L’État social marocain : vision Royale et pensée socialiste en convergence
Le discours Royal d’ouverture de la cinquième année législative a eu lieu le 10 octobre et a mis en avant l’importance de la justice sociale et de la responsabilité politique. Il a également souligné la nécessité d’une approche territoriale du développement pour corriger les inégalités, notamment dans les zones marginalisées représentant près d’un tiers du territoire marocain.
Le discours d’ouverture de la cinquième année législative par Sa Majesté le Roi Mohammed VI ne s’est pas seulement contenté de marquer le retour de la politique au Parlement, mais a également redonné du sens à la responsabilité publique et à l’idéal d’un État social fort. Dans un climat de désillusion générale et de fatigue institutionnelle, le Roi a esquissé les fondements d’une refondation reposant sur la justice, l’efficacité et la dignité. Cette orientation résonne profondément avec la pensée socialiste de l’Union socialiste des forces populaires (USFP), qui plaide depuis des décennies pour un modèle de développement humain durable, où la richesse nationale serait synonyme de progrès partagé et non de privilèges.
« La Monarchie réformatrice et l’USFP convergent ainsi autour d’un socle commun : la conviction que l’Etat social ne se limite pas à corriger les inégalités, mais qu’il doit prévenir leur reproduction en plaçant l’humain au centre du développement. »
Le discours royal a constitué un moment décisif dans la vie politique marocaine. Plus qu’un simple exercice constitutionnel, il a représenté, à l’instar des discours précédents du Monarque dans ces circonstances, une orientation stratégique pour le Maroc, réaffirmant l’importance de la justice sociale et le besoin d’un renouveau dans la gouvernance publique. Le Roi y a remis le citoyen au centre des politiques publiques, rappelant que la légitimité de l’action de l’État ne réside pas dans l’accumulation de programmes, mais dans leur impact réel sur la vie des Marocains. Par ce biais, le Souverain a renforcé le principe de responsabilité politique, en connectant la reddition des comptes à la crédibilité des décisions publiques.
Cette vision, qui cherche à équilibrer performance économique et équité sociale, se rapproche profondément de la philosophie de l’USFP. Depuis longtemps, le parti défend l’idée d’un État bâtisseur, garant de la justice et du progrès collectif. Ainsi, la Monarchie réformatrice et l’USFP s’accordent sur la conviction que l’État social ne doit pas seulement corriger les inégalités, mais prévenir leur récurrence en plaçant l’individu au centre du développement.
« Le discours Royal agit comme un miroir tendu à la majorité : soit elle redonne souffle à l’action publique, soit elle devra rendre des comptes devant le peuple souverain. »
Le discours royal du 10 octobre a clairement mis en avant la vision d’une Monarchie citoyenne, attentive et exigeante en matière de résultats. En affirmant qu’« il ne peut y avoir de concurrence entre les grands projets nationaux et les programmes sociaux », le Roi a donné un sens profond à l’idée d’une cohérence dans le développement, qui doit englober les infrastructures, la croissance et la prospérité économique, tout en traduisant ces éléments en mieux-être social et dignité quotidienne.
Cette approche est en parfaite adéquation avec la pensée socialiste de l’USFP, qui refuse de dissocier croissance économique et justice sociale, liberté d’agir et responsabilité envers autrui, enrichissement et devoir de solidarité. Le parti plaide pour une vision humaniste du progrès, où la richesse n’a de valeur que si elle contribue à améliorer la condition des citoyens. Cependant, la réalité sociale du Maroc présente une image différente : une majorité gouvernementale enfermée dans une logique technocratique, focalisée sur les équilibres budgétaires, déconnectée des souffrances réelles du peuple. La politique s’est vue réduite à un exercice comptable où la rigueur financière a pris le pas sur la justice sociale. Le discours royal rappelle alors que la force d’un État ne se mesure pas à son produit intérieur brut, mais à la confiance qu’il inspire et à la dignité qu’il assure.
« Ce message Royal, à la fois mesuré et ferme, s’adresse à tous les acteurs institutionnels. »
En mentionnant que la Constitution de 2011 a défini de manière précise les rôles et responsabilités de chaque institution, le Roi a implicitement mis en garde contre la tentation de l’irresponsabilité politique. La Monarchie fixe l’orientation, mais l’exécution incombe au gouvernement et au Parlement. Toutefois, à l’approche de la fin du mandat, le Maroc semble freiné par un déficit de décision et une absence de vision.
