Tunisie

Un « FCR pour tous » : bonne idée ou risque économique ?

Les commissions des finances des deux chambres législatives ont validé un article additionnel du projet de loi de finances 2026 permettant à chaque famille tunisienne d’importer une voiture exonérée de droits de douane. Près de la moitié des voitures en circulation en Tunisie auraient plus de 15 ans.


Alors que les commissions des finances des deux chambres législatives ont validé un article additionnel du projet de loi de finances 2026 permettant à chaque famille tunisienne d’importer une voiture sans droits de douane, le débat s’intensifie et les critiques s’accumulent.

En effet, cette initiative, présentée comme une réponse à la hausse des prix des véhicules neufs, offre une possibilité « unique dans une vie » d’acquérir un véhicule (neuf ou d’occasion) sous certaines conditions de revenus et avec un âge maximal déterminé pour les voitures importées.

Cependant, dès son annonce, le régime a soulevé des doutes importants. Pour de nombreux acteurs de l’industrie automobile, il constitue un signal mal adapté, annonçant une saturation du marché sans précédent.

Un représentant de la profession a souligné que le dispositif pourrait fragiliser le secteur formel, car bien que la revendication d’une baisse des prix soit légitime, il subsiste des zones d’ombre.

En effet, le marché tunisien subit déjà une forte augmentation des importations de véhicules d’occasion, avec un parc vieillissant, en partie alimenté par des voitures importées via le régime FCR, dont la durée ou l’âge autorisé varie.

Examiné sous l’angle économique, le projet pourrait avoir un impact significatif sur les finances publiques : selon les analystes, l’exonération des droits de douane va réduire considérablement les recettes de l’État, tout en augmentant les sorties en devises, un aspect déjà fragile dans le contexte actuel.

De plus, permettre l’importation de véhicules d’occasion jusqu’à 10 ans pourrait entraîner une arrivée massive de voitures anciennes, alourdissant la demande en pièces détachées, aggravant la pollution, et transformant la Tunisie en un débouché pour les voitures d’occasion d’Europe.

Il est aussi crucial de noter que le parc automobile tunisien est largement vieillissant, avec près de la moitié des voitures en circulation ayant plus de 15 ans. À un moment où certains plaident pour un renouvellement avec des modèles plus récents, plus sûrs, voire électriques, l’idée d’autoriser l’importation massive d’anciens véhicules semble contradictoire.

Face à cette situation, des voix se font entendre pour réclamer une alternative : l’obligation d’achat de véhicules neufs, via un réseau officiel de concessionnaires, assortie d’un quota progressif, jugée plus bénéfique pour l’économie, la sécurité routière et l’environnement.

Actuellement, le projet est toujours en examen, car un vote en assemblée générale est nécessaire avant toute adoption définitive. Cependant, l’initiative a déjà provoqué une vaste polémique, mêlant promesse d’une amélioration du pouvoir d’achat, risques économiques, saturation du marché, questions de sécurité et enjeux environnementaux.

Ce « FCR pour tous » pourrait ainsi marquer un tournant : soit comme un soulagement pour les familles, soit comme le début d’un désordre majeur pour l’industrie automobile et l’économie nationale.