Assita Kanko (N-VA) : “J’ai reçu des menaces de mort pour avoir condamné les violences sexuelles des terroristes du Hamas”

En 2019, elle est devenue députée au Parlement européen. Pour la N-VA. L’année précédant son élection, elle avait quitté la famille libérale – elle a, entre autres, été conseillère communale MR à Ixelles –, pour le parti de Bart De Wever. Ce choix politique d’une femme de couleur, féministe combattante, essayiste, militante des droits de l’homme, avait heurté certains. Cette incompréhension reposait sur un préjugé : des origines africaines conduiraient forcément à mener un combat de gauche. Tout son être s’était alors rebellé contre cette forme de racisme venant du camp progressiste. Exerçant son libre arbitre, elle a choisi la droite nationaliste flamande.

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Le déclin de l’universalisme

On vote le 9 juin et Assita Kanko est candidate à sa réélection. Après cinq ans d’hémicycle, elle dit constater avec angoisse le déclin de l’universalisme au profit du communautarisme. Elle a décidé de publier un nouvel ouvrage, Zoeken naar vrijheid (”À la recherche de la liberté”), dans lequel elle dénonce l’érosion des valeurs occidentales face à un islamisme conquérant. “Dans ce livre, je parle des raisons de mon engagement, confie-t-elle. J’ai trouvé de l’inspiration dans la vie que ma grand-mère a menée, elle qui était musulmane et qui a divorcé dans les années 70 alors que la tradition rendait cela impossible. Quand je vois qu’en Europe, en 2024, je dois mener, en tant que femme, les mêmes combats contre l’islam radical et la domination de la femme, cela me donne du courage de penser à elle.”

Les pogroms perpétrés le 7 octobre en Israël par les terroristes du Hamas ont particulièrement choqué l’essayiste. Cette dernière voit dans les réactions parfois enthousiastes qui ont salué ces abominations le symptôme d’un effondrement culturel. Un effondrement qui s’accompagne, dit-elle, de menaces physiques, d’intimidations. “Parce que j’ai osé rappeler publiquement que les juifs sont des êtres humains et que les violences sexuelles commises par le Hamas sur les Israéliennes doivent être condamnées sans équivoque, j’ai reçu des menaces de mort. Des menaces directes. J’ai passé une semaine à la côte belge, chez ma mère, car j’avais peur de rester dans ma propre maison. Par e-mail, sur Facebook, on m’expliquait de quelle manière on allait me trancher la tête. On vit dans un monde où on ne peut plus dire que le viol des femmes juives est inacceptable. J’ajoute à cela que le mouvement MeToo a trahi la cause des femmes en ne reconnaissant pas clairement les féminicides du 7 octobre.”

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Du Coran à Samuel Paty

”Quand vous entendez dire du mal des juifs, dressez l’oreille, on parle de vous…”, prévenait Frantz Fanon (1925-1961), l’une des figures majeures de l’anticolonialisme d’après-guerre. Pour Fanon, l’antisémitisme porte atteinte à l’humanité tout entière. Assita Kanko considère également que les crimes commis au Proche-Orient dépassent le cadre du conflit régional. “C’est inhérent à l’islam, c’est dans le Coran et les hadiths (communications orales de Mahomet rapportées par la tradition, NdlR). Quand vous attaquez une population, les femmes et les enfants des incroyants sont le butin qu’il faut se répartir. C’est cet islam radical d’une autre époque que certains essaient d’importer aujourd’hui. C’est ce contexte qui explique la décapitation de Samuel Paty, qui explique les tueries du musée juif de Bruxelles ou le massacre de la rédaction de Charlie Hebdo… À chaque fois, on nous dit que cela n’a rien à voir avec l’islam, mais c’est n’importe quoi ! L’islam a besoin d’être désacralisé et réformé. Il faut rendre l’islam compatible avec la vie d’aujourd’hui.”

