Émigration à la retraite: «L’étiquette de ‘profiteurs’ est totalement déplacée»
Regula et Michael Enderle ont émigré à Phuket, en Thaïlande, en 2024.
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Beaucoup de Suisses partent s’installer à l’étranger à la retraite, un choix qui suscite souvent préjugés et critiques. Michael Enderle, retraité suisse expatrié en Thaïlande, contredit ces stéréotypes. Il veut montrer que partir vivre à l’étranger à la retraite exige du courage, de la préparation et le sens des responsabilités.
«Émigrer à l’âge de la retraite demande beaucoup de courage, écrivait Michael Enderle dans un e-mail adressé à Swissinfo ce printemps. Parfois, davantage de tolérance et d’ouverture envers les autres seraient souhaitables.»
Son message fait référence aux débats dans la presse helvétique à propos des Suisses qui s’installent à l’étranger à la retraite — de préférence en Thaïlande — et «profiteraient» ainsi de l’État suisse. «L’étiquette de ‘profiteurs’ est totalement déplacée», affirme l’ancien entrepreneur à la retraite.
Les retraités qui quittent la Suisse et vivent ensuite de leur rente AVS ont en effet tout de même cotisé toute leur vie. «De plus, chacun est libre de décider où il souhaite passer sa retraite», déclare Michael Enderle.
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Pourquoi partir en Thaïlande?
Michael Enderle fait partie des nouveaux retraités qui ont émigré en Thaïlande. En octobre dernier, il s’est installé à Phuket avec sa femme Regula. Lui qui avait passé plus de douze ans de sa carrière professionnelle à l’étranger, principalement en Inde, souhaitait retenter un nouveau projet avec sa femme.
«La vie à l’étranger et le fait d’évoluer dans des cercles d’expatriés nous ont toujours énormément enrichis au fil des années», raconte le sexagénaire lors d’un appel vidéo avec Swissinfo. Un homme soigné, vêtu d’un polo, est assis ce mardi après-midi devant son ordinateur portable, sur lequel il poursuit d’ordinaire ses activités professionnelles en Suisse. Michael Enderle conserve encore quelques mandats de conseil, qu’il peut assurer depuis la Thaïlande.
Lui et sa femme possédaient un bel appartement à Frauenfeld, dans le canton de Thurgovie. «Un soir, j’étais assis sur la terrasse en train de regarder le coucher de soleil. Je me suis demandé si ma vie allait être comme ça pendant les vingt prochaines années», raconte Michael Enderle. Il ne pouvait pas s’y résoudre.
Le couple s’est donc donné un an pour préparer son départ à l’étranger. Le choix de la destination s’est imposé rapidement. «Durant notre période en Inde, nous partions régulièrement en vacances en Thaïlande.» Ils avaient déjà des connaissances à Phuket, l’île leur plaisait. En outre, la culture thaïlandaise bienveillante et chaleureuse les avait séduits.
Une famille sur plusieurs continents: la proximité malgré la distance
La décision du couple Enderle d’émigrer n’a pas surpris son entourage en Suisse. «Presque tous nos proches ont trouvé que c’était une démarche ‘cool’», explique le Suisse de l’étranger.
Déjà au moment de leurs missions en Inde pour une entreprise de machines textiles, puis au Swiss Business Hub, toute la famille ne les accompagnait pas. «Notre fils, qui avait 17 ans à l’époque, tenait à terminer son apprentissage de commerce en Suisse.» Ils avaient trouvé une solution avec des amis pour lui. «J’étais toutefois régulièrement en Suisse durant cette période», précise Michael Enderle.
Leur fille, qui les a accompagnés en Inde à l’âge de 14 ans, a ensuite fait ses études dans divers autres pays après le lycée et vit et travaille en Suisse aujourd’hui. La communication avec leurs enfants s’est déjà déroulée davantage de manière virtuelle qu’en «face à face» lors de leurs années passées à l’étranger. Cela ne les a pas empêchés de rester très proches.
Cette séparation géographique est peut-être aussi plus facile pour les Enderle, car ils n’ont pas encore de petits-enfants. Michael Enderle connaît en effet, dans son entourage, plusieurs grands-parents expatriés que le mal du pays reprend en raison de leurs petits-enfants.
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Une bonne préparation est la clé
Il y a deux ans, Regula et Michael Enderle ont ressenti un fort désir d’ailleurs. «Les mois froids et gris en Suisse me pesaient», raconte-t-il. Après de nombreuses années passées en Inde, le couple Enderle aspirait de nouveau à un environnement «plus agréable, proche de la mer et surtout plus chaud».
Le fait que la vie en Thaïlande soit moins chère qu’en Suisse était un bonus.
En discutant avec Michael Enderle, on comprend vite que sa femme et lui ont soigneusement préparé leur émigration. Les conditions d’obtention des permis de séjour, les formalités d’entrée dans le pays et la situation fiscale de la société de conseil d’Enderle en Suisse — tout a été clarifié, vérifié et organisé en détail.
«L’assurance-maladie a été un projet à part entière dans notre émigration», explique Michael Enderle. Sa femme et lui ont finalement chacun trouvé une assurance-maladie internationale dans le cadre d’un plan dit «expat». «Mais pour beaucoup de Suisses désireux d’émigrer, l’assurance-maladie est une raison de ne pas partir définitivement», précise le sexagénaire. Car une radiation en Suisse entraîne la résiliation de l’assurance-maladie suisse — et des solutions privées adéquates coûtent également cher.
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Lutter contre les clichés et les préjugés
Pour Michael Enderle, émigrer relève beaucoup de la responsabilité individuelle. «Celle-ci s’applique aussi vis-à-vis des institutions suisses, qui viendraient en aide aux Suissesses et Suisses en difficulté si un imprévu devait survenir», explique-t-il.
S’il estime qu’il faut absolument prendre en compte, dès la préparation de l’émigration, toutes les éventualités et les différentes situations de vie possibles, l’expatrié s’agace que les retraités suisses en Thaïlande soient tous mis dans le même panier – et, entre autres, qualifiés de parasites.
«Cette tendance à stéréotyper existe partout, mais cela ne correspond tout simplement pas à la réalité individuelle», assure Michael Enderle. Il se demande si l’on qualifierait également de profiteurs les retraités qui souhaiteraient émigrer en Nouvelle-Zélande.
«Chaque individu a sa propre conscience de ses responsabilités, son propre cercle social et sa propre manière d’organiser et de vivre sa vie», dit-il, avant de conclure: «Le lieu et la manière dont on souhaite passer sa retraite relèvent de la liberté de chacun.»
Texte relu et vérifié par Balz Rigendinger, traduit de l’allemand par Pauline Turuban à l’aide d’un outil de traduction automatique
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