Budget 2026 : Les dépenses sociales dominent les débats actuels.
La ministre des Finances, Michket Slama Khaldi, a présenté le projet de budget de l’année 2026, soulignant que les recettes s’élèveront à 52.560 millions de dinars, avec un déficit budgétaire prévu de 11.365 millions de dinars, représentant 6% du PIB. Le budget prévoit également l’ouverture de 22.523 postes dans la fonction publique en 2026 et une augmentation des pensions minimales à 280 dinars par mois.

Dans son discours, jeudi, devant la Commission mixte du budget et des finances, qui réunit des députés de l’Assemblée des représentants du peuple et des élus du Conseil national des régions et districts, la ministre des Finances, Michket Slama Khaldi, a souligné que la dimension sociale du projet de budget pour l’année 2026 était particulièrement prédominante.
Cette discussion s’inscrit dans le cadre des débats budgétaires qui ont débuté lundi dernier en commissions et qui se poursuivront tout au long du mois de novembre, dans un marathon qui devrait se conclure le 10 décembre prochain.
La Presse — À l’ouverture des travaux, la ministre des Finances a immédiatement rappelé que l’élaboration du projet de budget pour 2026 s’inscrivait dans une « vision nationale globale qui consacre la volonté de bâtir, sur la base de la consécration des principes constitutionnels et de la justice sociale, de la mise en place d’un système fiscal équitable, de respecter le principe du compter-sur-soi et de l’indépendance de la prise de décision nationale ».
Selon la ministre, l’économie tunisienne devrait enregistrer un taux de croissance de 3,3 % en 2026. La valeur du dinar tunisien devrait se stabiliser par rapport aux principales devises étrangères, et la baisse anticipée des cours des matières premières, en particulier le pétrole, estimée à 63,3 dollars en moyenne, devrait créer des conditions favorables à l’atteinte des objectifs fixés.
Les recettes pour le budget 2026 devraient atteindre 52.560 millions de dinars, selon les prévisions de la ministre. Ces recettes se composeraient de 90,9 % de recettes fiscales, de 8,4 % de recettes non fiscales, et 0,7 % provenant de participations et de dettes.
En ce qui concerne les dépenses, celles-ci sont évaluées à 63.575 millions de dinars, dont 39,7 % consacrés aux salaires, 15,4 % aux subventions et 18,8 % au développement. Cela entraîne un déficit budgétaire de 11.365 millions de dinars, soit 6 % du PIB, contre 5,6 % en 2025 et 6,4 % en 2024.
La ministre a précisé que pas moins de 63,4 % des dépenses sont à caractère social.
Dans ce cadre, elle a annoncé que des recrutements dans la fonction publique seront ouverts en 2026 (22.523 postes), ainsi que la poursuite de l’intégration et de la régularisation des enseignants suppléants (13.837 postes) et la réalisation de la première tranche du programme de recrutement des détenteurs de doctorat (1.350 postes).
La ministre des Finances a également réaffirmé l’intention du gouvernement de procéder à des augmentations salariales durant les années 2026, 2027 et 2028, et a prévu 1.000 millions de dinars pour des dépenses liées aux urgences, qui ne seront pas utilisées.
Le programme du gouvernement inclut des lignes de financement destinées à encourager l’initiative, notamment en faveur des catégories à revenu limité, des diplômes et des sociétés communautaires.
Les entreprises communautaires bénéficieront d’une ligne de financement de 35 millions de dinars, ainsi que d’une prime de solidarité de 2 millions de dinars.
Pour les familles à revenu limité, le projet de budget prévoit une enveloppe de 4.663 millions de dinars, dans un souci de solidarité sociale et de garantie des droits fondamentaux, afin d’assurer une vie digne pour tous.
De plus, les pensions minimales seront augmentées à 280 dinars par mois, contre 260 actuellement, pour un coût global estimé à 260 millions de dinars.
D’autres mesures seront également mises en place pour soutenir les femmes, les enfants et les personnes âgées, visant à renforcer la couverture sociale et à améliorer l’accès à un logement décent pour les catégories économiquement vulnérables, par le biais de la technique de location-vente.
Concernant le pouvoir d’achat, la ministre a affirmé que l’État n’avait pas l’intention de supprimer le système de compensation.
