Election du pape Léon XIV : L’antipape, le sauveur de Rome, le protégé de Charlemagne… Qui sont les précédents Léon ?

La fumée blanche a parlé. Le conclave a choisi, et le monde a découvert le visage du nouveau chef de l’Église catholique : Robert Francis Prevost, un americano-péruvien de 69 ans. Le souverain pontife, premier Etats-unien à accéder au trône de Saint-Pierre, a choisi de s’appeler Léon XIV. Celui qui succède au pape François est donc le quatorzième pape à porter ce nom.
Mais qui étaient les précédents ? Ont-ils marqué l’histoire ? De Léon « le Grand » en passant par le celui qui a couronné de Charlemagne, 20 Minutes vous plonge dans l’histoire des papes Léon.
Léon « le Grand » (440-461)
C’est LE pape de l’époque antique. Léon « le Grand », seul pape Léon canonisé, a marqué son époque. Son pontificat fut l’un des plus décisifs de l’histoire catholique et Léon 1er est souvent considéré comme l’un des plus grands papes de l’histoire. Il a joué un rôle clef dans la définition de la doctrine chrétienne lors du concile de Chalcédoine en 451.
Alors qu’un débat théologique faisait rage à l’époque, Léon « le Grand » a établi que Jésus-Christ possédait deux natures, divine et humaine, unies en une seule personne. Cette définition a mis tout le monde d’accord et évité une scission de l’Eglise catholique entre ceux pour qui Jésus était humain et ceux pour qui Jésus était divin.
Mais il a aussi eu un rôle politique : en 452, Léon 1er a rencontré en personne Attila le Hun aux portes de Rome et l’a convaincu de ne pas piller la ville. Un épisode légendaire (quoique souvent enjolivé) qui lui a valu une popularité immense, et une place de choix dans l’histoire de la papauté.
Léon III, celui qui couronna Charlemagne (795-816)
Le jour de Noël 800, Léon III, pape depuis cinq ans, signe un acte fondateur : il couronne Charlemagne empereur des Romains. Ce geste symbolique est considéré par certains historiens comme le début du Saint Empire romain germanique. Mais son pontificat fut particulièrement houleux. En 799, l’aristocratie romaine accuse de corruption ce pape issu des milieux modestes et tente de le destituer.
Lors d’une procession religieuse, il est violemment attaqué. Ses assaillants tentent de lui crever les yeux et de lui couper la langue. Il parvient à s’enfuir de Rome et rejoint Charlemagne qui lui accorde sa protection et le raccompagne en personne dans la ville. S’il est moins connu du grand public que d’autres papes, Léon III a eu un rôle essentiel dans la refondation symbolique de l’Empire chrétien d’Occident et incarne l’alliance stratégique entre Église et pouvoir franc.
Léon VIII, « l’antipape » (963-965)
Difficile d’imaginer Robert Francis Prevost se référer à Léon VIII en choisissant ce nom. Et pour cause : Léon VIII est considéré par l’Eglise catholique comme un « antipape », c’est-à-dire un pontife dont l’autorité n’était pas légitime. Il en existe une quarantaine dans l’histoire de l’Eglise catholique et Léon VIII fait presque office de cas d’école. Elu en 963, il a, en réalité, été imposé par l’empereur germanique Otton 1er, en conflit ouvert avec le pape en place, Jean XII.
« L’antipape » n’était même pas clerc lorsqu’il a été désigné. Ce coup de force ne tient pas longtemps et dès l’empereur reparti de Rome, Jean XII chasse son protégé et reprend sa place. A la mort du pontife officiel l’année suivante, un nouveau pape, Benoît V, est élu. Mais Otton Ier revient avec ses armées, le chasse et réinstalle Léon VIII, qui reste en place jusqu’à sa mort en 965. Véritable pion d’Otton Ier, Léon VIII est un symbole des tensions entre les pouvoirs politique et religieux.
Léon X, le pape des arts et de Luther (1513-1521)
Dans la célèbre famille des Médicis, je demande le pape. Car oui, Léon X, ou Jean de Médicis, était l’un des membres de l’illustre famille florentine. Devenu pape à seulement 37 ans, Léon X incarne à lui seul le faste de l’Eglise. Amateur de luxe et mécène des arts, il fait de Rome un centre culture majeur. C’est à ce pape que l’on doit la rénovation de la basilique Saint-Pierre, notamment et il a soutenu des artistes comme Raphaël et, dans une moindre mesure, Michel-Ange et Léonard de Vinci.
Mais cet amour de l’art et des belles choses, notamment financées avec la vente d’indulgence – des certificats de l’Église censés réduire le temps de punition des pêcheurs au purgatoire. En 1517, un moine allemand nommé Martin Luther s’indigne de ces « bons de l’Eglise » pour un aller rapidement au paradis. Il écrit 95 thèses pour expliquer que seule la foi, et non pas l’argent, doit compter face à Dieu et fait naître la Réforme protestante. Léon X a fait l’erreur d’ignorer Martin Luther et, s’il a fini par l’excommunier en 1520, c’était déjà trop tard. A cause des excès d’un pape qui mourra à seulement 45 ans, l’Eglise catholique s’est fissurée et des guerres religieuses ont éclaté en Europe.
Léon XIII, le « pape des ouvriers » (1878-1903)
Souriez, vous êtes filmés ! Léon XIII, souvent considéré comme le pape de la modernité, est le tout premier à avoir été filmé. En 1896, un court métrage muet, réalisé par les frères Lumière, le montre bénissant la caméra dans les jardins du Vatican. Cette première est assez représentative du pontificat de Léon XIII qui s’est employé à moderniser le discours de l’Eglise face aux transformations sociales de son époque.
Il est notamment connu pour avoir publié l’encyclique Rerum Novarum en 1891 dans lequel il critique l’exploitation des ouvriers et évoque des notions comme les conditions de travail et un juste salaire. Surnommé le « pape des ouvriers », Léon XIII a jeté les bases d’une Église engagée dans les questions sociales – sans oublier de rejeter le socialisme athée. Intellectuel, il a aussi fait la promotion de la pensée de Saint-Thomas d’Aquin et ouvert les archives du Vatican aux chercheurs.
Et les autres…
D’autres papes ont également porté ce prénom, sans forcément autant marquer l’histoire du catholicisme. Léon II (682-683) s’est illustré par son rôle de « traducteur de paix » quand Léon IV (847-855) a renforcé les murailles de Rome après les raids sarrasins. Léon IX (1049-1054) a lancé d’importantes réformes et joué un rôle clef dans le schisme entre l’Orient et l’Occident en 1054. Suivront encore Léon XI, mort après seulement 27 jours de règne, et Léon XII, tellement austère qu’il avait interdit les jeux de cartes et le théâtre… Une lignée aux profils hétéroclites donc, dans laquelle s’inscrit désormais Léon XIV.