Destitution du Prince Andrew : « Charles III était acculé, c’était intenable »
Le prince Andrew a renoncé à son titre de duc d’York à mi-octobre et a désormais perdu son titre de prince, une décision annoncée par le roi Charles III. Les filles d’Andrew, Eugenie et Beatrice, conserveront leur titre de princesses conformément aux lettres patentes de 1917.

Le couperet est tombé pour Andrew. Après avoir renoncé de son propre chef, à mi-octobre, à son titre de duc d’York, le troisième fils de la reine Elizabeth vient de perdre celui de prince, une décision historique prise par son frère, le roi Charles III, jeudi soir. En conséquence, Andrew devra également quitter sa résidence de Royal Lodge près de Windsor pour s’installer dans le Norfolk, à près de 200 km de Londres.
Cette disgrâce spectaculaire vient couronner des années de scandales pour Andrew, mis en cause depuis 2011 pour ses liens avec le défunt financier et pédocriminel américain Jeffrey Epstein. Des accusations que ce membre de la famille royale a toujours démenties.
Jugée quelque peu tardive par certains, la décision de Charles III a été saluée par des personnalités britanniques. « C’est vraiment un pas courageux, important et juste de la part du roi », a notamment réagi Lisa Nandy, la secrétaire d’État à la Culture, rapporte l’AFP. Une situation inédite que Maud Garmy, reporter pour le magazine Point de vue, analyse pour 20 Minutes.
Cette décision catégorique du roi Charles III surprend-elle outre-Manche ?
C’était devenu inévitable. Au cœur du problème, il y a le scandale sur l’affaire Epstein, d’autant plus marqué depuis la publication, la semaine dernière, des mémoires posthumes de Virginia Giuffre, la principale accusatrice. Mais il y a aussi d’autres aspects, dont celui financier. Alors qu’il était actif au sein de la couronne, Andrew a été le représentant spécial du Royaume-Uni pour le commerce. Il a eu des connexions financières multiples et des soupçons existent sur des prises d’intérêts personnels. C’est un autre aspect qui pourrait éclater à son tour et pour l’institution, il est absolument impossible que cela devienne un scandale d’État qui entacherait à nouveau la monarchie. D’après l’opinion publique, près de 80 % des Britanniques étaient favorables au retrait des titres d’Andrew. La situation devenait intenable, Charles était acculé… Il a tranché, là où la reine Elizabeth n’avait pas réussi de manière complètement définitive parce qu’elle était mère et qu’Andrew était un peu son favori.
En quoi cette annonce est-elle retentissante ?
Personne ne s’attendait à un retrait aussi rapide. D’ordinaire, pour retirer le titre de prince, un acte du Parlement serait nécessaire. Cependant, Charles a trouvé une manœuvre différente. Il a opté pour un Royal Warrant, une prérogative émanant du souverain. Il l’a transmis au Lord Chancelier, le responsable du Roll of the Peerage, un registre des pairies et titres nobiliaires. Aujourd’hui, Andrew ne figure plus sur cette liste et n’est plus désigné comme le duc d’York. C’est maintenant officiel. Charles a veillé à ce qu’il y ait un effet immédiat. Un passage au Parlement aurait engendré des semaines de débats et des révélations publiques potentielles.
Les médias britanniques sous-entendent une certaine influence du prince William dans cette décision. Est-ce envisageable ?
William a toujours eu une position en retrait. Sur ce sujet, il était d’avis qu’il fallait une approche plus radicale que celle qui avait été adoptée. William avait cette conviction persistante que tous les scandales concernant Andrew entacheraient l’institution, quels qu’en soient les résultats. Néanmoins, le Palais a précisé que c’était la décision de Charles, en tant que monarque. Le roi a consulté ses conseillers, sa famille élargie et le prince William, son héritier, mais on ne peut pas affirmer que c’est la décision de William. En revanche, d’autres éléments ont pu influencer, comme le déménagement prochain de William et sa famille près du Royal Lodge, la grande demeure à Windsor où vivait Andrew. Il sera transféré dans le Norfolk, à Sandringham, un domaine privé. Il passera à la campagne, où il sera moins exposé aux paparazzi et à la traque. Cependant, c’est Charles qui financera cela sur ses fonds privés. Il ne sera plus possible de dire que le domaine de la couronne, qui contribue aussi aux finances publiques, loge Andrew.
Hormis cet isolement, Andrew ne pourra donc plus du tout représenter la couronne ?
Il ne le pouvait déjà plus. En 2019, lorsque l’affaire éclate et qu’il accorde une interview calamiteuse à la BBC, il accepte de se retirer de la vie publique. En 2021, Virginia Giuffre porte plainte. L’année suivante, la reine lui retire ses honneurs militaires. À partir de ce moment-là, il ne pouvait également plus utiliser son prédicat d’Altesse royale. S’il devait être annoncé officiellement quelque part, on ne disait plus « son Altesse royale le prince Andrew », mais simplement « le prince Andrew, duc d’York ». Il y a eu une gradation.
Notre dossier sur le roi Charles III
Les filles d’Andrew conserveront-elles leurs titres ?
Le Palais a confirmé qu’Eugenie et Beatrice garderont leur titre de princesses. Cela est dû aux lettres patentes de 1917. Il est stipulé que tous les petits-enfants nés d’un fils de souverain – donc logiquement les enfants de Charles, Andrew et Edward – ont droit aux titres de princes et princesses à leur naissance. Andrew, qui a toujours voulu le meilleur pour ses filles et avait beaucoup d’ambition pour elles, tenait énormément à ces titres. Son retrait est également une façon de les protéger aujourd’hui. Par ailleurs, Charles a précisé qu’elles n’avaient pas à être tenues responsables des frasques de leurs parents.

