Rougeole : comment le Maroc est en passe de gagner la bataille

Une flambée mondiale et des répercussions locales
Dès lors, en l’espace de deux ans, le Maroc a été confronté à trois vagues épidémiques successives, chacune imposant son lot de défis et mettant à l’épreuve la résilience de son système de santé. La première, survenue à la mi-2023, a pu être contenue grâce à une stratégie de prévention et de vigilance renforcée, limitant ainsi sa propagation et son impact sur les infrastructures hospitalières.
La seconde vague, qui a émergé au début de l’année 2024, bien que plus marquée, a eu un effet modéré, permettant aux autorités sanitaires d’ajuster leur dispositif de riposte en fonction des enseignements tirés de la crise précédente. Mais c’est la troisième vague, apparue en octobre 2024, qui a constitué le plus grand défi sanitaire. Son intensité et sa durée ont mis sous tension les établissements hospitaliers, contraignant le gouvernement à mobiliser des ressources exceptionnelles pour éviter le pire.
Face à cette montée en puissance de l’épidémie, l’exécutif a réagi avec célérité en déployant une réponse sanitaire alliant renforcement des capacités hospitalières, accélération des campagnes de vaccination et multiplication des mesures de contrôle épidémiologique. «Nous avons agi rapidement et avec fermeté pour stopper cette troisième vague», rappelle Amine Tahraoui, soulignant la détermination des autorités à préserver l’équilibre sanitaire du pays et à protéger les populations les plus vulnérables.
Face à l’urgence, les autorités ont initié une campagne de vaccination massive, visant à rattraper le retard immunitaire et à protéger les populations les plus vulnérables, notamment les jeunes enfants, chez qui le risque de complications reste le plus élevé.
«Nous avons lancé une campagne de vaccination intensive, atteignant un taux de couverture de 96% pour plus de 10,6 millions d’enfants», souligne le ministre, illustrant l’ampleur des efforts consentis pour endiguer la propagation du virus. Afin de garantir la pérennité de cette couverture, les stocks de vaccins ont été considérablement renforcés, avec une réserve stratégique de 5 millions de doses. À cela s’ajoute un stock de vitamine A, élément clé dans le renforcement de l’immunité infantile, consolidant ainsi l’arsenal de prévention déployé par le Royaume.
Outre la vaccination, la stratégie du ministère repose sur un suivi hebdomadaire strict de l’évolution des cas, permettant aux autorités sanitaires de réagir promptement et avec précision à chaque fois qu’un foyer épidémique est détecté. Cette surveillance continue s’avère essentielle pour ajuster les interventions en temps réel et prévenir toute résurgence du virus, consolidant ainsi les acquis de cette riposte sanitaire d’ampleur.
Une baisse encourageante des cas, mais la vigilance toujours de mise
Toutefois, Amine Tahraoui appelle à la prudence et met en garde contre tout relâchement prématuré. «Malheureusement, la semaine dernière, nous avons enregistré 4 décès parmi des enfants non vaccinés, ce qui démontre l’importance cruciale de la vaccination», souligne-t-il, rappelant que l’immunisation demeure la meilleure arme contre l’épidémie. Ces décès illustrent le risque persistant pour les populations les plus vulnérables et renforcent la nécessité d’un engagement collectif en faveur de la couverture vaccinale.
Car, si les résultats sont jusqu’alors globalement encourageants, l’épidémie reste une menace latente, particulièrement dans les régions les plus touchées du Royaume. Souss-Massa, Casablanca et Rabat demeurent sous haute surveillance, ces zones concentrant encore un nombre significatif de cas. Les autorités sanitaires restent mobilisées pour maintenir cette dynamique de recul de l’épidémie, tout en veillant à ce que la vigilance et les efforts de prévention ne faiblissent pas.
Le gouvernement ne se contente pas de répondre à l’urgence sanitaire, il met également en place des stratégies préventives à long terme, relève le responsable gouvernemental. En collaboration avec le ministère de l’Éducation nationale, des unités de vaccination ont été installées dans les écoles pour faciliter l’accès à l’immunisation des élèves. De plus, face à la défiance croissante envers les vaccins, plus de 4.530 associations locales ont été mobilisées, notamment avec le soutien du ministère de l’Intérieur, pour sensibiliser la population et renforcer la lutte contre les préjugés et les fausses informations. Les médias et les professionnels de santé sont appelés à agir dans ce sens main dans la main, ajoute M. Tahraoui
Dossier médical électronique : le partage des données dès 2025
Parallèlement, la numérisation du système de santé s’impose comme un pilier stratégique incontournable. L’introduction du dossier médical électronique vise à optimiser la prise en charge des patients et à fluidifier la coordination entre établissements publics et privés. Dans cette optique, le déploiement du dossier médical partagé permettra, à terme, aux patients de centraliser leurs données de santé et de les mettre à disposition des praticiens de leur choix. Dès la fin de l’année 2025, l’interopérabilité entre les systèmes informatiques des acteurs du secteur, tant ceux du secteur privé que ceux du secteur privé, garantira un partage sécurisé et structuré des informations médicales, marquant ainsi une avancée décisive dans la modernisation du paysage sanitaire national, a expliqué M. Tahraoui.
Territorialisation de la santé : vers une gouvernance optimisée
La région de Tanger-Tétouan-Al Hoceïma a été désignée comme site pilote pour expérimenter ce dispositif avant son déploiement progressif à l’échelle nationale. L’ambition, selon M. Tahraoui, est de repenser l’architecture hospitalière en renforçant les complémentarités entre les structures publiques et en assurant une gestion plus efficiente. «Notre objectif est de bâtir un système plus performant, plus transparent et plus équitable pour l’ensemble des citoyens», a indiqué le ministre, mettant en avant la volonté de l’État d’ancrer ces transformations dans une logique de gouvernance rigoureuse et durable.