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France – Ecosse : Pression, Mauvaka frôle le rouge, mi-temps à l’envers… Comment les Bleus ont failli tout gâcher

Au Stade de France,

Le thermomètre avait beau flirter avec les 0 °C, samedi soir à Saint-Denis, cela n’a pas empêché des dizaines de supporteurs écossais de venir en kilt, gambettes et autre mot terminant en « ette » à l’air. Un sacré contraste avec le peuple de France qui avait presque ressorti les combis de ski des armoires pour affronter le froid dyonisien. Bonnets, doudounes et écharpes n’étaient même pas suffisantes pour faire face au vent polaire arrivé par surprise, juste avant la mi-temps, à la suite du deuxième essai écossais inscrit par Tom Jordan.

Cela permettait alors au XV du Chardon de passer devant les Bleus (13-15) dans ce qui devait pourtant être la soirée de couronnement du XV de France dans le Tournoi des VI Nations, une semaine après sa démonstration sur les terres de The Corrs. Sauf que ces Bleus, au bout de quarante minutes fébriles, avaient presque tout fait à l’envers. Et cet essai de Jordan venait les punir d’une trop grande passivité. Une punition éphémère puisque l’arbitre Matthew Carley, sans qu’aucun ralenti ne soit diffusé, refusait l’essai par miracle.

En cause, un bout de coude de Blair Kinghorn, auteur d’une immense relance en plein cœur de la défense française, qui effleure la ligne de touche. La décision du sifflet anglais était ovationnée par le Stade de France, comme quelques minutes plus tôt quand le bunker signifiait à Peato Mauvaka que son carton jaune ne virerait pas au rouge. Le talonneur toulousain venait de mettre un coup à la tête du n° 9 écossais après un regroupement et la sanction semblait bien peu sévère.

Mauvaka « aurait dû recevoir un rouge »

Titulaire à la place d’Antoine Dupont, présent quand même au Stade de France avec des béquilles, Maxime Lucu a bien expliqué en zone mixte que ce geste, s’il n’était pas à faire, était une sorte de rébellion contre des Ecossais « à la limite de la triche », qui mettaient « énormément de pression dans les rucks », il n’empêche, le carton rouge n’aurait pas été un scandale. Et les médias écossais n’ont pas manqué l’occasion pour interroger en longueur leurs pupilles à ce sujet.

« La raison pour laquelle il n’y a pas eu rouge est l’absence de force excessive, je ne pense pas que ce soit un critère alors que ce n’est pas un plaquage », indiquait Gregor Townsend, sélectionneur du XV du Chardon pendant que son capitaine Rory Darge estimait que Mauvaka « aurait dû recevoir un carton rouge ». Cette expulsion temporaire du Toulousain a en tout cas permis aux Ecossais de mettre dix points et de revenir dans une partie où les Bleus semblaient comme pétrifiés par l’enjeu.

Peu d’attaques tranchantes, peu de ballons récupérés dans les rucks, Finn Russell qui joue à sa main… « On s’est préparé sans se mettre trop de pression, mais finalement, je pense qu’on a été attrapé par le stade, par l’environnement, c’est ce que j’ai ressenti, mais c’est impalpable, a commenté Fabien Galthié. Il y a plein de petits faits de jeu qui se rajoutent les uns après les autres, qui font qu’on redonne des possessions faciles ou qu’on se met en difficulté. Et c’est plus lié, me semble-t-il, à une forme de pression que l’équipe a ressentie arrivé ici. »

Mi-temps salvatrice

Alors, il a fallu à tout ce beau monde une petite séance de thérapie collective pour remettre tout en ordre et éviter un drame national en mondovision. « A la mi-temps, on se dit qu’il faut se lâcher, qu’il faut être un peu plus agressif, qu’il faut être plus costaud en défense, ralentir un peu plus leurs mouvements aussi, avec des plaquages, si possible, à deux », raconte Thomas Ramos, devenu meilleur marqueur de l’histoire du XV de France avec 450 points (436 pour Frédéric Michalak).

« On s’est posés, et c’est là où le groupe est incroyable, parce qu’on s’est calmés, on s’est dit les choses. On s’est regardé dans les yeux et on a juste amené un petit peu de colère, pour pas non plus qu’ils fassent leur jeu pendant 80 minutes. On savait qu’on était un petit peu en dedans, qu’on avait beaucoup de pression, qu’on n’arrivait pas à se lâcher, il fallait juste remettre dans l’ordre certaines choses, et ça nous a fait beaucoup de bien. »

On a quand même douté du bien fait de la séance quand, au bout de trois minutes de jeu après les citrons, les Bleus n’avaient quasiment pas touché la gonfle et voyaient les vagues des ouailles d’Alexandre-III taper en plein cœur la défense française, vacillante mais toujours solide. Jusqu’à ce que Finn Russell, moins inspiré après le repas du soir, se fasse intercepter par Romain Ntamack, qui n’avait plus qu’à lancer Louis Bielle-Biarrey pour conclure. Rideau, on ferme, la tempête glaciale était passée, on pouvait réchauffer tout le monde.

Les avants marchent sur l’Ecosse

« Cet essai nous fait beaucoup de bien en début de deuxième mi-temps, confirme Maxime Lucu. Et après la rentrée du banc, franchement je vais me répéter par rapport à la semaine dernière, mais c’est incroyable l’apport que ça a, et la différence que ça peut faire sur un paquet d’avant qui est déjà sur le terrain. » Les entrées de Meafou, Jegou, Marchand et compagnie n’ont fait qu’accentuer la domination des gros français.

Ce qui a profité aux gambettes légères à l’arrière, comme Yoram Moefana (auteur d’un doublé) et Thomas Ramos, qui n’a cessé de saluer le travail de ses copains du pack : « En deuxième période, on a vu nos avants se faire un peu plus de passes. Et donc, forcément, ça déstabilise la défense. » Et a donc permis aux Bleus de battre le record d’essais (30) inscrits lors d’un seul Tournoi.

Notre dossier sur le XV de France

« Aujourd’hui, offensivement, on a réussi un peu moins bien que précédemment, conclut Fabien Galthié. Parfois, c’est les choses qui arrivent. On a réussi à gagner avec d’autres arguments. » Si c’est pour gagner des Tournois comme ça tous les ans, on est preneurs. Mais il faudra quand même penser à ramener un juste au corps. Au cas où. Une grippette est si vite arrivée.