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Guerre en Ukraine : L’opposition russe en exil manifestera dimanche à Berlin contre Vladimir Poutine

Ioulia Navalnaïa, Ilia Iachine et Vladimir Kara-Mourza. Trois grands noms de l’opposition russe à Vladimir Poutine, qui défileront dimanche à Berlin à défaut de pouvoir le faire en Russie. Ce rassemblement, prévu l’après-midi dans la capitale allemande, doit faire renaître une opposition minée par la répression, les exils et les conflits internes.

Pour Ioulia Navalnaïa, veuve d’Alexy Navalny et qui a repris les rênes de son mouvement, la manifestation doit montrer « qu’il existe une Russie antimilitariste et libre ». Illustrant la difficulté de cette ambition, l’opposante a dû admettre, dans un entretien diffusé mercredi par le média d’opposition Dojd, ne pas avoir de « plan » pour mettre fin au règne de Vladimir Poutine. Pour autant, comme son mari avant elle, elle continue de croire qu’une « merveilleuse Russie » émergera à l’avenir.

Berlin, capitale informelle de l’opposition russe

Privée d’influence en Russie par la répression qui a jeté des centaines voire des milliers de personnes en prison, l’opposition espère mobiliser le vivier de dizaines de milliers de Russes exilés depuis 2022. Berlin, qui accueille foule d’entre eux, est devenue la capitale informelle de l’opposition russe. Ilia Iachine, ex-député municipal à Moscou qui a récemment terminé une tournée européenne à la rencontre des exilés après sa libération de prison en septembre, veut tenter de mobiliser cette diaspora autour d’une « initiative antiguerre et anti-Poutine » à même d’inspirer leurs compatriotes restés au pays.

« Tout ce que peut faire l’opposition actuellement, c’est de démontrer que les Russes sont contre la guerre et contre Poutine », relève le politologue russe Abbas Galliamov. Deux choses détermineront ainsi le succès du rassemblement de Berlin : la crédibilité du message et le nombre de participants, explique-t-il à l’AFP. Le problème est que depuis le décès d’Alexeï Navalny, l’opposition russe s’est surtout illustrée par des scandales impliquant ses différentes composantes.

En cause, l’agression au marteau d’un allié de Navalny, la victime pointant du doigt le courant de l’ex-oligarque Mikhaïl Khodorkovski. Ou encore ces accusations à l’adresse de la fondation anticorruption du défunt opposant qui aurait couvert des machinations de banquiers véreux en Russie. « Il est très important de montrer que nous pouvons travailler ensemble et de consolider les diverses forces du mouvement antiguerre russe », insistait dans ce contexte Vladimir Kara-Mourza, ouvertement critique de la guerre en Ukraine et ayant survécu à deux tentatives d’assassinat, à l’antenne de Dojd début novembre.

L’homme d’affaires et critique du Kremlin Evguéni Tchitchvarkine, exilé à Londres depuis des années, a annoncé en novembre sa mise en retrait jusqu’à ce que les figures de l’opposition « se concentrent sur la lutte contre le régime ». « Il est clair que les conflits sont si profonds […] qu’il est peu probable aujourd’hui de réconcilier tout le monde », admettait Ilia Iachine lors d’une interview au Moscow Times début novembre.

Drapeaux russes ou ukrainiens ?

Autre source d’embarras : la question de l’Ukraine, un soutien trop marqué à Kiev et ses alliés occidentaux pouvant aliéner les Russes et détruire tout espoir de carrière politique future dans une Russie post-Poutine. Dans un exercice de funambulisme, Ioulia Navalnaïa a ainsi assuré à l’antenne de Dojd souhaiter « la défaite de Vladimir Poutine » et non « la défaite de mon pays ».

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Anecdotique mais révélateur, Ilia Iachine est lui intervenu alors que des exilés se disputaient en ligne sur les drapeaux à amener à la manifestation du 17 novembre : russe, ukrainien, les deux ? « Concentrons-nous sur les affiches et les slogans. Devenons la voix de nos concitoyens qui sont réduits au silence en Russie », a-t-il plaidé sur Telegram auprès de ses 200.000 abonnés. Le Kremlin, lui, s’est moqué mercredi d’opposants russes « monstrueusement détachés de leur pays » et dont « l’opinion n’a aucune importance ».