Tunisie

Tunisie : l’IACE constate une reprise des importations contrastée

Le déficit commercial de la Tunisie a atteint 16,728 milliards de dinars au cours des neuf premiers mois de 2025, dépassant les 13,497 milliards enregistrés sur la même période en 2024. Les importations de produits miniers et phosphatés ont bondi de 22,6 %, tandis que les exportations ont progressé de 8 %.


Le déficit commercial de la Tunisie continue de se creuser, mettant en lumière des déséquilibres structurels persistants dans l’économie nationale. Selon l’Institut arabe des chefs d’entreprises, l’étude « Importations : les dessous d’un trend contrasté » souligne une détérioration préoccupante de la balance commerciale, qui a atteint 16,728 milliards de dinars durant les neuf premiers mois de 2025, dépassant les 13,497 milliards observés sur la même période en 2024, d’après les données de l’Institut National de la Statistique. Cette aggravation est principalement due à une hausse des importations de 5,4 %, tandis que les exportations demeurent presque stagnantes, n’augmentant que de 0,03 %.

Toutefois, la croissance générale des importations masque une dynamique complexe pouvant indiquer une reprise économique émergente. La diminution des importations de produits énergétiques et alimentaires reflète une baisse de la demande pour les produits de base. Dans le même temps, les importations de produits miniers, intermédiaires et d’équipement affichent une croissance significative, témoignant d’une augmentation des intrants nécessaires à la production nationale.

Le recul de la demande pour les produits de base a un impact positif sur la balance alimentaire, qui présente un excédent de 620 millions de dinars en septembre 2025. Cette performance est soutenue par une diminution de 3,5 % de la valeur des importations, notamment des céréales, dont les quantités collectées ont atteint 11,780 millions de quintaux, largement dû à des conditions météorologiques favorables. En revanche, le secteur énergétique continue de peser sur le déficit commercial, représentant 48 % de celui-ci. La production quotidienne moyenne de pétrole a chuté de 77 000 barils en 2010 à 27 000 barils actuellement, tandis que la production de gaz a diminué de 9 %. La réduction des importations énergétiques de 11,8 % s’explique surtout par une baisse de 15 % du cours moyen du Brent et la dépréciation du dollar, montrant que les avantages tirés de la conjoncture favorable demeurent fragiles.

Malgré cette vulnérabilité, l’économie tunisienne présente des signes de reprise productive, portée par la croissance des biens de production. Les importations de produits intermédiaires ont connu une hausse de 5,4 %, et celles de produits d’équipement de 22,1 %, par rapport à des augmentations plus faibles en 2024. Le secteur manufacturier, qui représente 79 % des exportations et 71 % des importations, observe un regain de dynamisme. L’industrie du textile, de l’habillement et du cuir enregistre une progression des achats extérieurs de 3,5 %, tandis que les industries mécaniques et électriques affichent une hausse de 15 %. Cette évolution témoigne d’une stratégie d’importation visant à soutenir les exportations et à renforcer l’intégration dans les chaînes de valeur mondiales.

Le secteur minier participe également à cette dynamique. Les importations de produits miniers et phosphatés ont augmenté de 22,6 %, tandis que les exportations ont crû de 8 %. La production du premier semestre a atteint 1,8 million de tonnes, soit une augmentation de 55 % par rapport à l’année précédente. La Compagnie des Phosphates de Gafsa prévoit de produire 5 millions de tonnes d’ici la fin de l’année, un objectif qui pourrait réduire le déficit commercial et compenser d’éventuelles baisses dans d’autres secteurs comme l’huile d’olive.

Cependant, les experts conseillent la prudence. La reprise reste fragile en raison de la faible diversification des partenaires et de la spécialisation limitée, exposant l’économie aux fluctuations extérieures. Une chute des commandes automobiles en Allemagne pourrait transformer les intrants importés en stocks inutilisables, et le secteur du phosphate reste vulnérable aux tensions sociales, aux difficultés de transport et aux contraintes environnementales. Pour renforcer cette reprise, il est préconisé d’améliorer le rôle du secteur agricole, d’accélérer la transition énergétique, de diversifier les partenaires commerciaux et d’augmenter la valeur ajoutée des productions tunisiennes.