Journées Théâtrales de Carthage : ouverture avec « Le Roi Lear » par Yehia El Fakharany
La 26e édition des Journées théâtrales de Carthage a démarré samedi 22 novembre avec deux pièces, dont «Rêve(s)… comédie noire » et « Le Roi Lear », qui se sont jouées à guichets fermés. La représentation du « Roi Lear », en arabe littéraire, a duré trois heures avec 30 minutes d’entracte et a mis en scène une dizaine de personnages principaux ainsi que de nombreux figurants et danseurs.
La 26e édition des Journées théâtrales de Carthage a débuté le samedi 22 novembre. Deux pièces ont marqué l’ouverture : « Rêve(s)… comédie noire » de Fadhel Jaibi et Jalila Baccar, présentée au Ciné-Théâtre Le Rio, et « Le Roi Lear », une œuvre du Théâtre national égyptien réalisée par Shady Srour, mettant en vedette la star Yehia El Fakharany. Les deux représentations ont affiché complet, témoignant de la passion des Tunisiens pour le théâtre.
La pièce « Le Roi Lear », jouée dans la grande salle du Théâtre de l’Opéra de Tunis, a attiré un large public venu découvrir l’une des tragédies les plus célèbres, écrite en 1606 par William Shakespeare. Ce chef-d’œuvre intemporel, inspiré du roi légendaire britannique des chroniques médiévales, explore des thèmes tels que les liens familiaux, la trahison et le pouvoir.
Cette œuvre est enseignée et mise en scène dans les théâtres du monde entier, conservant sa pertinence à travers les siècles et mettant en lumière l’universalité des thèmes shakespeariens qui inspirent encore de nombreuses pièces, films, œuvres littéraires et recherches.
La représentation de « Le Roi Lear », en arabe littéraire, a duré trois heures avec un entracte de 30 minutes. Elle a présenté une dizaine de personnages principaux ainsi que de nombreux figurants et danseurs. Le public a été captivé par la puissance des acteurs, la richesse esthétique alliant baroque et contemporain, ainsi qu’une mise en scène soigneusement orchestrée et percutante.
Pour résumer, le Roi Lear, interprété par Yehia El Fakharany, vieillit et décide de diviser son royaume entre ses trois filles selon l’amour qu’elles lui portent. Les deux aînées, Goneril et Régane, motivées par la cupidité, le flattent sans véritables sentiments. En revanche, Cordelia, la cadette, refuse de participer à cette hypocrisie et déclare qu’elle l’aime simplement en tant que fille. Lear, aveuglé par l’orgueil, la renie alors et la déshérite. Parallèlement, une autre intrigue se développe concernant le comte de Gloucester et ses deux fils, Edgar et Edmund, entraînés dans des trahisons et des dilemmes moraux.
Dès l’ouverture du rideau, la beauté de la scénographie attire le regard. La pièce commence par une scène de bal dans un palais opulent. La scénographie à plusieurs niveaux crée des espaces réalistes grâce à la décoration et aux projections, illustrant des châteaux majestueux, représentant la richesse, tout en montrant la pauvreté et la prison, enrichissant ainsi chaque changement d’espace.
Les costumes des ducs et des chevaliers, les robes somptueuses en soie ou en velours, ainsi que les bijoux et fourrures recréent une ambiance baroque, en contraste avec l’apparence dégarnie du roi qui se déplace plus tard dans une tempête.
« Le Roi Lear » présente un éventail de personnages complexes. Le public a été profondément ému à l’entrée de Yehia El Fakharany, incarnant le célèbre monarque. Des applaudissements spontanés et des sourires émus ont exprimé la sensation de retrouver un visage familier, tant il a marqué des générations par ses rôles emblématiques au cinéma et à la télévision.
Malgré ses 80 ans et une difficulté à marcher, la qualité de son interprétation du roi en pleine décadence est impressionnante. Yehia El Fakharany transmet une intense tension émotionnelle, passant avec aisance entre la gravité, le lyrisme et l’ironie, tout en conservant sa touche personnelle.
Malgré le ton sombre de la pièce, un humour subtil émerge à travers certaines situations, les répliques sarcastiques et la présence d’un personnage de clown. Les autres acteurs ont réalisé un jeu réaliste dans cette intrigue riche en actions et en crimes : combats à l’épée, confrontations…
La pièce a été exécutée à un niveau très élevé, malgré quelques maladresses de prononciation en arabe littéraire. La musique a accentué les moments de forte intensité dramatique, soutenant le rythme et l’évolution des actions.
Cette réinterprétation du classique shakespearien insuffle un nouveau souffle à l’œuvre. Avec une grandeur et une force dramatique remarquables, elle a élevé les attentes du public par rapport aux autres pièces du programme des Journées théâtrales de Carthage. Il convient de noter qu’une autre version iranienne de « Roi Lear » sera également présentée dans la section « Théâtre du monde. »
Lors de la célébration ayant suivi la représentation de « Roi Lear », Yehia El Fakharany s’est adressé au public : « Qui dit Tunisie dit culture », évoquant son premier trophée reçu en dehors de l’Égypte, en Tunisie, en 1984, lors des Journées cinématographiques de Carthage, il y a donc plus de 40 ans. Les retrouvailles entre l’acteur et son public ont ainsi suscité une émotion partagée.
Les Journées théâtrales de Carthage se poursuivent jusqu’au 29 novembre avec une sélection de pièces tunisiennes et internationales, invitant les spectateurs à explorer diverses cultures et univers théâtraux. Les informations concernant le programme et les modalités de réservation sont disponibles en ligne et aux guichets de la Cité de la culture de Tunis.

