Journée mondiale contre le cancer : Mais pourquoi le Coca « Life » vert a-t-il disparu des rayons ?
On peut être le roi du business et quand même se planter dans les grandes largeurs. Alors que Coca-Cola reste la marque la plus achetée dans les rayons depuis douze années consécutives, le géant du soda a aussi connu de sacrés échecs marketing. Notamment le coca vert, ou « Coca Life » pour les puristes, censé détrôner le coca « classique » mais dont la durée de vie fut plus courte que celle de Michel Barnier comme premier ministre.
Petit flash-back : en 2014, Coca-Cola lance ce qui est amené à devenir son nouveau blockbuster. Le Coca Life, tout de vert vêtu, et présenté comme son produit le plus sain et naturel. Là où un Coca-Cola classique affichait à l’époque 140 calories et 35 grammes de sucre (spoiler, c’est beaucoup) par canette, le Coca-Cola Life, en utilisant de la stévia, un sucre présenté comme « naturel », n’en contenait que 22. Le tout sans aspartame, produit soupçonné d’être cancérigène et utilisé dans le Coca-Cola zéro, encore épinglé aujourd’hui par trois associations qui souhaitent l’interdire.
Un mauvais choix d’ingrédient star
Flop monumental. « En 2015, le Coca-Cola Life ne représentait que 1 % des ventes de la marque », chiffre Sandrine Doppler, consultante en marketing et experte de l’alimentation. Aujourd’hui, le produit n’est plus trouvable nulle part, Coca Cola ayant décidé d’arrêter le massacre. Mais comment expliquer un tel échec ? Premièrement, l’ingrédient star utilisé, la stévia, a connu des turbulences imprévues. Johanna Volpert, professeure associée en marketing à la Kedge Business School Bordeaux, retrace : « Alors qu’elle était présentée comme bonne pour la planète, la stévia a été épinglée pour son exploitation, notamment en maltraitant ou sous-payant les populations locales ».
Quant à sa composition, « de nombreux pays ont refusé que le Coca-Cola Life se présente comme naturel et considéré que la stévia était obtenue par des processus chimiques », comme la Suède à partir de 2016. Pas vraiment de quoi destiner le produit au succès : « Quand votre argumentaire repose sur un produit bon pour la santé et pour la planète et qu’il fait tant de polémiques sur les deux, ça part mal. Coca-Cola a misé sur le mauvais ingrédient », conclut la spécialiste.
Mais qui veut d’un Coca sain ?
Les erreurs ne s’arrêtent pas là. Même si la stévia n’avait pas à ce point défrayé la chronique, le placement marketing était mauvais, estime Sandrine Doppler. Car en business, il y a une situation à éviter absolument : avoir le cul entre deux chaises. Sandrine Doppler attaque : « Le produit n’était ni totalement non sucré, ni vraiment goûtu comme le Coca-Cola classique, car la stévia laisse un goût assez amer. Du coup, ceux qui voulaient du sans sucre partaient vers le Coca zéro, ceux qui voulaient le goût normal restaient au Coca normal, et les chantres de l’healthy se méfient naturellement des sodas ».
C’est l’autre problème de miser sur une communication autour d’un produit sain et respectueux de votre santé et de l’environnement. Même avec tout le budget publicité possible et les plus grands génies du marketing, difficile de concilier cela avec Coca-Cola. « Lorsque vous vendez un produit sur des prétextes environnementaux, il faut que cela colle tout de même avec l’image de la marque initiale. Là, les valeurs de Coca semblent quand même incompatibles avec le message véhiculé par le produit »Life » », pointe Johanna Volpert.
De quoi mettre un dernier clou au cercueil. En vendant un produit prétendument sain, non-chimique et vertueux, quelle image Coca renvoyait de ses autres canettes ? « Cela ne faisait que mettre en avant les mauvais arguments santé de ses autres boissons, fusille Sandrine Doppler. En se vantant par exemple de ne pas avoir d’aspartame, contrairement au Coca zéro, on rappelait qu’un des ingrédients utilisés dans une des boissons les plus vendues était cancérigène. » Pas la meilleure publicité. Et au vu du succès de la marque, rappelé plus haut, rien ne servait de dénigrer ses produits phares pour un nouveau venu. Adieu donc, Coca vert. Le monde du business est impitoyable.