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Guerre en Ukraine : Bombes planantes, drones câblés… De nouvelles armes russes repoussent les limites du front

D’abord, une déflagration semble gonfler au ralenti, puis un bruit sourd et enfin une haute colonne de fumée noire : une bombe planante, arme russe utilisée en masse dans l’est ukrainien, vient d’exploser. Rapidement, une seconde colonne apparaît, puis une troisième, une quatrième… En moins d’une demi-heure, l’AFP a été témoin mi-mars d’une dizaine de frappes visant Kostiantynivka et Droujkivka, des villes qui, quelques mois plus tôt, étaient relativement épargnées.

Le ciel est lui zébré d’avions russes, en sécurité à bonne distance du front et à haute altitude, qui larguent ces munitions de centaines de kilos, voir quelques tonnes, capables de planer sur des dizaines de kilomètres jusqu’à leur cible. Issues des stocks soviétiques, ces bombes low-cost sont aujourd’hui équipées d’un kit de guidage par satellite. Une petite révolution technologique qui a donné aux Russes une arme assez précise, bon marché et en quantités énormes.

Même loin du front, les drones frappent tous les jours

Des ailerons fixés au projectile se déploient, lui permettant de planer plus loin, évitant aux avions russes de s’approcher du front. Au sol, ils font des ravages, en témoignent les ruines des villes de Toretsk ou Avdiïvka. L’armée russe les utilise massivement depuis début 2024, mais, mois après mois, ces bombes sont devenues plus lourdes et à plus longue portée, forçant les Ukrainiens à reculer et accroissant la profondeur du front. Fin février, le gouverneur régional Vadym Filachkine avait supplié les civils d’évacuer la ville de Kostiantynivka, à 12 km du front, car le « nombre d’attaques ennemies […] a récemment décuplé ».

Dans les rues, les immeubles éventrés sont désormais légion et les civils se font rares. Les quartiers orientaux de la ville, plus proches des positions russes, sont le territoire des drones explosifs. « Je les entends bourdonner dès que je sors de chez moi », raconte Volodymyr, un éleveur dans la cinquantaine, dont la maison a été touchée par un de ces appareils, manquant de le tuer. Volodymyr en a compté « 108 en une semaine ». « Quand on les entend, on lève les bras et on attend », dit-il, expliquant signaler ainsi au pilote du drone qu’il n’est pas une cible légitime.

Adaptation constante

Le conflit en Ukraine est passée par une phase de guerre de mouvement, puis de guerre des tranchées, avant de se muer en guerre de drones, nourrie par le progrès technologique qui permet d’augmenter la portée de ces appareils relativement bon marché et toujours plus nombreux. À quelques kilomètres du front, Ronin et Archie, deux jeunes soldats ukrainiens, s’entraînent avec des FPV, des drones pilotés en immersion à l’aide d’un casque de réalité virtuelle.

Comme l’Ukraine a su développer des brouilleurs, la Russie a répliqué en déployant des appareils insensibles aux interférences car guidés par des câbles optiques. Ces armes ont une portée de plus de 20 km, repoussant d’autant les limites du front. « L’ennemi en a beaucoup plus que nous. Et ils les utilisent souvent avec succès », admet Ronin, 21 ans. « On est plus exposés et on passe plus de temps à tenir nos positions », dit Archie, son camarade de 24 ans. Des soldats en première ligne s’équipent désormais de fusils de chasse, car leurs projectiles multiples, comme la chevrotine, constituent une parade efficace contre ces drones.

Dans un centre de stabilisation médical, Frenchie, médecin anesthésiste, attend ses patients. Quantité de blessés le sont par des bombes planantes et des drones, justement. Selon lui, le front est désormais d’une profondeur d’une dizaine de kilomètres, bien plus qu’avant, si bien que les ambulances, doivent travailler de nuit. « En 2022, quand on était à 2 km de la ligne, on avait l’impression d’être en villégiature », glisse le médecin de 31 ans, avant de courir s’occuper d’un soldat à la fesse arrachée par l’explosion d’un FPV.