Maroc

Réglementation du droit de grève : les partenaires sociaux négocient

«Le droit de grève ne doit pas être limité, mais doit être exercé avec fluidité en tant que moyen de pression légitime pour faire valoir les droits des travailleurs dans les secteurs privé et public».Le projet de loi réglementaire relatif aux conditions et modalités d’exercice du droit de grève refait surface. Dans ce sens, le ministre de l’inclusion économique, de la petite entreprise, de l’emploi et des compétences, Younes Sekkouri, a affirmé, lundi, à la Chambre des représentants que le dialogue avec les syndicats se poursuit en vue de parvenir à une formule consensuelle sur le projet de loi réglementaire relatif aux conditions et modalités d’exercice du droit de grève. Répondant à des interrogations sur «la réglementation de l’exercice du droit de grève et la révision du code du travail», lors de la séance des questions orales, M. Sekkouri a indiqué qu’une trentaine de réunions ont été tenues avec les syndicats. Il a noté que ces réunions se poursuivent toujours pour parvenir à un accord préliminaire «profond» avec les syndicats sur ladite loi réglementaire, avant de passer à l’étape de l’examen de ce projet à la Chambre des représentants. Le ministre a exprimé son espoir de parvenir à un consensus avec les syndicats pour adopter une loi sur la grève de nature à «garantir les droits des travailleurs et des employeurs et l’équilibre entre les droits et les devoirs». Il a estimé que l’objectif est de démontrer à la communauté internationale que «le droit de grève au Maroc est exercé conformément à des contrôles qui garantissent les droits et les devoirs». «Un accord social important a été signé par le gouvernement pour la mise en œuvre de l’accord du 30 avril 2022», a-t-il ajouté, soutenant que la loi sur l’exercice du droit de grève est «garantie par la législation internationale du travail et la Constitution marocaine.»

Fluidité
M. Sekkouri a souligné que le droit de grève ne doit pas être limité, mais doit être exercé avec fluidité en tant que moyen de pression légitime pour faire valoir les droits des travailleurs dans les secteurs privé et public. Il a insisté sur le fait que ce droit doit être exercé sans porter préjudice aux employeurs qui respectent les droits des travailleurs, observent les conventions collectives de travail et ne font pas entorse à la liberté de l’activité syndicale. Le droit de grève doit être en phase avec les dispositions de la Constitution, accessible à tous, avec des motifs clairs, exercé de bonne foi, avec un délai de négociation précis, a-t-il relevé. Car, a-t-il expliqué, il s’agit «d’un dossier revendicatif nécessitant une étude budgétaire», vu que certaines grèves sont justifiées par des désaccords avec des employeurs qui ne respectent pas les droits des travailleurs. S’agissant du code du travail, M. Sekkouri a affirmé que le gouvernement est déterminé à ne pas retarder sa mise en œuvre, faisant part de son souhait de voir les lois convenues avec les syndicats, d’autant plus qu’il s’agit là de «questions sociétales qui transcendent les sensibilités politiques». Pour rappel, les partenaires sociaux sont parvenus à un accord à la veille du 1er mai. Si l’accord prévoyait une série de mesures pour améliorer le pouvoir d’achat (voir encadré), il a fixé également un calendrier pour les réformes y compris la loi sur l’exercice du droit de grève. Dans les détails, l’accord prévoit un calendrier concernant les réformes à commencer par celle portant sur les régimes de retraite. Alors que le principe de réforme fait l’unanimité entre les partenaires sociaux, des négociations plus approfondies auront lieu en septembre prochain avec un engagement de toutes les parties de s’impliquer dans ce chantier stratégique afin de déboucher sur un système de retraites à deux pôles, l’un pour le public et le deuxième pour le privé. Les textes concernant ce chantier devraient être soumis à l’approbation parlementaire au cours de la session d’automne en octobre prochain. Les partenaires sociaux se sont mis d’accord également sur un calendrier pour la loi organique relative à l’exercice du droit de grève. Le gouvernement œuvrera pour la programmation, l’examen et l’adoption de ce texte très attendu au cours de la session parlementaire d’avril, actuellement en cours. Auparavant, l’accord stipule que les observations seront incluses à la mouture finale dudit projet dans le cadre d’une démarche participative. Enfin, l’accord porte également sur l’amendement progressif concernant certains aspects du code du travail. En avril dernier, M. Sekkouri avait fait savoir que les efforts se poursuivent pour examiner les détails de cette réforme et les moyens de la mettre en œuvre, à travers la méthodologie du dialogue et de la recherche du consensus entre les différents partenaires sociaux et économiques, et ce dans la perspective de l’élaboration d’une vision unifiée qui sera présentée au prochain round du dialogue social prévu en septembre 2024, avant d’être soumise à l’approbation législative lors de la session parlementaire d’octobre 2024. Concernant la loi organique relative aux conditions et modalités d’exercice du droit de grève, le ministre a indiqué que ce texte répond aux principes fondamentaux en ce qui concerne la garantie de la conformité du projet de loi organique avec les dispositions de la Constitution et la législation internationale relative à l’exercice du droit de grève et l’encadrement de l’exercice du droit de grève dans les secteurs public et privé, en garantissant l’équilibre entre l’exercice de ce droit constitutionnel et la liberté de travailler. Il s’agit aussi de la définition des différents concepts relatifs à l’exercice du droit de grève et la détermination des départements qui nécessitent la mise en place d’un service minimal pendant la période de grève, en plus du renforcement des mécanismes de dialogue et de négociation pour résoudre les conflits collectifs du travail, avait-il ajouté. Ces principes seront inclus dans le projet de loi organique relative aux conditions et modalités d’exercice du droit de grève, qui a déjà été soumis au Parlement, et ce après discussion des détails du texte avec les partenaires sociaux et économiques sur la base de la méthodologie du dialogue visant la recherche du consensus, avait dit M. Sekkouri.

Dialogue social
Hausse des salaires. L’accord portait sur la hausse des salaires et l’amélioration des revenus. Les négociations entre le gouvernement, le patronat et les centrales syndicales ont abouti à la signature d’un accord social lundi 29 avril 2024. Ce dernier instaure une hausse de 10% du salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) dans le secteur privé. Cette augmentation sera effective en deux phases, soit une hausse de 5% en janvier 2025, et une autre similaire de +5% dès janvier 2026. Cette revalorisation permet au SMIG d’atteindre l’équivalent de 3.422 dirhams. Le salaire minimum dans le secteur agricole (SMAG) n’est pas en reste puisqu’une hausse de 10% est également actée en deux tranches avec une première augmentation de 5% en avril 2025 et une seconde en avril 2026. L’accord signé prévoit, en outre, une hausse de 1.000 dirhams pour les fonctionnaires du secteur public à l’exception des corps de métiers qui ont déjà bénéficié d’une revalorisation dans le cadre d’un dialogue sectoriel comme ce fut le cas pour les médecins et les enseignants de l’éducation nationale. L’augmentation de 1.000 dirhams offerte pour les fonctionnaires sera opérée en deux phases, avec une première tranche de 500 dirhams en juillet 2024 et une seconde prévue en juillet 2025. L’autre mesure phare annoncée concerne l’impôt sur le revenu avec une exonération des salaires de 6.000 dirhams alors que le seuil fixé auparavant était limité à 5.000 dirhams. Aussi, le taux d’imposition maximum sur le revenu va baisser d’un point pour passer de 38 à 37% seulement, soit un gain estimé de 150 à 400 DH par mois pour les catégories de salariés concernées, et ce dès janvier 2025.