Sport

Euro de handball : Comment Sébastien Gardillou apporte « un peu de nouveautés » à l’héritage doré laissé par Krumbholz

Un Euro ou un Mondial de handball, c’est un peu comme la traditionnelle galette des rois organisée à la salle des fêtes de Saint-Nom-la-Bretêche. On prend plaisir à revoir annuellement les petits copains du 39, Mme Volpilhac et son teckel ou les bambins qui font un bruit pas possible. Et on s’étonne des absents, en chuchotant à l’oreille : « Tiens, mais il est n’est pas là Olivier cette année ? » Non, Olivier n’est pas là cette année.

Après une nouvelle médaille remportée aux JO cet été et près d’un quart de siècle à faire briller les Bleues, sieur Krumbholz a décidé de passer la main. Pour le remplacer, la Fédération française de handball n’a pas cherché très loin : Sébastien Gardillou, l’adjoint du boss pendant huit ans. Et l’ancien coach de Metz et Nice n’a pas eu le temps de célébrer cette promotion bien longtemps, en étant envoyé au feu à l’Euro en cette fin d’année.

L’héritage Krumbholz mais des nouveautés

Pour le moment, les Bleus version Gardillou flambent. Sept victoires en sept matchs et une demi-finale ce vendredi face au Danemark. « C’est un très beau parcours, donc c’est agréable à regarder, estime Pablo Morel, ancien coach de Brest aujourd’hui au Gloria Buzau (Roumanie). J’étais curieux de voir la nouvelle ère avec Seb. J’ai l’impression qu’il y a quand même pas mal de changements par rapport à Olivier. »

Car, même s’il s’appuie sur l’héritage du maître, Gardillou a amené quelques petites notes de fraîcheur, notamment en attaque, dont il avait peu à peu pris les rênes sous Krumbholz, avec un jeu plus fluide et une relation entre la base arrière et les pivots développée. Il est même allé jusqu’à introduire un jeu à deux pivots, chose qu’on n’avait plus vue depuis la dissolution de la Yougoslavie. « On sent que dans l’utilisation des joueuses, il y a un peu de nouveauté, notamment sur ce poste-là, reprend Morel. C’est une forme de jeu qui permet de faire souffler la base arrière. Je trouve que c’est intelligent et vu les résultats obtenus, c’est forcément un bon choix. »

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Ce passage à deux pivots ne surprend pas l’internationale espagnole Beatriz Escribano, qui a connu Gardillou à Nice : « Il est toujours à la recherche de quelque chose qui peut faire mal à l’adversaire, c’est un passionné de handball dans toutes ses facettes. » Son ancienne coéquipière sur la Côte d’Azur Laurine Daquin ajoute : « Le côté technique, c’est vraiment son domaine. C’est un coach très travailleur, avec des techniques très spéciales, inspirées souvent de l’étranger, il sait ce qu’il veut mettre en place. » Et il en profite pour bien le signifier à ses joueuses, notamment lors des temps morts.

« C’est votre boulot, pas le mien »

Contrairement à Olivier Krumbholz qui profitait de ces petites pauses pour revenir sur les fondamentaux et laisser ses joueuses discuter entre elles pour faire un coucou à la famille dans les tribunes, Sébastien Gardillou axe son discours sur des choses très précises, quitte même à pointer du doigt les performances de certaines. Ainsi, face à la Hongrie, il a tancé les ailières, en manque de réussite face au but (« C’est votre boulot, pas le mien ») ou une tactique lancée par les Bleues qui n’était pas celle prévue (« J’ai pas demandé un Yago suédois »).

« On voit qu’il essaie beaucoup de les responsabiliser, analyse Amélie Goudjo, vice-championne du monde avec les Bleus en 2009 et en 2011 et consultante sur BeIN Sports durant cet Euro. Je sens que c’est un coach à la fois qui peut dire les choses de manière très directes, mais en même temps on sent qu’il aime beaucoup son groupe et ses joueuses. Quand il prend les temps morts, c’est parce qu’il a vraiment une consigne à donner qui peut orienter le jeu. »

« Il a la tête dure et quand il pense à quelque chose, c’est vraiment difficile de lui faire changer d’avis », ajoute Beatriz Escribano. Cela n’empêche pas le nouveau sélectionneur de l’équipe de France, dans la lignée de ce que faisait Krumbholz, d’impliquer énormément ses joueuses dans la préparation des matchs. Le fonctionnement global des Bleues est très coopératif et des ateliers, notamment sur le travail vidéo, sont par exemple organisés entre les joueuses. « Elles ont défini des stratégies et ont su les mettre en place, elles touchent les dividendes de leur travail », louait Gardillou après le match face à la Hongrie.

La défense encore en chantier ?

Reste le problème de la défense. Sébastien Gardillou, avant le début de la compétition, souhaitait que l’équipe de France redevienne l’une des meilleures nations au niveau défensif. Si l’ensemble reste solide, notamment en début de match face à la Hongrie avec zéro but encaissé en neuf minutes, les coéquipières de Pauletta Foppa continuent de prendre pas mal de buts (plus de 30 en moyenne sur le tour principal) ne sont pas devenues en quelques semaines infranchissables.

« Ce qui fait que la défense est performante, c’est la qualité des gardiens, estime Pablo Morel. Laura Glauser et Hatadou Sako ont un niveau assez remarquable. Mais, sur les grands fondamentaux défensifs, ça reste la vraie école d’Olivier, même si on peut noter l’apport d’Oriane Ondono, ce qui est une vraie évolution. » « Il n’y a pas de palier énorme franchi avec Sébastien en défense, indique Amélie Goudjo. Il y a un socle solide avec un bloc central, mais quand ça change, c’est fragile. Dans les rotations défensives, je trouve que c’est un peu limité. »

Alors, face au Danemark en demi-finale, puis face à la Norvège en finale, si la tectonique des plaques n’est pas bouleversée, il faudra franchir un cap pour reprendre la couronne européenne. Ça tombe bien, Sébastien Gardillou a prévenu les troupes après la grosse victoire contre la Hongrie. « Ce n’était pas un match énorme, vous connaissez mon exigence, et j’aimerais bien qu’on les réalise un tout petit peu plus tard. » Autant dire ce soir, et dimanche.