Marine marchande : le Maroc explore l’utilisation des pavillons de Panama et Malte
Industrie maritime. La future stratégie nationale pour la constitution d’une flotte nationale compétitive suite à l’appel royal prend petit à petit forme. Le ministre du transport vient d’en dévoiler les premières pistes sur la base d’une étude menée avec un cabinet international. Premières indiscrétions.
Bientôt des bateaux marocains battant pavillons panaméen, maltais ou libérien. En tout cas, une décision semble déjà être prise pour que la future flotte nationale de marine marchande intègre en plus des bateaux battant pavillon marocain des navires opérés par des entreprises avec des participations ou des capitaux marocains. Dans ce sens, la tutelle confirme la volonté d’explorer le recours à des pavillons dits de complaisance pour constituer facilement une flotte nationale très compétitive. «Aujourd’hui, le pavillon n’est plus le signe de propriété comme ce fut le cas il y a quatre décennies. Des pays se sont spécialisés dans la fourniture de prestations de services de pavillon», explique le ministre du transport et de la logistique, Mohammed Abdeljalil, qui intervenait dans le cadre d’un événement du CESE (Conseil économique, social et environnemental) consacré à l’industrie navale. «Prenons l’exemple de la France, un pays avec qui nous avons des relations importantes disposant de l’un des plus importants armateurs mondiaux de conteneurs. Très peu de bateaux de cette compagnie peuvent être «pavillonnés» en France mais leur immense majorité est «pavillonnée» ou bien à Malte, au Liberia ou au Panama. Ces pavillons étaient appelés autrefois des pavillons de complaisance mais je préfère les considérer plutôt comme des pavillons d’aisance tout simplement parce que ces acteurs se sont spécialisée dans le domaine», a ajouté la même source assurant que la flotte marocaine comptera bien évidemment des navires battant pavillon marocain mais les bateaux qui seront opérés par des nationaux ou bien ceux qui sont propriété d’intérêts nationaux feront également partie de ladite flotte.
Mesures prioritaires
L’étude menée par le ministère et qui sera bientôt finalisée propose également d’harmoniser le fonctionnement du futur système avec les standards internationaux. Selon le ministre de tutelle, les mesures prioritaires proposées englobent notamment des incitations fiscales puisque tous les pays opérant des flottes de marine marchande ont supprimé l’impôt sur la société pour le remplacer par une taxe au tonnage forfaitaire dépendant de la taille des navires. «L’un des freins au développement d’une flotte marocaine, connu de tous depuis longtemps, concerne la retenue à la source sur l’affrètement à temps. Lorsque la compagnie nationale de transport aérien affrète un avion pour une durée déterminée, elle n’est pas assujettie à la retenue à la source. Il est donc normal que cet assujettissement soit supprimé également pour le transport maritime dans ce cas pour être sur le même pied d’égalité que les concurrents internationaux», indique le ministre. Il sera également question pour les responsables de subventionner le secteur à l’instar de ce qui se fait également pour d’autres domaines d’activités dans le cadre de la charte nationale d’investissement. De même, certaines règles seront allégées dans le cadre de la future stratégie, notamment l’obligation d’avoir à bord du navire un quota minimum de personnel navigant de nationalité marocaine. Parmi les pistes proposées également par les responsables, la nécessité de transformer la direction du transport maritime pour jouer un rôle plus important avec des compétences et prérogatives plus larges. Par ailleurs, la nouvelle stratégie consacre une part importante à la mise en place d’une industrie navale locale mais également et surtout la fourniture de services de maintenance au niveau des chantiers navals marocains pour garantir une certaine indépendance et souveraineté pour la flotte nationale.
Connectivité
Par ailleurs, le ministre a mis l’accent sur l’importance de faciliter la connectivité entre les différentes composantes de la côte atlantique, en mettant à disposition des terminaux de transport et de logistique, afin de promouvoir la mise en place d’une flotte maritime commerciale nationale forte et compétitive. Cette flotte maritime s’inscrit dans une ambition économique et politique plus large qui vise à assurer une connexion fluide entre les composantes de la côte atlantique du continent africain et à transformer sa destination atlantique en un axe de communication humain, un pôle d’intégration économique et une source de rayonnement continental et international, a expliqué le ministre, notant que l’étude du ministère portant sur le développement d’une flotte maritime commerciale en mesure de consolider la complémentarité régionale et la souveraineté économique nationale et de contribuer au développement économique et social est à sa phase finale. L’objectif est de faire en sorte que d’ici 2040, le Royaume dispose d’une flotte maritime forte et compétitive, a indiqué M. Abdeljalil. Pour rappel, Sa Majesté le Roi Mohammed VI avait lancé l’Initiative atlantique en faveur des pays du Sahel, visant à renforcer l’accès des nations sahéliennes à l’océan Atlantique, dans le but de faire de l’Afrique un continent prospère, concrétisant ainsi la coopération Sud-Sud basée sur un partenariat gagnant-gagnant. Cette initiative a été détaillée lors de la réunion ministérielle de coordination sur l’initiative internationale de SM le Roi Mohammed VI visant à faciliter l’accès des pays du Sahel à l’océan Atlantique. Cette réunion s’est tenue le 23 décembre 2023 à Marrakech avec la participation de représentants du Mali, du Niger, du Burkina Faso et du Tchad. La vision Royale Atlantique offrira une nouvelle plateforme pour favoriser le développement économique tant pour le Maroc que pour les pays participants le long de la façade atlantique, mettant l’accent sur le développement commun de la région voisine du Maroc, en plus des pays côtiers participant à la réunion de Marrakech.
C’est le titre de la boite
Flotte nationale
Mise à niveau.
Le Maroc compte rapidement se positionner dans le transport maritime. Dans ce sens, le Souverain avait appelé à renforcer la flotte nationale. «Si, par sa façade méditerranéenne, le Maroc est solidement arrimé à l’Europe, son versant atlantique lui ouvre, quant à lui, un accès complet sur l’Afrique et une fenêtre sur l’espace américain. C’est la raison pour laquelle Nous sommes déterminé à entreprendre une mise à niveau nationale du littoral, incluant la façade atlantique du Sahara marocain», avait affirmé SM le Roi dans Son discours adressé à la Nation à l’occasion du 48ème anniversaire de la glorieuse Marche Verte. «Nous sommes également attaché à ce que cet espace géopolitique fasse l’objet d’une structuration de portée africaine», avait souligné le Souverain. «Nous nous attachons à mettre à disposition les moyens de transport et les stations logistiques nécessaires. Cela inclut aussi de réfléchir à la constitution d’une flotte nationale de marine marchande, forte et compétitive», avait poursuivi SM le Roi. Quelques semaines après, le ministre du transport et de la logistique avait annoncé que son département planchait sur la préparation d’une étude stratégique concernant la constitution d’une flotte nationale de commerce maritime forte et compétitive. Au Parlement, le ministre de tutelle avait affirmé que le secteur du transport maritime est fortement lié au développement du secteur portuaire, soulignant que le Maroc a procédé à la transformation d’importants pôles portuaires le long des côtes méditerranéenne et atlantique et veillé à les relier aux réseaux autoroutier et ferroviaire. Il a relevé que cette démarche a permis d’attirer des investissements internationaux dans le secteur du transport maritime et, partant, améliorer l’indice de connectivité maritime du Maroc, classé désormais au 20e rang à l’échelle internationale, grâce à sa connectivité à plus de 184 ports dans 71 pays.