La motion de censure portée par le Groupe socialiste a donc acquis une valeur symbolique significative. Elle ne relevait pas d’une manœuvre, mais d’un acte de responsabilité nationale, visant à rappeler que la démocratie n’a de sens que si elle s’accompagne d’un devoir de reddition des comptes. Dans un pays où les citoyens expriment parfois ce que les institutions taisent, cette motion visait à réhabiliter le débat politique.
Un autre aspect saillant du discours royal est sa lecture territoriale du développement. En évoquant la situation des zones montagneuses, des oasis et des territoires vulnérables, le Souverain a affirmé l’urgence de corriger les déséquilibres spatiaux entravant la cohésion nationale. Ces régions marginalisées représentent près d’un tiers du territoire marocain et concentrent une grande partie des inégalités sociales.
Cette priorité royale prolonge une réflexion défendue depuis plusieurs années par l’USFP à travers ses documents stratégiques, qui affirment que la justice territoriale est une condition de stabilité nationale, et non un simple complément de la politique sociale. La prospérité d’une métropole ne vaut rien si elle repose sur la désertification des campagnes et la marginalisation des zones enclavées. Le discours du Roi rappelle ainsi que le développement doit être territorialisé : chaque dirham investi doit se traduire par un emploi local, un service public accessible et une amélioration des conditions de vie.
En défendant cette approche, la Monarchie et la social-démocratie s’accordent autour d’un même projet : bâtir un Maroc des régions solidaires, où la croissance est non pas concentrée, mais partagée, et où la proximité devient une nouvelle forme d’équité.
Le discours royal a aussi promu la diplomatie parlementaire et partisane comme un levier stratégique pour renforcer l’image du Maroc. En saluant les efforts des représentants de la Nation dans la défense des intérêts du pays, le Roi a établi la diplomatie politique comme un prolongement naturel de la diplomatie d’État. Cette reconnaissance du rôle des partis et du Parlement est essentielle pour consolider l’image du Maroc sur la scène internationale, une image que l’USFP a longtemps incarnée par sa présence active au sein de réseaux internationaux.
En revanche, les partis de la majorité ont souvent réduit la politique à une gestion domestique, ce qui a abouti à une perte de vision et d’ambition sur la scène internationale. Le discours royal rappelle que la crédibilité d’un pays sur le plan externe débute par la crédibilité de ses actions internes, et que l’influence se construit sur la cohérence.
Sur le plan économique, le discours royal fixe les bases d’une réforme claire : il ne suffit plus d’accumuler des plans, il faut produire des résultats. La Monarchie définit une distinction nette entre ambition et efficacité : l’investissement public doit être un outil de justice, et non une simple statistique de performance.
Cette vision se rejoint avec celle de l’USFP, qui prône une économie au service de la dignité, plaidant pour une planification stratégique nationale fondée sur la transparence et la coordination entre l’État, les régions et le secteur privé. L’enjeu n’est pas d’accroître les dépenses, mais de les optimiser. Chaque dirham investi doit justifier son impact sur la vie quotidienne des Marocains.
En élevant l’efficacité, la reddition des comptes et la transparence au rang de principes fondamentaux, le discours royal redynamise la gouvernance publique. Il marque la fin des promesses vides pour faire place à une responsabilité mesurable. C’est ici que se rejoignent la monarchie réformatrice et la pensée socialiste : dans la conviction que la performance économique n’a de valeur que si elle contribue à renforcer la justice sociale.
Enfin, le Roi a rappelé que le changement durable ne peut émaner que de l’intérieur des institutions. Aucune réforme ne réussira sans adhésion ni engagement. La transformation du Maroc repose sur une volonté politique collective plutôt que sur des réactions émotionnelles. Ce message souligne l’importance d’un sursaut civique et d’une réconciliation entre la politique et la société.
Aujourd’hui, la responsabilité incombe aux partis et syndicats, qui doivent agir pour encadrer la jeunesse, transformer la contestation en propositions et la revendication en participation. L’État social ne doit pas être une promesse abstraite, mais une réalité à construire.
Ainsi, un horizon commun émerge entre la Monarchie réformatrice et la gauche responsable : celui d’un Maroc moderne, juste et cohérent, où la dignité devient le véritable moteur des réformes, et où la justice sociale redeviendra un destin national.
Par Mohamed Assouali
Secrétaire provincial de l’USFP – Tétouan

