Russie, ressources naturelles : la France doit-elle adapter sa « stratégie polaire » ?
La France doit à nouveau se positionner comme « une grande puissance polaire » et intégrer « beaucoup plus la question géopolitique et de défense » en Arctique et Antarctique, selon un rapport publié mercredi. La France a installé sa première base de recherche scientifique en 1963 dans l’archipel arctique du Svalbard (Norvège) et dispose également de deux stations de recherche permanentes en Antarctique.
La France doit de nouveau affirmer sa force et se positionner comme « une grande puissance polaire », en intégrant « de manière plus poussée la question géopolitique et de défense » dans les régions de l’Arctique et de l’Antarctique face au « retour des tensions et des menaces », selon un rapport publié mercredi.
Ces zones stratégiques, riches en ressources naturelles et à l’origine de nouvelles routes commerciales en raison du changement climatique, subissent un décalage entre la « stratégie polaire française » établie il y a trois ans et les transformations géopolitiques survenues depuis 2022, notamment avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie, souligne l’envoyé spécial du président Emmanuel Macron pour les Pôles et l’Océan, Olivier Poivre d’Arvor.
### Une approche plus géopolitique
« La montée des tensions internationales dans l’Arctique, la militarisation de certaines zones et la fragmentation de la coopération scientifique internationale remettent en question l’approche initialement fondée sur le multilatéralisme et la science ouverte », note-t-il.
Par ailleurs, « la compétition stratégiique entre la Russie, la Chine et les États-Unis entraîne une course pour le contrôle des ressources polaires, en particulier les minerais critiques et les ressources énergétiques ». Dans ce cadre, la nouvelle stratégie française pour 2026-2040 doit « intégrer de manière beaucoup plus centrale la question géopolitique et de défense », surtout dans l’Arctique où « sept des huit États riverains (sont) désormais membres de l’Otan ».
### Un investissement de 100 millions d’euros sur 10 ans
La France doit s’efforcer de devenir « une grande puissance polaire au service de la paix, de la science et de la protection des écosystèmes de la cryosphère (espaces glacés) », précise l’auteur.
Dans le domaine militaire, Olivier Poivre d’Arvor propose de « renforcer [les] partenariats de défense avec les États membres de l’Otan présents en Arctique », notamment par « la participation régulière à des exercices conjoints en conditions polaires » et « le partage de renseignement, d’analyses et de retours d’expérience sur les dynamiques arctiques ». Sur le plan scientifique, le rapport recommande un investissement de 100 millions d’euros sur dix ans pour « renouveler les infrastructures scientifiques », y compris l’acquisition de « deux nouveaux navires de recherche polaire ». Bien que le rapport se concentre principalement sur l’Arctique, il met en garde contre les nouveaux enjeux dans l’autre pôle.
### Une base de recherche établie dès 1963
« L’Antarctique, bien que protégé par un traité ambitieux favorisant la paix, la coopération scientifique et l’absence d’activités extractives – en opposition à la situation en Arctique –, pourrait devenir dans la prochaine décennie un enjeu stratégique pour trois grandes puissances : les États-Unis, la Chine et la Russie », met en garde le document.
« Ces trois pays détiennent à eux seuls un tiers de l’ensemble des bases permanentes de recherche en Antarctique et envisagent une révision du Protocole de Madrid sur la protection de l’environnement antarctique, lorsque cela deviendra possible en 2048, avec une vision où l’exploitation des ressources considérables du Continent blanc prévaudra clairement sur leur protection », souligne-t-il.
Historiquement impliquée aux pôles, la France a établi sa première base de recherche scientifique en 1963 dans l’archipel arctique du Svalbard (Norvège) et possède également deux stations de recherche permanentes en Antarctique.

