Suisse

«De quel droit puis-je décider de ce qui se passe en Suisse?»

Les citoyennes et les citoyens suisses établi-es à l’étranger peuvent voter, même sans avoir jamais vécu dans la Confédération. © Keystone / Christian Beutler

Certains-es Suisses de l’étranger renoncent volontairement à leur droit de vote dans leur pays d’origine. D’autres tiennent à continuer à participer à la vie politique helvétique. Notre débat sur le sujet a fait réagir notre lectorat.

Ce contenu a été publié le 25 janvier 2023 – 13:55


la discussion que nous avons lancée sur la participation politique des Suisses de l’étranger.

L’expatrié renonce donc volontairement à exercer ses droits politiques dans sa patrie, car il ne sent pas suffisamment informé. Pourtant, il estime qu’il faut laisser le choix aux Suisses de l’étranger de voter ou non au sein de la Confédération. «Cela dépend notamment de la fréquence à laquelle on se rend en Suisse et des liens de parenté ou relations amicales que l’on a en Suisse», précise-t-il.

L’utilisateur émigré en Allemagne plaide ainsi pour le statu quo. En effet, la Suisse ne limite pas dans le temps la participation politique de sa diaspora, contrairement à d’autres pays européens. Par exemple, les Allemandes et les Allemands qui ont quitté le pays depuis 25 ans perdent le droit de vote. Le Royaume-Uni a fixé cette limite à 15 ans.

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L’autocensure suffit

Comme Beppi Basler, Gioboa estime que de telles restrictions ne sont pas nécessaires: «Les Suisses de l’étranger, nés à l’étranger (deuxième ou troisième génération), ne votent tout simplement pas, donc ils n’influencent pas les décisions importantes».

Toutes les personnes qui quittent la Confédération ne souhaitent en effet pas continuer à y voter. Sur 800’000 Suisses de l’étranger, quelque 210’000 sont inscrits sur un registre électoral et peuvent donc exercer leurs droits politiques au sein de la Confédération.

L’utilisatrice Ademello estime que celles et ceux qui s’inscrivent veulent garder des liens étroits avec leur pays d’origine. «Je suis expatriée en Asie depuis 17 ans. Je reste bien plus liée à la Suisse qu’à mon pays d’accueil. J’y viens plusieurs fois par an, ma famille y réside, j’y paie des impôts. Je suis très reconnaissante à la Suisse de pouvoir rester engagée politiquement et de pouvoir voter», témoigne cette dernière. 

Retirer le droit de vote de la Cinquième Suisse

D’autres utilisateurs plaident pour une limitation du droit de vote de la Cinquième Suisse. Sous le nom de Max Obrist, l’un d’entre eux explique qu’il a quitté la Suisse depuis 55 ans. Même s’il a gardé des liens familiaux en Suisse, il écrit: «De quel droit puis-je décider de ce qui se passe en Suisse? Je ne peux plus juger les circonstances locales en Suisse.»

Un avis partagé par plusieurs contributeurs. «Quand on est parti, on est parti. On s’occupe de la région du monde où l’on vit», résume Claude2011. Thack écrit: «À mon avis, trop de Suisses de l’étranger peuvent voter. Beaucoup n’ont aucun lien avec la Suisse». «Ils ont quitté leur pays et s’investissent activement pour le bien-être d’un autre État. Leur opinion ne privilégiera donc pas les avantages de la Confédération. Je ne pense vraiment pas qu’ils devraient avoir leur mot à dire dans le monde helvétique», affirme une autre personne.  

>> Voir notre débat filmé sur la participation politique des Suisses de l’étranger:

Un droit de vote par sujet

D’autres personnes aimeraient limiter le droit de vote des Suisses de l’étranger aux sujets qui les concernent. «Je ne pense pas que les Suisses de l’étranger devraient voter sur des questions locales, seulement sur des sujets nationaux», écrit une personne sous le pseudonyme de Lynx. De nationalité britannique, elle regrette d’avoir perdu le droit de voter au Royaume-Uni après 15 ans: «Moi et beaucoup d’expatriés souhaiterions avoir encore ce droit, car nous aurions pu empêcher le Brexit.»

Franz Muheim souligne aussi l’importance de pouvoir voter sur certains sujets pour la diaspora helvétique. «De nombreux votes ont pour thème la sécurité sociale ou l’Europe. Beaucoup d’entre nous vivent en Europe ou ont cotisé aux assurances sociales suisses pendant des décennies, voire toute leur vie professionnelle. Nous devrions donc avoir notre mot à dire à ce propos.»

Quelques voix s’élèvent aussi pour demander une extension des droits politiques de la Cinquième Suisse. «Les Suisses de l’étranger peuvent aussi apporter des idées nouvelles dans le débat politique et contribuer au progrès dans leur pays. Je suis d’avis qu’ils devraient être représentés au Parlement suisse», soutient un utilisateur.

Une représentation au Parlement

Émigré au Mozambique, le Bernois Andreas Ziegler-MendonçaLien externe estime que «la Cinquième Suisse devrait avoir deux conseillers aux États (élus-es à la Chambre haute) et une représentation proportionnelle au Conseil national (Chambre basse), comme un canton virtuel». L’entrepreneur considère que la Suisse bénéficierait ainsi davantage des expériences locales de longue date de ses citoyens et citoyennes à l’étranger.

Une proposition qui ne séduit toutefois pas tout le monde. Sous le nom de Frodo, un contributeur considère comme irréaliste de siéger au Parlement fédéral, tout en vivant à l’étranger. «On ne peut pas siéger dans un législatif, tout en habitant dans un pays où les lois sont différentes», argumente ce dernier. Une autre personne estime qu’il ne vaut pas la peine de réorganiser le système pour des personnes qui ont quitté la Suisse. «Pourquoi vouloir changer la structure d’un pays dans lequel vous ne voulez même plus vivre?», demande cette dernière. 

Jusqu’à présent, un seul Suisse de l’étranger a siégé au Parlement fédéral. Établi à Berlin, l’ancien ambassadeur de Suisse en Allemagne Tim Guldimann a été élu au Conseil national en 2015, alors qu’il figurait sur la liste du Parti socialiste (PS / gauche) de son canton de Zurich. Il a toutefois démissionné en 2018 (avant la fin de la législature), estimant que son mandat politique était trop difficile à concilier avec sa vie à l’étranger.

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