Tunisie

Mères pour l’éducation sexuelle, mais n’en discutent pas facilement

Une étude intitulée « les attitudes des mères en relation avec l’éducation sexuelle de leurs enfants » a été présentée ce vendredi à Tunis par le Groupe Tawhida Ben Cheikh, révélant que plus de 73 % des mères interrogées ont exprimé leur disposition à participer à des réunions avec d’autres parents et le cadre éducatif afin de discuter des sujets liés à la santé sexuelle et reproductive. De plus, 81 % des mères ont déclaré s’opposer à l’administration du vaccin contre le HPV à leurs filles, reflétant les tabous entourant la sexualité de la fille ainsi que les campagnes de désinformation.


Présentée ce vendredi à Tunis par le Groupe Tawhida Ben Cheikh, une étude intitulée « les attitudes des mères en relation avec l’éducation sexuelle de leurs enfants » a révélé que la majorité des mères interrogées soutiennent l’accès de leurs enfants à une éducation sexuelle fiable.

Réalisée sur un échantillon de 1200 femmes du Grand Tunis ayant des enfants âgés de 10 à 19 ans, l’étude montre que ces mères manquent cependant des outils nécessaires pour communiquer avec leurs enfants sur les changements corporels et sexuels ainsi que sur la santé sexuelle et reproductive, malgré leur conscience de l’importance de ces sujets dans leur vie.

Elle indique également que la communication entre la mère et le fils est plus limitée avec les garçons qu’avec les filles, notamment en ce qui concerne les thèmes liés au développement des organes génitaux.

L’étude montre, par ailleurs, que la communication entre les mères et leurs fils est très limitée sur les sujets des moyens de contraception, de l’avortement et de la virginité, tandis qu’elle demeure également restreinte avec les filles.

D’après la même étude, les mères recourent au dialogue et au conseil lorsqu’elles découvrent que leurs enfants, garçons comme filles, consomment des contenus pornographiques. Les mères ont aussi tendance à ignorer la situation avec les garçons à 9,9 % contre 4,4 % avec les filles, ce qui reflète, selon l’étude, une tolérance implicite plus élevée à l’égard des garçons.

Par ailleurs, plus de 73 % des mères interrogées ont exprimé leur disposition à participer à des réunions avec d’autres parents et le cadre éducatif pour discuter des sujets liés à la santé sexuelle et reproductive.

L’étude indique également que 56,3 % des mères se sont déclarées favorables à l’intégration de l’éducation complète à la santé sexuelle dans les programmes scolaires. En ce qui concerne le niveau scolaire où ces enseignements devraient commencer, les mères privilégient le cycle du collège à 42,2 %, suivi du cycle primaire avec 26,4 %.

D’un autre côté, les mères ont exprimé une certaine réticence à l’égard de la vaccination contre le papillomavirus humain (HPV), 81 % d’entre elles déclarant s’opposer à l’administration du vaccin contre le HPV à leurs filles. Ce taux de refus reflète les tabous entourant la sexualité des filles et les campagnes de désinformation ainsi que les messages anti-vaccin diffusés sur les réseaux sociaux.

Dans ses recommandations, l’étude appelle à renforcer une éducation sexuelle complète et adaptée à l’âge des enfants au sein des programmes scolaires, ainsi qu’à développer des outils de communication fondés sur des informations fiables pour aider les parents (pères et mères) à engager des discussions autour du corps de l’enfant, qu’il soit fille ou garçon, afin de les protéger contre les agressions et le harcèlement sexuels.

Mouna Tlili, coordinatrice de projets au sein du Groupe Tawhida Ben Cheikh, a déclaré à l’agence TAP que « l’objectif de cette étude est d’approfondir la compréhension des modes de communication au sein de la famille et d’analyser les attitudes des femmes envers l’éducation sexuelle de leurs enfants, ainsi que leur disposition à mieux s’outiller pour améliorer les méthodes de communication sur ces thématiques essentielles dans la vie des enfants ».

Elle a aussi rappelé qu’une étude réalisée par le Groupe Tawhida Ben Cheikh en 2023 avait mis en évidence un problème fondamental dans le triangle parents–enfants–école en matière de communication sur la santé sexuelle et reproductive.

Elle a précisé que cette étude avait révélé que les jeunes, filles et garçons âgés de 18 à 19 ans, s’informent sur la sexualité et la santé sexuelle et reproductive principalement via les réseaux sociaux, Internet et les sites pornographiques, des sources d’information jugées non fiables.

Enfin, elle a souligné que cette étude a montré que la communication des parents avec leurs fils et filles sur ces sujets essentiels demeure très limitée, ce qui a conduit le Groupe Tawhida Ben Cheikh à réaliser cette nouvelle étude concernant le rôle des mères dans l’éducation sexuelle de leurs enfants pour mieux cerner leurs positions à cet égard.

Fondé en 2012, le Groupe Tawhida Ben Cheikh œuvre à la promotion des droits et à garantir l’accès à la santé sexuelle et reproductive, ainsi qu’à l’accès aux moyens de contraception et à l’avortement sécurisé.

Le Groupe a réalisé plusieurs études quantitatives et qualitatives portant sur les normes sociales, les connaissances, les attitudes et les représentations liées à la sexualité, à la santé sexuelle et reproductive et aux relations de genre.