Un total de 9.772 millions de dinars sera consacré aux subventions, dont 4.993 millions aux hydrocarbures, 4.079 millions aux produits de base, et 700 millions au transport en commun, incluant le transport scolaire et le transport à tarif réduit ou gratuit pour certaines catégories.
Pour les dépenses de développement, le projet de budget prévoit 11.934 millions de dinars, représentant une augmentation de 12,4 % par rapport à 2025.
Les députés soulèvent plusieurs paradoxes
En réponse aux chiffres présentés, les députés ont mis en lumière plusieurs paradoxes. D’une part, ils ont noté la modestie des dépenses allouées aux projets de développement, alors même que le gouvernement met l’accent sur la création d’emplois.
Ils se sont également interrogés sur l’intention d’emprunter, notamment à l’extérieur, alors que l’exécutif prône le principe du « compter-sur-soi ». Un autre point soulevé concerne la rationalisation des dépenses, alors que des fonds publics sont perçus comme gaspillés pour soutenir des entreprises publiques mal gérées ou en faillite.
En prônant un État social et solidaire, les députés ont observé que le taux d’imposition, fixé à 25 %, est jugé trop élevé. Certains ont également reproché au gouvernement d’appauvrir le peuple par une contribution élevée (90 %) des recettes fiscales au financement du budget.
La question des subventions a également été évoquée, des élus considérant que le secteur touristique, accueillant 11 millions de visiteurs, consomme les produits subventionnés au même titre que les Tunisiens, aux frais du contribuable.
Enfin, certains intervenants ont fait remarquer le fossé entre les revendications pour un État social et la réalité des citoyens, marquée par l’augmentation des prix et les pénuries de certains produits, comme l’huile subventionnée et le sucre.
De nombreuses insuffisances ont également été signalées tant au niveau régional que sectoriel, appelant le ministère à apporter des explications et à se distancier de l’ancien modèle, qui souffre d’un manque de vision.
En réponse à ces préoccupations, la ministre Michket Slama Khaldi a salué la qualité des interventions, précisant que beaucoup de ces problèmes ne peuvent être résolus dans un programme d’une durée de 12 mois et qu’une occasion se présentera pour les discuter lors de l’élaboration du plan quinquennal 2026-2030, dont les grandes lignes ont été tracées par le Chef de l’État.
Elle a aussi reconnu les problèmes structurels touchant plusieurs régions, nécessitant davantage de travail et de ressources. Dans de nombreux secteurs, un travail considérable a été accompli et « nous allons continuer de travailler pour atteindre les objectifs ».
« Nous avons une orientation sociale qui fait l’objet de consensus. Mais j’admets que ce n’est pas un choix facile », a-t-elle reconnu.
« Il y a, sans doute, des insuffisances. Mais il existe une volonté de mener des réformes. Il y a une solidarité qui doit être entretenue entre nous tous pour relever les défis.
Il n’y a pas une région meilleure qu’une autre, il n’y a pas un citoyen inférieur à un autre… », a-t-elle déclaré, rejetant les critiques selon lesquelles l’État souhaite entretenir la pauvreté. « Ce n’est pas vrai ! », a-t-elle affirmé.
« Nous voulons que tout le monde travaille. Des efforts continuent d’être fournis pour trouver des solutions à toutes les situations précaires », a-t-elle rassuré, soulignant que les réformes « nécessitent des moyens, de l’argent ».
« Nous disposons de moyens, certes, mais ils ne sont pas suffisants. Nous devons procéder à des optimisations et renforcer la coopération, notamment avec les deux Chambres et le secteur privé », a-t-elle ajouté.
Certaines d’entre elles faisaient encore des bénéfices et reversez leurs gains à l’État. « Aujourd’hui, il n’est pas si simple de les fermer comme on pourrait le penser. Dans ces entreprises, il y a des chefs de famille avec des responsabilités et des engagements. Ne pensez-vous pas que les licencier créerait une nouvelle crise sociale ? Est-ce compatible avec la dimension sociale de l’État ? » a-t-elle interrogé.
En tant qu’État, « nous avons l’obligation d’encourager les entreprises qui réussissent, d’aider celles en difficulté et d’évaluer au cas par cas en cas d’échec », a-t-elle insisté.
« Nous devrions avancer ensemble ! », a-t-elle conclu.
Lassâad BEN AHMED

