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L’arrestation d’Imran Khan invalidée

« Votre arrestation est invalide et le processus entier doit être revu », a déclaré Umar Ata Bandial, le président de la Cour suprême, qui examinait un recours déposé par les avocats de M. Khan contre son arrestation mardi dans une affaire de corruption. « Dorénavant, aucune arrestation ne devrait avoir lieu dans les locaux d’un tribunal », a justifié le juge Bandial.

Un sursis temporaire ?

M. Khan, 70 ans, qui avait été renversé en avril 2022 mais espère revenir rapidement au pouvoir, avait été arrêté alors qu’il répondait à une convocation au tribunal dans ce dossier. « J’ai été traité comme un terroriste », s’est-il indigné devant la Cour suprême. Il n’est toutefois pas à l’abri d’une nouvelle arrestation pour cette affaire ou les nombreuses autres dans lesquelles il est mis en cause. « Nous l’arrêterons à nouveau », a d’ailleurs aussitôt promis le ministre de l’Intérieur, Rana Sanaullah, sur une chaîne locale.

L’arrestation de Imran Khan enfonce le Pakistan dans une crise politique à hauts risques

De petits groupes de supporters de M. Khan ont fêté l’annonce de la Cour dans les rues et son parti, le Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI), les a appelés à se rassembler à Lahore (est).

Point culminant de mois de crise qui ont vu cette ancienne star du cricket défier de plus en plus ouvertement la toute-puissante armée, son arrestation avait suscité la rage des partisans du PTI. Des milliers d’entre eux sont descendus dans les rues, incendiant ou endommageant des édifices publics.

Aggravation de la crise

Chose rare au Pakistan, ils s’en sont pris à des symboles du pouvoir militaire, accusant l’armée d’avoir contribué à l’éviction de M. Khan du pouvoir, ce que celle-ci conteste. Au moins neuf personnes sont mortes dans des incidents liés aux manifestations, violemment réprimées par les forces de sécurité, selon la police et les hôpitaux. Des centaines de policiers ont été blessés et plus de 2 000 manifestants arrêtés, principalement dans les provinces du Pendjab (centre-est) et du Khyber Pakhtunkhwa (nord-ouest), d’après la police. Au moins huit hauts responsables du PTI, accusés d’avoir orchestré les violences, ont été placés en détention.

Le gouvernement avait donné son feu vert mercredi à l’envoi de soldats dans la capitale et dans deux provinces, dont celle du Pendjab, la plus peuplée du Pakistan, pour rétablir le calme.

La police d’Islamabad a de son côté annoncé jeudi que des troupes avaient été positionnées dans la nuit dans la « zone rouge » de la capitale, qui abrite les principales institutions gouvernementales.

Les autorités ont coupé l’internet mobile, restreint l’accès aux réseaux sociaux tels que Twitter, Facebook ou YouTube, et ordonné la fermeture des écoles dans le pays.

L’arrestation de M. Khan a marqué une aggravation spectaculaire d’une crise causée par son renversement. Il avait été destitué par une motion de censure, après avoir perdu le soutien de l’armée, qui l’avait appuyé en sous-main lors de son accession au pouvoir en 2018.

M. Khan a ensuite multiplié les manœuvres politiques pour obtenir la tenue d’élections anticipées avant la date limite d’octobre, dans un pays en proie à une grave crise économique. Il s’est aussi lancé dans des diatribes toujours plus virulentes à l’encontre de son successeur, Shehbaz Sharif, et de l’institution militaire, alors que l’armée exerce une influence politique considérable au Pakistan.

M. Khan est sous le coup de dizaines d’affaires judiciaires, ce qu’il dénonce comme une tentative du gouvernement et de l’armée d’empêcher son retour au pouvoir. Son arrestation est intervenue peu après qu’il eut renouvelé ce week-end ses accusations à l’encontre d’un officier supérieur, auquel il reproche d’avoir comploté pour l’assassiner en novembre dernier, lors d’un meeting électoral où il avait été blessé par balle à une jambe. Il n’a pas apporté la moindre preuve de ses allégations, qui ont été dénoncées par l’armée comme « étant fabriquées de toutes pièces et malveillantes ».

Mercredi, celle-ci a prévenu qu’elle s’en était tenue jusque-là à une « extrême retenue ». Elle a menacé d’une « forte réaction » quiconque s’attaquerait aux installations militaires et gouvernementales.

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