Philippines : La CPI ne libère pas l’ex-président Duterte
Rodrigo Duterte reste détenu à La Haye par la Cour pénale internationale, qui a déclaré avoir rejeté sa demande de libération pour raisons médicales. Les juges de la CPI ont estimé que Rodrigo Duterte présente un risque de fuite et pourrait être en mesure d’influencer des témoins s’il était libéré.
Coup dur pour l’ancien président philippin. Rodrigo Duterte demeure en détention à La Haye, la Cour pénale internationale ayant annoncé vendredi avoir rejeté sa demande de libération pour raisons médicales. Les magistrats de la CPI ont estimé que Rodrigo Duterte représente un risque de fuite et pourrait influencer des témoins s’il était libéré. Ils jugent que cela l’emporte sur ses problèmes médicaux éventuels. « La Chambre estime que la détention de Rodrigo Duterte demeure nécessaire », a déclaré la Cour dans sa décision.
Impliqué dans au moins 76 meurtres, les accusations à l’encontre de Rodrigo Duterte proviennent de sa campagne prolongée contre les consommateurs et trafiquants de drogues, qui, selon des organisations de défense des droits humains, a causé des milliers de morts. Les procureurs de la CPI l’ont inculpé de trois chefs d’accusation pour crimes contre l’humanité, lui reprochant d’avoir participé à au moins 76 meurtres en lien avec sa « guerre contre la drogue ».
Le premier chef d’accusation concerne son rôle présumé en tant que coauteur de 19 meurtres commis entre 2013 et 2016, lorsqu’il était maire de Davao. Le deuxième se rapporte à 14 meurtres de « cibles de grande valeur » en 2016 et 2017, période pendant laquelle Rodrigo Duterte était président. Le troisième chef d’accusation vise 43 meurtres lors d’opérations de « nettoyage » dirigées contre de petits consommateurs ou revendeurs de drogue présumés.
Rodrigo Duterte a été arrêté à Manille le 11 mars, transféré aux Pays-Bas le soir même et est détenu depuis dans le quartier pénitentiaire de la CPI à la prison de Scheveningen, à La Haye. Lors de sa première audience, à laquelle il a assisté par liaison vidéo, il est apparu affaibli et parlant à peine.
Son avocat, Nicholas Kaufman, a déclaré que son client n’était pas apte à être jugé en raison de « troubles cognitifs dans plusieurs domaines », demandant à la CPI de reporter indéfiniment la procédure. Il a déploré vendredi le refus de la Cour de libérer Rodrigo Duterte. « La défense considère que la décision de rejeter des garanties étatiques sans précédent pour un octogénaire affaibli et souffrant de troubles cognitifs, tenu à l’écart du public pendant plus de six mois, est erronée », a déclaré Kaufman. « Un appel a été interjeté il y a une semaine », a-t-il ajouté.
La Cour a confirmé que Rodrigo Duterte « présente toujours un risque de fuite et que sa détention est nécessaire pour garantir sa présence durant la procédure préliminaire et un éventuel procès ». Les juges ont mis en avant les « contacts politiques » de l’ancien président et son « réseau de soutien » aux Philippines, dont sa fille Sara est actuellement vice-présidente. Ce réseau pourrait l’aider à fuir, selon les magistrats.
De plus, la Cour a exprimé des inquiétudes quant au fait que Rodrigo Duterte et son entourage pourraient représenter une menace pour des témoins (potentiels), directement ou indirectement par le biais de ses partisans. Enfin, les rapports médicaux fournis par la défense, qui attestent selon elle d’un déclin cognitif chez l’ancien président, n’ont pas suffi à justifier sa libération, ont conclu les juges.
« La Chambre considère que les documents n’indiquent pas en quoi l’état physique ou les troubles cognitifs allégués de Rodrigo Duterte annulent les risques identifiés ci-dessus », a précisé la Cour. Les magistrats ont toutefois noté que cette évaluation ne concerne que la question de la mise en liberté provisoire. Il reste à la Cour de statuer sur l’aptitude de Rodrigo Duterte à être jugé lors d’un procès.

