Maroc

Cisjordanie : La famille de détenus palestiniens espère un échange.

Halima Shamasneh, âgée de 83 ans, pourrait bientôt retrouver ses deux fils, Abdel Jawad et Mohammed, détenus par Israël depuis 34 ans. Selon un plan convenu entre Israël et le Hamas, 250 « détenus pour des raisons de sécurité » doivent être libérés en échange de 47 otages retenus à Gaza.


« Aujourd’hui, je suis si heureuse que le monde me paraît trop petit pour une joie si grande », déclare Halima Shamasneh, âgée de 83 ans, qui pourrait bientôt retrouver ses deux fils, détenus par Israël depuis 34 ans. Abdel Jawad et Mohammed pourraient être libérés dans le cadre d’un échange entre des prisonniers palestiniens et des otages israéliens, selon l’accord entre Israël et le Hamas, qui a pris effet vendredi, après plus de deux ans de conflit à Gaza. « On nous a appelés pour nous dire : +leur nom est sur la liste+ » des détenus pouvant être libérés, mentionne Mme Shamasneh, qui se déplace à l’aide d’un déambulateur.

Toute la famille s’est rassemblée dans la maison des parents, à Qatanna, un village au nord de Jérusalem, près du mur de séparation entre Israël et la Cisjordanie, un territoire palestinien occupé depuis 1967. Dans le salon, trois générations regardent attentivement le téléviseur. « Donc on attend les nouvelles », indique-t-elle, vêtue d’une robe traditionnelle palestinienne, entièrement brodée à la main.

Sur les murs de la pièce, diverses photos des frères, aux couleurs ternies. Leur habillement rappelle les années 1980, période durant laquelle ils ont été arrêtés. Abdel Jawad, 62 ans, et Mohammed, qui approche la soixantaine, sont les photographiés.
Personne n’aborde les raisons de leur incarcération, mais le dossier d’Abdel Jawad, fourni par Israël dans la liste des prisonniers à libérer, précise qu’il a été condamné à la réclusion à perpétuité pour meurtre, tentative de meurtre et complot en vue de commettre un crime. En revanche, l’AFP n’a pas pu recueillir d’informations concernant Mohammed.

La première Intifada a débuté en décembre 1987, marquant le début de plusieurs années de soulèvement populaire palestinien, ainsi que d’attaques meurtrières menées en Israël par des organisations armées. « J’avais neuf ans lorsque mon père a été emprisonné, aujourd’hui j’en ai 44 et j’ai quatre enfants », témoigne Ajwad Shamasneh, fils d’Abdel Jawad. « Vivre sans père est une tragédie. » « Enlacer son père après 34 ans (…) C’est indescriptible », confie-t-il. À ses côtés, ses frères retiennent leurs larmes.

Israël et le Hamas ont donné leur accord pour la première phase du plan du président américain Donald Trump, qui vise à mettre fin à la guerre déclenchée par l’attaque inédite du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, qui a depuis ravagé la bande de Gaza. Dans le cadre de ce plan, le Hamas est tenu de libérer d’ici lundi midi les 47 otages (vivants ou morts) restants à Gaza, enlevés le 7 octobre, ainsi que le corps d’un soldat tué en 2014 lors d’un précédent conflit à Gaza.

En contrepartie, Israël devra libérer 250 « détenus pour des raisons de sécurité », dont de nombreux condamnés pour des attaques meurtrières anti-israéliennes, ainsi que 1 700 Palestiniens interpellés par l’armée israélienne à Gaza depuis octobre 2023. Ajwad Shamasneh, travailleur journalier en Israël, explique qu’il n’a pas pu voir son père depuis huit ans, car l’administration pénitentiaire israélienne a interdit ses visites.

En janvier dernier, une trêve de six semaines avait permis la libération de centaines de Palestiniens en échange d’otages. « J’avais de l’espoir, mais ça ne s’est pas réalisé, aujourd’hui, en revanche, l’espoir est concret », estime Youssef Shamasneh, le père des détenus. Cependant, l’incertitude persiste, car ses fils pourraient être obligés de s’exiler à l’étranger, comme cela arrive parfois pour des personnes condamnées à de lourdes peines ou ayant une certaine notoriété dans les Territoires palestiniens. « J’espère qu’ils viendront ici, vraiment. S’ils partent à l’étranger, je ne pourrai pas les voir, ni leur mère », soupire-t-il. Son épouse ne souhaite pas envisager cette possibilité. Elle sait déjà quel plat elle préparera pour ses fils à leur retour chez eux : « un mansaf », une spécialité régionale à base d’agneau et de yaourt fermenté, un plat de fête.