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Turquie : Des troubles éclatent à Istanbul, après l’arrestation de son maire, opposant politique à Erdogan

Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté vendredi soir à Istanbul en soutien au maire de la ville, Ekrem Imamoglu, arrêté mercredi pour des accusations de « corruption » et de « terrorisme ». La mobilisation, appelée par l’opposition, a donné lieu à des affrontements avec la police, notamment à Istanbul, Izmir et Ankara.

« Nous sommes ici avec 300.000 personnes », a lancé Özgür Özel, chef du Parti républicain du peuple (CHP), principal parti d’opposition, depuis l’hôtel de ville d’Istanbul. C’est là que des milliers de manifestants s’étaient rassemblés à l’appel du parti pour ce qui a été baptisé une « nuit de la démocratie ».

Des rassemblements « illégaux et inacceptables »

À Istanbul, les forces de l’ordre ont bloqué plusieurs axes majeurs menant à la mairie et fermé deux ponts. Selon des journalistes de l’AFP sur place, la police a eu recours à des balles en caoutchouc pour disperser les manifestants qui tentaient de rejoindre la place Taksim, où tout rassemblement est interdit jusqu’à dimanche. À Izmir, des canons à eau ont été déployés pour contenir la foule tandis qu’à Ankara, des heurts ont éclaté avec des étudiants. Seize policiers ont été blessés et 53 personnes ont été interpellées, selon les autorités.

Le ministère de la Justice a qualifié les rassemblements d’« illégaux et inacceptables ». Le président Recep Tayyip Erdogan a promis de ne pas céder à la « terreur de la rue », estimant que cette mobilisation conduirait le pays à une « impasse ».

« Ni voleur, ni terroriste »

Ekrem Imamoglu, figure montante de l’opposition, réélu triomphalement en 2024 après avoir pris la mairie d’Istanbul à l’AKP en 2019, devait être investi dimanche comme candidat du CHP à la présidentielle. Mais les charges qui pèsent désormais sur lui – et notamment celle de « soutien au terrorisme » – font craindre une incarcération imminente. Par ailleurs, le diplôme universitaire d’Imamoglu a récemment été annulé, alors que la Constitution turque impose un diplôme d’enseignement supérieur pour être éligible à la présidence.

« Le maire n’est ni corrompu, ni voleur, ni terroriste », a martelé Özgür Özel jeudi soir, appelant à poursuivre la mobilisation jusqu’à la libération d’Imamoglu et des autres maires emprisonnés. 90 personnes restaient en garde à vue vendredi, selon la presse turque.

Ekrem Imamoglu, maire d’Istanbul depuis 2019, est devenu en quelques années l’un des principaux rivaux politiques du président Erdogan.
Ekrem Imamoglu, maire d’Istanbul depuis 2019, est devenu en quelques années l’un des principaux rivaux politiques du président Erdogan. - Tolga Uluturk/ZUMA/SIPA

« N’ayez pas peur, le peuple est là »

Des manifestations ont été signalées dans plus de 45 villes, dont 32 provinces selon un comptage de l’AFP – une vague de protestation inédite depuis le mouvement de Gezi en 2013. Les mots d’ordre sont clairs : « Ne te tais pas, sinon ce sera bientôt ton tour », « N’ayez pas peur, le peuple est là » ou encore « Droit, loi, justice », pouvait-on lire sur les pancartes brandies par les manifestants.

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« Désormais, le Parti républicain du peuple est dans la rue », a averti Özgür Özel. « Où que vous soyez, sortez de chez vous, réunissez-vous avec tous ceux que vous pouvez et marchez tous ensemble ».