Projet Elmed : la Tunisie ne doit pas ignorer l’intégration énergétique et les syndicats
Le projet Elmed, qui vise à relier les réseaux électriques tunisien et italien par un câble sous-marin à haute tension, a été conçu pour favoriser les échanges d’électricité entre les deux rives de la Méditerranée. Elyes Ben Ammar, membre de la Fédération générale de l’électricité et du gaz de l’UGTT, a exprimé des réserves sur ses implications économiques et stratégiques, en soulignant que les producteurs privés d’électricité destinés à l’exportation ne sont pas tenus d’approvisionner le marché local, même en période de pénurie.
Le projet Elmed, qui a pour objectif de connecter les réseaux électriques tunisien et italien via un câble sous-marin à haute tension, suscite des réactions variées. Elyes Ben Ammar, membre de la Fédération générale de l’électricité et du gaz de l’UGTT, a exprimé les réserves du secteur syndical sur ses implications économiques et stratégiques lors d’une intervention sur Diwan FM.
Destiné à promouvoir les échanges d’électricité entre les deux rives de la Méditerranée, le projet Elmed bénéficie du soutien de la Banque mondiale et de la Commission européenne. L’idée d’interconnexion entre la Tunisie et l’Italie remonte aux années 1990. Entre 2007 et 2008, la société Elmed a été établie sous le règne de Zine El-Abidine Ben Ali pour réaliser des études de faisabilité. Le modèle initial prévoyait la construction d’une centrale électrique en Tunisie, alimentée au gaz ou au charbon, dont environ deux tiers de la production seraient exportés vers l’Italie via une ligne unidirectionnelle.
Depuis 2011, le projet a été révisé à la demande des institutions financières internationales. Le dispositif actuel propose une interconnexion bidirectionnelle, autorisant des échanges d’électricité dans les deux directions. Cette évolution est présentée comme un moyen d’améliorer la flexibilité du réseau et de renforcer la sécurité énergétique des deux pays.
Elyes Ben Ammar a exprimé ses inquiétudes quant à cette nouvelle approche, qui pourrait engendrer une dépendance accrue au marché européen. Selon lui, la Tunisie, ne possédant pas de marché unifié de l’électricité équivalent à celui de l’Union européenne, pourrait se retrouver désavantagée en cas de déficit de production nationale. Il estime également que la part de financement engagée par l’État tunisien reste conséquente face aux retombées économiques incertaines.
Le syndicaliste a rappelé que, conformément à la loi tunisienne de 2015, les producteurs privés d’électricité destinés à l’exportation ne sont pas obligés d’approvisionner le marché local même pendant les périodes de pénurie. Cette situation, selon lui, pourrait menacer la sécurité d’approvisionnement du pays.
Il a également souligné l’absence d’une étude de rentabilité fournie par la SETG, partenaire du projet. Il estime qu’une évaluation économique exhaustive est nécessaire pour mesurer la pertinence ainsi que les impacts financiers d’Elmed pour l’État et les consommateurs.
Les partisans du projet soulignent, quant à eux, les bénéfices stratégiques d’Elmed. Ils affirment que cette interconnexion renforcerait l’intégration énergétique entre la Tunisie et l’Europe, encouragerait les investissements dans les énergies renouvelables tunisiennes, et positionnerait le pays comme un futur hub de transit électrique en Méditerranée. Selon eux, cette infrastructure pourrait aider à diversifier le mix énergétique et à stabiliser le réseau national à long terme.
Le projet Elmed met en lumière les défis de la transition énergétique tunisienne : équilibrer l’ouverture régionale avec la préservation de la souveraineté nationale. Si le gouvernement et ses partenaires internationaux perçoivent cela comme un levier d’intégration et de modernisation, une partie du secteur syndical, représentée par Elyes Ben Ammar, réclame plus de transparence et de garanties concernant l’impact réel du projet sur l’indépendance énergétique du pays.
S.M.

