France

« Elle n’a aucun sens moral », Jeanne Balibar dans la peau d’une DRH sans scrupule dans « Le système Victoria »

Jeanne Balibar est envoûtante dans Le Système Victoria de Sylvain Desclous. Cette héroïne trouble venue tout droit du roman d’Éric Reinhardt qui a inspiré le film, prend en main un directeur de travaux mou du genou joué par l’excellent Damien Bonnard. Ce n’est pas que du point de vue sexuel que cette DRH va secouer ce père de famille.

Jeanne Balibar, qu’on verra le 19 mars en assistante sociale dans Ma mère, Dieu et Sylvie Vartan de Ken Scott, trouve un rôle intense en maîtresse femme sensuelle et manipulatrice. Elle a parlé à 20 Minutes de sa composition solidement dirigée par réalisateur de De grandes espérances.

Comment voyez-vous Victoria que vous incarnez ?

C’est une femme atroce car le monde tel qu’il est lui convient ! Elle sait s’entourer d’un certain mystère, d’un halo de charme voire de sensibilité. Elle dissimule le fait qu’elle n’a aucun sens moral. C’est ce qui la rend fascinante à jouer et à regarder. On aime les méchants au cinéma.

Ne fait-elle pas du bien au héros qui manque d’esprit d’initiative ?

Elle arrive comme un vent de panique dans son existence et elle le fait vivre plus intensément. Mais elle ne fait pas de lui une meilleure personne, loin de là. C’est intéressant cette idée qu’une femme puisse avoir ce type d’influence sur un homme. Elle le tire de son côté de barrière, le transformant en quelqu’un d’aussi odieux qu’elle. C’est un genre de personnage un peu démiurge qu’on confie très souvent à des hommes. C’est bien qu’une femme puisse s’emparer de ce type de rôle.

Jeanne Balibar après l'interview de « 20 Minutes »
Jeanne Balibar après l’interview de « 20 Minutes » - Caroline Vié

Le croyez-vous réaliste ?

Il existe autant de femmes manipulatrices que d’hommes manipulateurs dans la vie professionnelle. Cela correspond à une réalité car il serait naïf de croire que la sororité est un phénomène immédiat et constant. Toutes les femmes ont déjà rencontré d’autres femmes malveillantes. C’est très intéressant de créer cela à l’écran. J’avais l’impression de jouer au chat et à la souris.

Était-ce un rôle intimidant à appréhender ?

Je n’ai pas eu peur en me préparant mais plutôt pendant le tournage. Je suis habituée à jouer des femmes aux sentiments exacerbés et me glisser dans la peau de quelqu’un d’aussi froid était déstabilisant. Comme toutes les actrices, la plupart du temps, on me demande de jouer des sentiments, la très grande joie, la très grande tristesse, le grand amour, le grand désespoir et là, rien de tout ça. C’est ce qui la rend forte et intéressante, d’ailleurs. C’est qu’elle a ce côté glacial, qui est à la fois complètement fascinant, et un peu effrayant.

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Êtes-vous certaine que cette femme existe vraiment ?

Je me suis posé la question et j’aime laisser planer le doute à ce sujet. Elle n’est peut-être qu’un fantasme dont il a besoin pour évoluer. Elle peut apparaître et disparaître à volonté qui est à la fois une sorcière et une fée. Ce qu’on aimerait tous être jusqu’à un certain point. Ce qui ne veut pas dire qu’on approuve les valeurs du capitalisme qu’elle incarne.