Si la parlementaire N-VA pointe un doigt accusateur vers l’islamisme radical, elle en distingue les musulmans. “Les attentats n’ont pas forcément de lien avec les musulmans en général. Je suis moi-même une musulmane laïque. Il y avait la burqa chez mes grands-parents et j’ai appris les versets du Coran en arabe. J’ai prié cinq fois par jour avant de me révolter car on m’envoyait à chaque fois chercher de l’eau pour les ablutions ! Je l’explique dans mon livre. Je sais ce qu’il y a dans le Coran et je sais aussi que l’on peut avoir un esprit critique. Ma grand-mère pratiquait sa foi mais était contre l’oppression des femmes. Elle a choisi sa propre vie et priait pour elle-même. La religion, à ses yeux, était une affaire privée. On peut prier le dieu que l’on veut mais, à la fin, la Constitution doit être le seul texte qui s’impose à tous.”

Le corps de Shani Louk

Assita Kanko en veut particulièrement aux complices plus ou moins inconscients de l’islamisme, voire du terrorisme. Les images du corps inanimé de Shani Louk, jeune femme kidnappée par le Hamas le 7 octobre, la hantent. Jetée sur un pick-up, à moitié nue, elle avait été emmenée à Gaza par les tueurs palestiniens et exhibée au milieu d’une foule hostile. “Des hommes lui crachaient dessus en criant Allahu akbar et, au même moment, certains en Europe et aux États-Unis manifestaient en rue en présentant le Hamas pour un groupe de résistance. Qui retrouvait-on dans cette foule ? Des gens qui versent dans le communautarisme : certains écologistes, des gens de gauche tels que les mélenchonistes en France… Avec de telles personnes, on n’a plus besoin des islamistes pour détruire l’Europe.”

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Parmi les grandes religions monothéistes, l’islam occupe une place à part, estime-t-elle, en raison de son esprit de conquête et de son intolérance. “Les islamistes veulent une domination mondiale, installer l’Oumma (la communauté des musulmans par-delà les nations, NdlR) dans le monde. Le catholicisme a lui aussi une vocation universelle mais il n’est pas prosélyte, il ne décapite personne, il a évolué avec son temps. Et on peut cesser d’être catholique ou critiquer le catholicisme sans avoir ensuite de gros problèmes…”

Ne plus s’excuser d’être Européens

Assita Kanko invite à repartir des valeurs fondatrices de la démocratie afin de lutter contre un danger dont elle perçoit l’expansion. “Je vois la lâcheté et la paresse intellectuelle envahir les esprits chez nous. Pourquoi s’excuser d’être des Européens ? Des gens comme moi, qui se sentent fiers d’être flamands et d’être européens, sont tournés en ridicule. Je suis attachée à l’héritage des Lumières. Je veux protéger notre mode de vie. L’Europe se laisse faire, je ne comprends pas… Pourquoi tout cela ? À cause du communautarisme. On ne veut pas choquer une partie de la population, on ne veut pas choquer des électeurs. C’est la culture du pays d’accueil qui devrait s’adapter, pour la gauche. Mais nous devons être des mandataires politiques courageux et nous exprimer librement au service de nos valeurs et de notre héritage.”

”La gauche s’est trahie elle-même”

Paradoxalement, la N-VA qui affirme lutter contre les compromissions de la gauche se prépare à gouverner avec le PS. N’y a-t-il pas une contradiction flagrante entre la lutte contre l’islamisme et la volonté de gouverner avec ceux que les nationalistes désignent comme ses complices ? “Quelqu’un comme Laurette Onkelinx est attachée à la laïcité et la lutte contre la soumission des femmes a été historiquement l’un des combats des socialistes, nuance Assita Kanko. Mais ils l’ont abandonnée, tranche-t-elle, pour aller faire le plein de voix grâce au communautarisme. La gauche s’est trahie elle-même et est désormais prise en otage par ses propres électeurs qui ne partagent pas ses valeurs. C’est complètement dingue ! Sur l’alliance souhaitée avec le PS, Bart De Wever a raison : pour divorcer, il faut parler en priorité avec la personne avec laquelle on n’est pas d’accord. On veut des destins différents au sein d’une Belgique qui ressemble à la Suisse ou à l’Allemagne, un pays qui continue d’exister mais où chaque entité gère ses problèmes et son argent comme elle l’entend.”

L’antisémitisme existe, je l’ai rencontré…