Billet – Agriculture : Les mains ne s’éloignent pas, la terre attend !
La campagne de récolte des olives dans certaines régions de Tunisie, comme Kasserine, ne dépasse pas 10 % des olives récoltées à ce jour. Le président de l’Union régionale de l’agriculture et de la pêche, Mohamed Hassan Azhari, qualifie ce rythme de « faible et insuffisant ».
La campagne de récolte des olives avance lentement dans certaines régions de Tunisie, notamment à Kasserine, où seulement 10 % des olives ont été récoltées jusqu’à présent. Mohamed Hassan Azhari, président de l’Union régionale de l’agriculture et de la pêche (Urap), qualifie ce rythme de « faible et insuffisant ».
Cette situation découle d’un ensemble de facteurs : la baisse des prix de vente des olives, les aléas climatiques et, surtout, un manque de main-d’œuvre qualifiée.
Cette carence met en avant une réalité essentielle pour l’agriculture : la rareté de la main-d’œuvre, majoritairement féminine. Historiquement, les femmes ont accompli les tâches les plus ardues et délicates, que ce soit dans les vergers ou les champs, assurant ainsi la qualité et la continuité des récoltes.
Elles constituent un pilier silencieux de l’agriculture tunisienne, représentant l’âme d’un secteur vital pour l’économie rurale et le patrimoine alimentaire du pays.
Dans les champs, une vie discrète existe, presque invisible pour ceux qui ne la voient pas. Chaque saison, la terre attend, silencieuse et patiente, que ses fruits soient cueillis, triés et transformés. Aujourd’hui, ces mains se font de plus en plus rares.
La jeunesse féminine, autrefois ancrée dans le travail des champs, aspire désormais à d’autres perspectives.
Les études, les carrières, la mobilité et le désir de construire un avenir personnel différent du modèle traditionnel éloignent les femmes des champs et des récoltes saisonnières.
Cependant, sans elles, les cultures souffrent, les récoltes diminuent et le rythme des saisons se brouille.
La main-d’œuvre agricole n’est pas un simple outil. Elle demeure le lien vivant entre l’homme et la terre. Chaque geste est important : la façon de cueillir un fruit pour ne pas l’endommager, le soin apporté au tri des récoltes, la patience nécessaire pour observer la maturation parfaite.
Ceci ne peut pas être remplacé aisément par la technologie. Les machines peuvent soulever, couper et transporter, mais elles ne peuvent pas remplacer la sensibilité, l’intuition et le savoir-faire transmis de génération en génération.
La raréfaction de cette main-d’œuvre souligne une tension profonde entre tradition et modernité. Les femmes, longtemps au cœur des récoltes, souhaitent poursuivre leurs études, accéder à de nouvelles opportunités, et s’émanciper dans un monde offrant plus de choix qu’il y a quelques décennies.
Ce mouvement est une avancée positive sur le plan social et culturel, mais il représente un défi crucial pour le secteur agricole, qui reste largement tributaire de cette force humaine pour assurer ses récoltes et maintenir sa qualité.
Face à cette réalité, il est urgent de réinventer le travail agricole. Il ne s’agit pas uniquement de mécanisation, mais de concevoir des solutions permettant aux femmes et aux jeunes de concilier études, aspirations personnelles et engagement dans les champs.
Cela pourrait passer par des modèles saisonniers flexibles, des programmes de formation adaptés, ou des technologies qui allègent les tâches les plus pénibles sans dénaturer le lien entre l’homme et la terre.
Préserver cette main-d’œuvre féminine, c’est protéger un patrimoine vivant. C’est également garantir que les champs continuent de produire avec qualité, tout en maintenant l’humanité de l’agriculture.
En fin de compte, l’agriculture ne dépend pas uniquement de sols fertiles ou d’un climat favorable. Elle repose sur des mains attentives, un esprit et un cœur. Aujourd’hui, ces mains sont précieuses, rares et plus que jamais indispensables.
Le défi qui se présente à nous est à la fois simple et vital : continuer à faire croître nos récoltes tout en stimulant les talents et les ambitions des femmes qui ont toujours été, et demeurent, le cœur battant de notre agriculture.

