Etats-Unis : Leur fille meurt de la rougeole, ses parents incitent toujours à ne pas se faire vacciner

Elle n’était pas vaccinée. Le 26 février, une fillette de 6 ans est morte dans un hôpital du Texas. Ce décès, le premier en une dizaine d’années dans cet Etat américain, a attiré l’attention des médias, qui ont souligné l’ampleur de l’épidémie d’une maladie évitable grâce à la vaccination. Au 21 mars, 309 cas ont été identifiés au Texas, dont 40 ont nécessité l’hospitalisation des patients. Pourtant, il y a vingt-cinq ans, la maladie avait été déclarée comme « éradiquée » des Etats-Unis. Un taux de vaccination en baisse a permis la résurgence de la maladie.
Le décès de la fillette a aussi attiré l’attention d’une association américaine, Children’s Health Defense [Défense de la santé des enfants] connue pour son scepticisme face à la vaccination. Robert Kennedy Jr, l’actuel ministre de la Santé américain, est le fondateur de cette ONG.
« Sa respiration était trop mauvaise »
Le 17 mars, le site de l’association a diffusé une interview des parents de la fillette, des chrétiens mennonites, une communauté protestante. S’exprimant dans un anglais hésitant et dans un dialecte allemand, la langue de leur communauté, les parents expliquent que leur fille a été la première de leurs cinq enfants à tomber malade de la rougeole.
Au début, les symptômes de la fillette sont similaires à ce que connaîtront les autres enfants de la fratrie. La fillette consulte un médecin qui lui prescrit un médicament contre la toux et de l’acétaminophène, équivalent à du paracétamol. Toutefois, la fièvre « n’a fait que monter », confie le père. « Un matin, j’ai remarqué qu’elle était très fatiguée, que sa respiration était inhabituelle, complète la mère. C’est à ce moment-là que nous avons décidé de l’emmener aux urgences. »
A l’hôpital pour enfants, les médecins détectent que la fillette souffre d’une pneumonie dans son poumon gauche, une complication connue de la rougeole. La petite fille « ne voulait pas parler car sa respiration était trop mauvaise, elle buvait beaucoup et ne pouvait pas beaucoup manger », confie sa mère. Elle est finalement hospitalisée en soins intensifs et est assistée d’un respirateur artificiel.
Le reste de la fratrie tombe malade
Les parents reçoivent ensuite un appel à 4h30 du matin de l’hôpital, qui leur demande de venir, l’état de la fillette s’étant dégradée. Elle décède dans les heures qui suivent. Le reste de la famille, à l’exception du père, tombe malade. Les enfants développent les symptômes deux jours après le décès de la fillette, la mère le jour de l’enterrement.
Les enfants de la fratrie, âgés de 2 ans à 7 ans, ne sont pas vaccinés. Auprès du média The Atlantic, qui a été le premier à parler au père de famille, celui-ci a confié ne pas être vacciné, expliquant que ses parents et grands-parents avaient eux-mêmes eu la rougeole : « Tout le monde l’a. Ce n’est pas si nouveau pour nous. » La foi mennonite n’interdit pourtant pas la vaccination.
Deux doses de vaccin protègent à 99 % contre la rougeole
Seule la mère a reçu le vaccin dans son enfance. Elle explique d’ailleurs à Children’s Health Defense avoir eu une forme modérée de la maladie. Une dose de vaccin protège à 95 % et deux doses, le schéma vaccinal obligatoire en France depuis 2018, à 99 %, selon le site du gouvernement canadien. La rougeole est une maladie contagieuse. La vaccination crée une immunité individuelle mais aussi collective : en réduisant le risque de transmission, elle permet de protéger ceux qui ne peuvent pas être vaccinés, tels que les nouveau-nés ou les personnes en immunodéprimées.
Les parents emmènent ensuite leurs quatre autres enfants consulter le docteur Edwards, un médecin qui pratique une médecine alternative. « Il leur a donné des traitements, et ils se sont très bien rétablis. » D’après Children Health’s Defense, le médecin leur a donné de « l’huile de foie de morue [une source alimentaire de vitamine A] et du budésonide, un stéroïde utilisé pour soulager l’inflammation des voies respiratoires ». Il n’existe aucun traitement pour la rougeole, détaille le site de l’Assurance maladie, seule une prise en charge de certains symptômes comme la fièvre est possible.
« La rougeole n’était pas si grave »
Malgré l’événement tragique qu’ils ont vécu, les parents confient qu’ils ne feraient pas vacciner leurs enfants avec le vaccin ROR, qui protège contre la rougeole. « La rougeole n’était pas si grave, ils s’en sont remis rapidement et le docteur Edwards était là pour nous », explique la jeune mère de famille.
Interrogée sur ce qu’elle dirait aux parents qui font vacciner leurs enfants en raison de l’épidémie qui sévit actuellement au Texas, la mère répond : « Ne faites pas les injections. Il y a des docteurs qui peuvent aider [à lutter contre] la rougeole, qui n’est pas aussi grave que ce que l’on dit. » Le père ajoute que « la rougeole aide à fortifier le système immunitaire », une contre-vérité médicale.
Depuis la publication de cette interview, Children’s Health Defense affirme avoir obtenu le certificat de décès de la fillette. Elle l’a soumis à Pierre Kory, un médecin, qui en a conclu la fillette serait morte d’une « erreur médicale », l’hôpital aurait administré « un mauvais antibiotique » pour traiter la pneumonie. Le problème est que la certification de médecin de Pierre Kory a été révoquée en 2023 par le conseil américain de médecine interne, souligne le média Mother Jones. Pendant la pandémie de Covid-19, le médecin avait promu l’ivermectine, un médicament qui n’a pas d’efficacité prouvée contre cette maladie.