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La solidarité européenne envers l’Ukraine présente des lézardes

Aussi, depuis la mi-avril, ces cinq pays ont unilatéralement décidé de prendre des mesures de restrictions des importations de céréales et de produits alimentaires ukrainiens, en contravention avec le droit de l’Union – le commerce est une compétence européenne exclusive exercée par la Commission.

L’Union européenne dénonce les interdictions “inacceptables” de certains États membres,

Pour apaiser les préoccupations légitimes de ces pays et les amener à lever les mesures illégales, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a promis qu’ils se partageraient 100 millions d’euros tirés de la réserve de crise destinée à aider les agriculteurs, qui s’ajouteront aux 56,3 millions déjà versés en mars. La proposition fait grincer les dents d’autres États membres qui constatent que les pays qui ont pris des mesures illégales seraient ainsi “récompensés”.

La Commission européenne se démène pour rétablir le transit des céréales ukrainiennes via l’Union

Par ailleurs, pour éviter que la situation se répète, il est d’ores et déjà acquis que la Commission activera les clauses de sauvegarde prévues lors du renouvellement de l’accord sur la libéralisation des échanges avec l’Ukraine – dont la possibilité de réinstaurer des quotas et des tarifs. Il est aussi question de mieux répartir le transit des produits ukrainiens entre les Vingt-sept. Alors, contents ? Non.

“Il faut que la décision soit prise”

À l’heure d’écrire ces lignes, l’objection des cinq pays n’était pas encore levée. “Rien ne bouge”, soupire un diplomate européen. La Pologne, en particulier, se montre inflexible, alors que dans les autres domaines, elle est pourtant l’un des pays les plus en pointe pour la défense de l’Ukraine. L’opposition polonaise s’explique notamment pas des “questions de politiques intérieures”, fait observer un autre diplomate européen. On votera en effet en Pologne à l’automne, et pour le parti Droit et Justice (PiS) au pouvoir, le monde agricole représente un vivier électoral.

Le temps presse cependant pour conclure l’accord au niveau européen : la levée des quotas et tarifs doit être prolongée avant le 5 juin, et il faut que le Parlement européen puisse se prononcer sur l’accord lors de la plénière de début mai. “Il faut qu’une décision soit prise ce vendredi”, insiste la première source diplomatique.

En règle très générale, les décisions se prennent au consensus au Comité des représentants permanents de l’UE et rarement au vote. Chacun cependant, a fait ses comptes, et remarque qu’à eux cinq, les pays récalcitrants ne forment pas une majorité de blocage. Aussi la présidence suédoise du Conseil de l’Union ne devrait pas hésiter, si nécessaire, à recourir au vote à la majorité qualifiée.

L’essentiel – la prolongation du libre accès au marché européen – sera acquis. La façade de la solidarité européenne n’en présente pas moins des lézardes.