Impôt sur la fortune : l’OTE déplore un « pas en arrière » après le rejet de l’article 50
L’Observatoire tunisien de l’économie (OTE) a exprimé que le rejet de l’article 50 du projet de Loi de Finances pour l’année 2026, relatif à l’impôt sur la fortune, par la Commission des finances et du budget de l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) constitue un pas en arrière sur la voie de la justice fiscale. Actuellement, la taxe sur la fortune immobilière s’applique uniquement aux biens immobiliers dont la valeur commerciale réelle est égale ou supérieure à 3 millions de dinars (MD), au taux de 0,5%, et exclut la résidence principale et les biens à usage professionnel.
L’Observatoire tunisien de l’économie (OTE) estime que le rejet de l’article 50 du projet de Loi de Finances pour l’année 2026, portant sur l’impôt sur la fortune, par la Commission des finances et du budget de l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) représente un recul en matière de justice fiscale.
Dans un bulletin d’information publié lundi, l’observatoire a rappelé que l’article 50 visait à élargir le champ d’application de l’impôt sur la fortune immobilière. Ce dernier, adopté dans la Loi de Finances 2023, s’applique actuellement uniquement aux biens immobiliers dont la valeur commerciale réelle est égale ou supérieure à 3 millions de dinars (MD), au taux de 0,5%, en excluant la résidence principale et les biens à usage professionnel.
Le texte rejeté visait à étendre cette mesure en intégrant les biens immobiliers, les actifs commerciaux et les biens meubles acquis. Il introduisait aussi une progressivité accrue avec deux tranches basées sur la valeur des actifs : 0,5% pour les biens entre 3 MD et 5 MD, et 1% pour ceux dépassant les 5 MD.
Le rejet de cet article intervient alors que l’Observatoire Tunisien de l’Économie et le Centre Ali Ben Ghedhahem pour la justice fiscale avaient précédemment appelé à renforcer la progressivité de cet impôt pour obtenir un rendement effectif et équilibrer la distribution de la richesse. Ils ont critiqué la forte concentration de la richesse, notant que 10% des citoyens les plus riches de Tunisie détiennent 58% de la richesse totale, tandis que 1% d’entre eux en possède 24,1%, alors que 50% n’en détiennent que 4,9%.
Face à cette concentration, l’Observatoire souligne que l’adoption d’un impôt progressif sur la fortune est essentielle pour garantir une redistribution juste, réduire les écarts sociaux et créer une marge financière pour financer les secteurs sociaux.
Cependant, il remarque que la progressivité réelle de l’impôt sur le revenu en Tunisie demeure insuffisante. Un rapport de la Banque mondiale de 2024 indique que la Tunisie affiche le plus grand écart entre les taux d’imposition sur les revenus du travail et ceux sur les revenus du capital parmi les pays en développement. Cette disparité renforce la concentration de la richesse, permettant aux catégories à revenus élevés de convertir leurs ressources en bénéfices de capital faiblement imposés, transférant ainsi la charge fiscale principalement sur les salaires de la classe moyenne.
L’Observatoire considère également que l’idée que l’impôt sur la fortune pourrait décourager l’investissement est erronée. Au contraire, cet impôt pourrait inciter les plus riches à réorienter leurs actifs vers des investissements plus rentables et productifs. En ciblant les actifs productifs et non productifs, la taxe favoriserait l’investissement dans des actifs à rendement élevé plutôt que la conservation d’actifs inertes ou à faible rendement.
Toujours selon l’OTE, face au déficit budgétaire persistant et à la nécessité de ressources pour financer des secteurs sociaux clés (santé, éducation, transport), un impôt sur la fortune avec un champ d’application élargi est jugé nécessaire pour élargir l’assiette fiscale et assurer une contribution proportionnelle à la capacité réelle de paiement des plus fortunés.
Bien que cet article ait été rejeté en commission, l’OTE souligne que les parlementaires ont la possibilité de renforcer l’efficacité et la progressivité de cet impôt lors des futures sessions plénières.

