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Proche-Orient : « Gaza 2035 », le plan fou d’Israël pour faire de Gaza une « nouvelle Côte d’Azur » qui inspire Trump

Faire des ruines de la bande de Gaza une nouvelle « Côte d’Azur » : Qui d’autre que Donald Trump pour proposer cette idée alors que les Palestiniens découvrent à peine l’ampleur du désastre après plus d’un an de guerre. Un plan fou, auquel la communauté internationale s’oppose massivement, mais soutenu par le nouveau président américain, qui reçoit cette semaine le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou.

Evoquée au cours d’une conférence de presse commune, cette idée ne tombe pas du ciel, puisqu’il y a quelques mois, le gouvernement israélien avait présenté le plan « Gaza 2035 », révélé par le Jerusalem Post, qui proposait de transformer en quelques années l’enclave palestinienne en place centrale du commerce méditerranéen.

Le capitalisme va-t-il sauver les Palestiniens ?

Reconstruire Gaza par le libre-échange, un « fantasme ancien » pour Adel Bakawan, directeur du EISMENA, « l’European Institute for Studies on the Middle East and North Africa ». « C’est une idée née en 2001 après les attentats du 11 septembre. George Bush estimait que les Etats-Unis étaient attaqués parce que les conditions économiques désastreuses au Moyen-Orient favorisaient le développement du terrorisme. »

Aujourd’hui, il estime qu’Israël arrive au même constat et pense pouvoir affaiblir le Hamas en améliorant les conditions économiques et sociales en Palestine, par la création d’un état libéral et intégré dans les échanges régionaux. Une « utopie » pour Adel Bakawan. « Cela fait un siècle que la barbarie règne des deux côtés, et d’un coup on voudrait s’entendre pour construire le nouveau Dubaï ? »

« Gaza 2035 »

Que contenait ce fameux plan dont s’inspire Donald Trump ? D’abord, une période de guerre, que nous vivons actuellement, visant à « éradiquer le Hamas et déradicaliser Gaza ». Puis, dans les années qui vont suivre, déléguer à Israël les questions sécuritaires, tout en créant une « autorité gazaouie » créée par les pays arabes, pour gérer la reconstruction et les finances de l’enclave.

Enfin, sous une dizaine d’années, confier à « l’Autorité palestinienne » la gestion du territoire, « seulement avec l’accord de l’ensemble des parties » dont Israël, tout en se gardant le droit « d’agir contre les menaces à sa sécurité ». Un plan fantasque dont Donald Trump n’a repris que quelques éléments. Pas de cogestion, ce sont les Etats-Unis qui « vont prendre le contrôle de la bande de Gaza » et qui en « seront les propriétaires ».

A l’heure du repli global des Américains, ce soutien s’explique selon Adel Bakawan par un intérêt économique : « Récupérer le territoire, c’est aussi en récupérer les ressources. » Crucial quand on sait qu’au large de Gaza se trouve une importante quantité de gaz naturel. Quand aux pays arabes, écartés de l’équation, « aucun n’osera s’engager dans ce projet dans les conditions actuelles ».

Une « nouvelle Côte d’Azur » ?

Au-delà de la reprise en main politique, le plan « Gaza 2035 » avait aussi pour objectif de faire du territoire palestinien une place forte du commerce méditerranéen. Une dimension qui a étonnamment beaucoup plus intéressé Donald Trump, homme d’affaires avant tout.

Un « accès à la Méditerranée » pour l’Arabie saoudite et les Emirats, des « offres d’emploi dans le Sinaï » pour l’Egypte, le gouvernement israélien présente ce plan comme une opportunité pour tous les pays de la région.

Des cartes agrémentent la présentation, présentant les possibilités d’ouverture « vers le sud », ainsi qu’un « nouveau Gaza » où l’on peut voir de futurs emplacements d’usines, de chemins de fer, de champs solaires… Une étude de cas conclut même la présentation, dépeignant Gaza en nouvelle région pionnière dans la construction de voitures électriques.

Les infrastructures de ce "nouveau Gaza"
Les infrastructures de ce « nouveau Gaza » - Gouvernement israélien

Et les Palestiniens dans tout ça ?

De jolies images, des projets ambitieux, ce plan « Gaza 2035 » a tout pour faire rêver les investisseurs, mais n’évoque pas une seule fois la création d’un État Palestinien, et évoque tout au plus une « Autorité palestinienne » dont on ne sait ni la forme ni la légitimité.

Et si le Gaza rêvé par le gouvernement israélien n’était finalement qu’une page blanche, vidée de son peuple ? Sur ce point, Donald Trump a été clair : « Il n’y a pas d’avenir pour les Palestiniens à Gaza ». Evoquant un territoire « inhabitable », ils les invitent à émigrer vers un autre pays du Moyen-Orient et refuse d’évoquer une solution à deux Etats.

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Des « déportations » pour Adel Bakawan, qui souhaite bonne chance aux Israéliens pour trouver des volontaires : « Allez à Gaza pour trouver des Palestiniens qui sont d’accord pour partir, vous n’en trouverez quasiment pas. » Plutôt vivre dans les ruines que quitter son pays à peine retrouvé. Sans accord de leur part, il insiste et rappelle que le droit international interdit de déplacer des populations de leur territoire contre leur gré. « Va-t-on commettre de nouveaux crimes contre l’humanité ? »