale, tout comme l’industrie.

Mais le débat n’en est pas resté là. Après l’accent mis sur la consigne digitale par le bureau RDC, les associations sociales et environnementales sont montées au créneau pour dénoncer “une proposition non mature d’un point de vue technique, qui ne permet pas d’harmonisation avec les pays limitrophes, qui présente une accessibilité sociétale très incertaine et ne permet pas de répondre à la problématique des déchets sauvages”. Selon Canopea, la fédération des associations environnementales wallonnes, “l’impact du numérique sur l’environnement a été mis de côté lors de l’évaluation environnementale de la consigne numérique. Or, actuellement, la transition numérique contribue davantage au dérèglement climatique qu’elle n’aide à le prévenir”.

Canopea favorable à la consigne des canettes mais pas à la digitalisation

Risque de fraude avec le digital

De son côté, le Réseau wallon de lutte contre la pauvreté a dénoncé “un système compliqué alors qu’on pourrait faire simple”, en rappelant que tout le monde ne dispose pas d’un smartphone ou d’un compte en banque. Le problème de la fracture numérique est pointé du doigt. Les populations vulnérables seraient, selon l’association, laissées de côté dans ce scénario.

Enfin, une enquête de Testachats a démontré que, si deux Belges sur trois sont favorables à l’instauration d’une consigne sur les canettes et les bouteilles, le soutien du public diminue considérablement dans le cas d’une consigne digitale. Un autre sondage réalisé par l’initiative Every Can Counts a montré des résultats similaires, avec seulement 11% des Belges interrogés qui se sont prononcés en faveur d’un dispositif numérique.

Le risque de fraude a aussi été mis en évidence, car il serait possible de recevoir l’argent de la consigne sans avoir jeté le déchet dans le sac adéquat. Ce à quoi Fost+ avait répondu avec un scénario complexifié de scan du sac bleu avant de scanner le déchet.

Malgré leurs préférences respectives, les ministres régionaux se sont dits “ouverts à toutes les possibilités”. L’instauration de la consigne n’a jamais été aussi proche. Reste encore à voir la forme qu’elle prendra.