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Guerre en Ukraine : L’armée ukrainienne a-t-elle volontairement abandonné Koursk ? Prudence

«70 000 soldats ukrainiens morts en vain », « Zelensky continue de nier l’échec de l’offensive à Koursk », à en lire les unes de certains journaux occidentaux publiées sur les réseaux sociaux, on pourrait croire que la presse occidentale a changé de camp.

Des unes ouvertement prorusses, qui critiquent particulièrement les opérations menées dans la région russe de Koursk, contrôlée depuis plusieurs mois par les forces ukrainiennes mais où les combats font rage. Plusieurs internautes intrigués par ce retournement de veste ont découvert que toutes ces unes étaient factices, et partagées uniquement par des comptes d’extrême droite et prorusses.

A gauche, la fausse une de La Croix partagée par les réseaux de propagande russe, et à droite, la vraie une.
A gauche, la fausse une de La Croix partagée par les réseaux de propagande russe, et à droite, la vraie une.  - @loeildukremlin_

« Une boucherie » des deux côtés

L’objectif de cette propagande : Mettre la pression sur l’Ukraine qui s’accrochait jusqu’ici à ce bout de territoire russe devenu central dans les négociations de paix à venir. En effet, La Russie se refuse à s’asseoir à la table des négociations tant que l’Ukraine contrôle des territoires russes qui pourraient être utilisés comme monnaie d’échange.

Pour y remédier, l’armée russe tente depuis plusieurs semaines de récupérer cette région, à grand renfort de « troupes d’élites et de régiments de soldats nord-coréens » d’après Carole Grimaud, enseignante et chercheuse en géopolitique russe. « On parle d’une boucherie sur place, du côté ukrainien mais aussi du côté russe. Les soldats ukrainiens se retirent petit à petit vers la frontière, mais continuent à tenir une bande de territoire de 70 km. » Plus de 60 000 soldats russes seraient déployés dans la zone à libérer, sans compter les contingents nord-coréens. Du côté ukrainien, la peur est que cette offensive russe ne s’arrête pas à la frontière et vise Soumy, quelques kilomètres plus loin.

Une pression sur le terrain accentuée par le tandem par les propos du tandem Donald Trump-Vladimir Poutine. Semblant paniquer de l’avancée de l’armée russe, le président américain évoquait sur ses réseaux sociaux des « milliers de troupes ukrainiennes encerclées par l’armée russe » appelant Vladimir Poutine à les épargner. Il répète ainsi les mots du président russe, qui parlait quelques heures plus tôt de « blocus de la région » appelant les Ukrainiens à « se rendre ou à mourir ».

Une situation démentie depuis par le président Volodymyr Zelensky, qui a nié le risque d’encerclement de ses troupes, et laisse entendre de plus en plus que ce départ des Ukrainiens serait volontaire. Paul de Gliniasty, directeur de recherche à l’IRIS, assure qu’il n’y a pas pour le moment d’encerclement des troupes ukrainiennes, puisque l’armée est parvenue à évacuer son personnel.

Koursk, la clé des négociations ?

Pour le spécialiste de la Russie, cette retraite ukrainienne, bien que provoquée par les efforts russes, se comprend en regardant l’ensemble du front. « Les Ukrainiens ont besoin de remettre des troupes solides dans les territoires occupés par la Russie, notamment du côté de Pokrovsk. » Pour le chercheur, l’offensive de Koursk a « fait son office », en détournant l’armée russe des territoires ukrainiens.

Accepter la perte de Koursk permettrait aussi à l’Ukraine de faciliter la suite des négociations de paix, le Kremlin ayant fait du départ des soldats ukrainiens un « préalable » à la tenue des pourparlers, considérant la présence de soldats ukrainiens sur son territoire comme un moyen de pression trop important.

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Pour autant Carole Grimaud l’assure, l’Ukraine a « d’autres cartes en main » : « Les Ukrainiens ne sont pas à genoux. Ils ont le soutien européen, des compétences propres en armement… Koursk n’est qu’un atout parmi d’autres. »