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Thierry Breton, ancien commissaire européen, n’est pas en odeur de sainteté aux États-Unis.

Thierry Breton a été commissaire européen au Marché intérieur de 2019 à 2024, période durant laquelle il a mené des enquêtes visant X (ex-Twitter), Meta (Facebook, Instagram) et TikTok pour la diffusion présumée de « fausses informations » et de « discours de haine ». Stéphane Séjourné, successeur de Thierry Breton à la Commission européenne, a exprimé sa « solidarité totale » face aux sanctions américaines imposées à Breton.


Thierry Breton, ancien commissaire européen, s’est imposé comme une figure majeure de la Commission européenne par son combat pour la régulation des géants de la technologie. Aujourd’hui, il fait face à une interdiction de séjour aux États-Unis. Le Français, connu pour ses échanges musclés avec Elon Musk, a choisi le réseau social du milliardaire pour exprimer sa protestation contre les sanctions imposées par l’administration Trump.

À l’époque de son mandat, Breton pilotait les enquêtes sur X (anciennement Twitter), Meta (Facebook, Instagram) et TikTok, concernant la diffusion présumée de « fausses informations » et de « discours de haine ». Sur X, il a lancé une question : « Un vent de maccarthysme souffle-t-il à nouveau? » en référence aux chasses aux sorcières menées par le sénateur Joseph McCarthy dans les années 1950. Il a également rappelé que « 90% du Parlement européen – démocratiquement élu – et les 27 États membres à l’unanimité ont voté le DSA », en évoquant la législation européenne sur le numérique dont il fut l’un des artisans.

Cette sanction américaine surprenante remet en lumière l’activité de Breton lors de son passage à Bruxelles. En tant que commissaire européen au Marché intérieur de 2019 à 2024, il était présent sur de nombreux fronts, participant à des joutes politiques, y compris contre Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne.

Breton s’est fait connaître pour sa lutte contre les abus des géants du numérique, affichant un style de leader à la fois atypique et très politique. En tant que responsable du numérique jusqu’à son départ, il a supervisé les enquêtes sur X, Meta et TikTok pour la propagation présumée de contenus problématiques.

Sur les réseaux sociaux, il a interagi directement avec Elon Musk, qui a répondu promptement. Bien que les deux hommes se soient rencontré à plusieurs reprises et semblent initialement s’apprécier, leurs relations se sont détériorées avec les accusations successives contre X en Europe.

Les législations européennes, notamment le DSA et le DMA, visant à réguler des géants comme Amazon, Apple, Google et Meta, représentent l’un des héritages de cet ancien ministre français de l’Économie. Ces textes imposent de nouvelles obligations pour mettre fin aux abus de position dominante et contrôler la diffusion de contenus illégaux. « L’internet ne peut rester un Far West », a-t-il résumé, incarnant le nouveau shérif du web.

Au Parlement européen, des élus de gauche, du centre et de droite ont soutenu Breton suite à la sanction américaine. Manfred Weber, leader de la droite européenne, a déclaré : « L’Europe est souveraine pour définir ses propres règles en ligne. Point final. (…) Le DSA protège nos démocraties ! »

La Commission européenne a fermement condamné les sanctions américaines, et Stéphane Séjourné, successeur de Breton, a exprimé sa « solidarité totale », affirmant que « aucune sanction ne fera taire la souveraineté des peuples européens ».

Nommé en 2019, Thierry Breton avait quitté son poste à la tête du groupe français de technologie Atos pour devenir le premier grand patron à rejoindre la Commission européenne. Très présent dans les médias, il a su se forger une image de disruptor qui fait bouger les lignes.

Connu pour sortir « les gants de boxe », il a parfois eu des conflits avec certains collègues, et a probablement engagé le combat de trop au printemps 2024 en s’en prenant publiquement à Ursula von der Leyen lors d’une polémique sur une nomination. Se disant désavoué par la présidente allemande, il a quitté la Commission en septembre 2024, laissant son poste à Stéphane Séjourné.

Thierry Breton a réussi à se rendre indispensable, comme en 2021, en gérant la situation des vaccins durant la crise du Covid, même si l’Europe avait été critiquée pour son retard. Cet ingénieur de 70 ans, connu pour ses cheveux grisonnants, est parfois critiqué pour ses discours longs et désordonnés. L’ancien patron de grandes entreprises françaises de la tech, après son départ de Bruxelles, a rejoint le conseil consultatif international de Bank of America et fréquente désormais assidûment les plateaux télé pour défendre « l’Europe puissance » et la régulation du numérique.