Immobilier : un Ordre professionnel en préparation pour la Tunisie
Le secteur immobilier tunisien est marqué par une désorganisation structurelle et de multiples menaces. Mohsen Chaabani, président du Groupement Professionnel des Agences Immobilières (GPAI), plaide pour une refonte urgente du cadre réglementaire et institutionnel pour sécuriser le métier d’agent immobilier exposé à des pratiques illégales.
Le secteur immobilier tunisien traverse une période difficile, caractérisée par une désorganisation structurelle et de nombreuses menaces qui fragilisent la profession. Mohsen Chaabani, président du Groupement Professionnel des Agences Immobilières (GPAI) sous l’égide de la CONECT, a exprimé, lors d’une intervention sur RTCI, la nécessité d’une refonte urgente du cadre réglementaire et institutionnel. Selon lui, la mission du groupement est avant tout d’organiser et de sécuriser le métier d’agent immobilier, qui fait face à la concurrence déloyale d’intermédiaires non agréés, à un cahier des charges obsolète et à des risques liés au blanchiment et à la fraude.
Depuis son affiliation à la CONECT, après plusieurs années au sein de l’UTICA, le GPAI affirme avoir gagné en visibilité et en influence. Ce nouveau cadre institutionnel lui permet de plaider plus efficacement auprès des ministères et d’obtenir une reconnaissance accrue dans l’écosystème économique national. Parti de sept agences fondatrices, le groupement regroupe désormais une centaine d’adhérents et ambitionne d’atteindre entre 500 et 700 membres à moyen terme. Il prévoit également de se développer régionalement avec la création prochaine de branches à Kairouan et Monastir, visant à établir une dizaine de représentations à travers le pays.
Bien que le marché immobilier soit porteur, il reste fragmenté et vulnérable. Les plus grandes menaces proviennent des samsars et des étrangers non résidents qui exercent illégalement la profession. Ces pratiques, formellement prohibées par la loi, sont jugées dangereuses au-delà du simple cadre économique, avertit Chaabani. Elles peuvent être associées au blanchiment d’argent, au financement du terrorisme et à des activités d’espionnage, compromettant ainsi la sécurité nationale. En revanche, les agences agréées, sous le contrôle du ministère du Commerce, déclarent leurs revenus et assurent la traçabilité des flux financiers via la Banque centrale. Les intermédiaires clandestins, quant à eux, évoluent sans contrôle et entachent l’image de la Tunisie auprès des investisseurs et des expatriés.
Pour assainir la profession, le GPAI se concentre sur deux projets majeurs : la refonte du cahier des charges, resté inchangé depuis les années 1980, et la création d’un Ordre des agents immobiliers. Le nouveau texte, actuellement en discussion avec le ministère du Commerce, imposera des critères plus stricts en matière de compétence, de formation et de moralité. L’Ordre aura pour rôle d’encadrer la profession, de veiller au respect du code d’éthique et de sanctionner les abus. Un serment professionnel pourrait également être instauré pour renforcer la déontologie du métier. Chaabani espère que ces réformes seront finalisées d’ici un à deux ans.
Dans un effort de professionnalisation, le GPAI multiplie les formations et événements destinés à élever les standards du secteur. Une innovation marquante est l’introduction de la Programmation neurolinguistique (PNL) appliquée à l’immobilier, une première en Tunisie et en Afrique. Cette approche ambitionne d’améliorer la communication, le comportement et la présentation des agents, considérés comme de véritables ambassadeurs du pays auprès des clients internationaux.
Le groupement adopte également une politique d’ouverture vis-à-vis des samsars et des fausses agences, cherchant à les inclure dans un cadre légal et à les former pour qu’ils contribuent à l’économie formelle. Il promeut la collaboration entre professionnels grâce à un système d’échanges immobiliers entre agences agréées, créant ainsi un réseau structuré et transparent. Ce dynamisme profite à l’ensemble de la chaîne économique, impliquant experts-comptables, architectes, assureurs, notaires et banquiers.
Mohsen Chaabani appelle enfin les autorités à intensifier leurs efforts de contrôle et de régulation. Il a salué le « travail majestueux » du ministère du Commerce, qui a fermé plus d’une cinquantaine de fausses agences durant l’été, et souligne l’importance de maintenir cette vigilance dans un secteur aussi délicat. Son message aux agences non adhérentes est clair : « Rejoignez-nous. Plus nous serons nombreux, plus nous serons forts », incitant ses confrères à tirer parti du cadre juridique, des formations et des labels de qualité offerts par le GPAI.

