France : Sébastien Lecornu ne parvient pas à former un gouvernement
Sébastien Lecornu doit composer dans l’urgence un gouvernement pour déposer un projet de budget au Parlement avant le 31 décembre, le texte devant être transmis au Parlement lundi ou mardi. Le groupe socialiste, avec 69 députés, est le seul capable de sauver le futur gouvernement, mais a conditionné son soutien à l’abandon du 49-3, des mesures pour protéger le pouvoir d’achat des Français, et une suspension immédiate et complète de la réforme des retraites.
Fragilisé par le retrait des Républicains, Sébastien Lecornu doit composer d’urgence un gouvernement dont la durée pourrait ne pas dépasser quelques jours, avec pour première mission de soumettre un projet de budget au Parlement.
Le temps presse pour le Premier ministre récemment nommé à Matignon, qui fait face à une menace de censure de la part d’un Parti socialiste frustré par quatre semaines de négociations stériles sur ses revendications. Ce dernier, avec sa demande de suspension de la réforme des retraites en échange d’un engagement à ne pas censurer, concentre toutes les attentions.
Selon la Constitution, le Parlement a 70 jours pour examiner un projet de budget avant le 31 décembre, ce qui signifie que le texte doit être transmis lundi ou mardi, après un passage en Conseil des ministres.
Sébastien Lecornu, qui a démissionné lundi dernier en raison du fait que « les conditions n’étaient plus remplies », a intensifié la pression dimanche en affirmant dans la presse dominicale qu’il démissionnerait à nouveau si ces conditions « n’étaient plus remplies à nouveau ». « Je ne ferai pas n’importe quoi », a-t-il déclaré dans La Tribune dimanche, indiquant qu’une nomination gouvernementale pourrait avoir lieu lundi ou mardi.
Lundi, le Président Emmanuel Macron a annoncé qu’il se rendrait en Égypte pour exprimer son « soutien à la mise en œuvre de l’accord présenté par Donald Trump pour mettre fin à la guerre à Gaza », ce qui pourrait compromettre la tenue d’un Conseil des ministres ce jour-là.
Le Premier ministre pourrait aussi choisir de nommer un nombre restreint de ministres régaliens, ainsi que les seuls titulaires des Finances et du Budget, pour accélérer le processus. Cependant, il reste incertain comment ce gouvernement sera constitué dans le temps imparti à Sébastien Lecornu, surtout en l’absence de ministres LR ou du parti centriste UDI (Union des démocrates et indépendants).
Si la question du casting et des délais était résolue, le défi serait encore de maintenir le gouvernement. À l’exception du PS, l’ensemble de la gauche a demandé la censure immédiate du gouvernement Lecornu 2, tout comme le Rassemblement national et l’UDR d’Éric Ciotti. Cela place le Parti socialiste en position de « partenaire obligé » de la Macronie en fin de mandat, a raillé dimanche Hervé Marseille, le président UDI des sénateurs centristes, prévenant qu’une censure pourrait survenir dès « cette semaine ».
Le groupe socialiste, fort de 69 députés, est le seul capable de sauver le futur gouvernement et a donc élevé les exigences. Sans « confirmation de l’abandon du 49-3, des mesures pour protéger et renforcer le pouvoir d’achat des Français et une suspension immédiate et complète de la réforme des retraites », il a averti qu’il censurerait le gouvernement, une annonce faite dès vendredi. Une telle suspension « n’épuiserait pas le débat sur le budget et l’avenir de la France, mais serait un gage de bonne foi et de volonté d’ouvrir une nouvelle période », a précisé Olivier Faure, premier secrétaire du PS, dans la Tribune Dimanche.
« Il n’y a pas de deal caché (…) ce sera la censure et la dissolution ou pas », prévient le Premier ministre dans la presse dominicale. Cependant, concernant la question cruciale de la suspension de la réforme des retraites, ses anciens partenaires du « socle commun », y compris ceux du centre, l’ont abandonné.
Samedi, les Républicains ont rompu toute coopération, refusant toute participation au nouvel exécutif, alors qu’ils étaient intégrés depuis la nomination de Michel Barnier à Matignon en septembre 2024. Ils ont promis un « soutien texte par texte » au Parlement, équivalent à une non-censure.
L’allié traditionnel d’Emmanuel Macron, Horizons, le parti d’Édouard Philippe, a également annoncé qu’il réservait sa décision quant à sa participation « dans l’attente de ce que proposera le Premier ministre pour le pays ». Même le Modem de François Bayrou a exprimé des réserves, soulignant que son engagement « était encore à déterminer en fonction des intentions du gouvernement ».
Selon un sondage Ipsos BVA-CESI publié par la Tribune Dimanche, la popularité des figures de l’ex-socle commun (Édouard Philippe, Gabriel Attal, Bruno Retailleau, Gérald Darmanin) a chuté. Ils ont « donné aux Français le sentiment d’être dans des bisbilles personnelles, d’avoir contribué au désordre national pour des enjeux de campagne présidentielle », a commenté Brice Teinturier, directeur général délégué d’Ipsos.

