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Présidentielle en Turquie: Erdogan en position de force avant le second tour

Un deuxième tour sera toutefois nécessaire pour la présidentielle, a annoncé lundi le Haut-comité électoral (YSK) puisqu’aucun candidat n’a obtenu plus de 50 % des voix. Selon des résultats presque définitifs, Erdogan a emporté 49,5 % des voix, son challenger de l’opposition Kemal Kiliçdaroglu, 44,9 % tandis que le candidat nationaliste indépendant, Sinan Ogan, a obtenu 5,2 % des voix faisant de lui le “faiseur de roi” du second tour.

Une différence de quatre-cinq points entre les deux rivaux sera difficile à rattraper pour le chef des Républicains, d’autant plus qu’Erdogan peut désormais convaincre les électeurs que la Turquie serait ingouvernable avec un parlement acquis à sa cause mais dotée d’un autre président que lui.

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Sinan Ogan, “faiseur de roi”

Sinan Ogan, dissident du parti MHP, fait partie de la droite dure, réclamant le retour des réfugiés syriens et une lutte implacable contre le “terrorisme” du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK). Il pose des conditions à toute alliance avec l’opposition, notamment que celle-ci ne fasse aucune concession au parti pro-kurde, la troisième formation politique du pays.

Bien sûr, nous ne serons pas des partenaires gratuitement. Nous aurons des demandes comme obtenir des ministères”, avait déclaré M.Ogan sur YouTube avant le scrutin.

Le candidat a été sollicité par Kiliçdaroglu dès dimanche soir. “Le besoin de changement dans la société est supérieur à 50 %”, a dit le chef de l’opposition. “Nous devons absolument gagner et installer la démocratie dans ce pays”.

Kemal Kilicdaroglu, the 74-year-old leader of the center-left, pro-secular Republican People's Party, or CHP, leaves after a press conference in Ankara on May 15, 2023. Turkey braced on May 15, 2023 for its first election runoff after a night of high drama showed President Recep Tayyip Erdogan edging ahead of his secular rival but failing to secure a first-round win. (Photo by BULENT KILIC / AFP)
Kemal Kilicdaroglu, le chef de l’opposition, à la sortie d’une conférence de presse, lundi à Ankara. ©AFP or licensors

La plus grande surprise des élections turques est la percée de ce troisième pôle et du candidat nationaliste Ogan”, analyse Soner Cagaptay, professeur turco-américain de sciences politiques. “La Turquie a maintenant trois factions nationalistes : le MHP, allié à Erdogan ; IYI (le parti de Meral Aksener), allié à Kiliçdaroglu et Ogan au milieu.

Plébiscité dans les provinces touchées par le séisme

Erdogan, de son côté, a réussi à mobiliser son électorat conservateur et pieux d’Anatolie centrale et de la mer Noire malgré l’inflation et la crise économique. S’il perd dans les grandes villes comme Istanbul et Ankara, et sur toute la côte de la mer Egée, ses pertes y restent marginales. Le double séisme du 6 février, qui a fait près de 56 000 morts, n’a pas eu d’effet non plus sur son électorat habituel. Le “Reis”, qui a promis de reconstruire 650 000 logements dans les zones touchées, a été plébiscité dans les provinces dévastées, à l’exception de celle de Hatay.

L’homme fort a cependant perdu sa réputation d’invincibilité, car, pour la première fois dans l’histoire de la Turquie moderne, un deuxième tour est nécessaire pour départager les candidats à la présidentielle. Dans les sondages, beaucoup d’électeurs affirmaient qu’ils allaient voter pour Kiliçdaroglu, mais croyaient qu’Erdogan allait l’emporter.

Le score obtenu par Erdogan en Belgique n’est dépassé qu’en Égypte, en Jordanie et en Arabie saoudite.

Erdogan a remporté une fois de plus la mise dans la communauté turque de Belgique, avec 72,31 % des votes en sa faveur contre 24,65 % à Kiliçdaroglu. Le score obtenu par Erdogan en Belgique n’est dépassé qu’en Égypte, en Jordanie et en Arabie saoudite. De la Russie aux États-Unis, la majorité de l’immigration turque a voté pour l’opposition. Le taux de participation en Turquie a été de 88,92 %, alors qu’il a été de 52,69 % à l’étranger.

”Un avantage injustifié” pour Erdogan, selon l’OSCE

Selon l’OSCE, qui a déployé près de 400 observateurs à Ankara et dans le pays, les élections étaient pluralistes et bien organisées, “mais le président sortant et les partis au pouvoir ont bénéficié d’un avantage injustifié, notamment à travers une couverture médiatique biaisée”. Près de 90 % des médias turcs sont désormais sous le contrôle d’Erdogan ou d’hommes d’affaires liés à lui.

Durant la campagne, le président sortant a également multiplié les promesses électorales, haussant les salaires du service public, mettant des employés en préretraite accélérée. Il a pu compter sur le soutien financier de pays comme les Émirats, l’Arabie saoudite et la Russie, et une aide occidentale après le séisme.