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Déterminé, Boris Johnson a défendu chèrement sa peau face aux accusations de mensonges

Le risque de saper la confiance dans la démocratie parlementaire

L’enjeu de son témoignage est majeur, et concentre l’attention de tous les médias britanniques depuis le week-end dernier : le comité parlementaire doit déterminer si Boris Johnson a menti lorsqu’il était Premier ministre en disant à de multiples reprises aux Communes que les règles et les recommandations en place pendant la pandémie du Covid-19 avaient été suivies au 10 Downing Street. Et ce malgré les nombreuses amendes imposées à nombre de leurs participants par la police à partir du printemps 2022, soit un à deux ans après les événements. Comme l’a indiqué la présidente du comité, la députée travailliste Harriet Harman, “notre démocratie repose sur la confiance que les ministres disent la vérité aux députés lors de leurs interventions à la Chambre des communes. Sans cette confiance, toute notre démocratie parlementaire est sapée”. Avant de rappeler que lorsqu’ils font des erreurs, les ministres sont censés “les corriger le plus rapidement possible”, ce que Boris Johnson n’aurait donc peut-être pas fait.

Sur le plan personnel, l’ancien Premier ministre joue gros : s’il est déclaré coupable à l’énoncé du verdict, qui sera sans doute donné dans un mois, le comité lui imposera des sanctions. S’il est suspendu dix jours de la Chambre des communes, les électeurs de sa circonscription seront autorisés à demander sa démission. Si la pétition en ce sens recueille 10 % des inscrits, une élection partielle sera organisée. Il pourrait donc perdre son siège de député. Sa carrière politique serait probablement terminée.

Une audition sans nouvelle révélation

Cette séance n’a pourtant sans doute pas changé les avis des uns et des autres. A voir les réseaux sociaux, les opposants de Boris Johnson estiment toujours qu’il a menti, qu’il était forcément “évident” à ses yeux que les règles et recommandations n’avaient pas été respectées, comme l’a conclu le comité dans un précédent rapport. Et ce malgré ses dénégations. “Lorsque j’ai parlé aux Communes, je ne pensais pas à un seul événement en particulier, s’est-il défendu. Nous faisions le maximum pour respecter les règles, nous ne jouions pas avec les règles. Ne croyez pas que les gens au 10 Downing Street ne respectaient pas la distanciation sociale, car ils faisaient un grand effort en ce sens”, a-t-il affirmé. Il a pourtant reconnu que cela n’était pas tout le temps possible en raison de la configuration du bâtiment.

Bien que le comité ait épluché des milliers d’e-mails, de SMS, de messages Whatsapp, aucun document ne l’incrimine directement ou ne montre que des employés du 10 Downing Street pensaient à l’époque qu’ils ne respectaient pas les règles et les recommandations en vigueur. “Le recul est une formidable chose mais à l’époque je pensais que lors de ces réunions nous étions en train de travailler”, a-t-il rappelé. Preuve, à ses yeux implacable : quasiment toutes les photos de ces événements illégaux publiées dans la presse ont été prises par son propre photographe officiel. “Toute suggestion selon laquelle nous aurions organisé des événements qui étaient “manifestement” contraires aux règles et aux recommandations et que nous aurions ensuite permis au photographe officiel d’immortaliser ces événements est invraisemblable”, s’est-il étonné. Argument similaire à propos de la tenue de son anniversaire surprise, pour laquelle lui et l’actuel Premier ministre Rishi Sunak avaient reçu une amende : son service de presse en avait immédiatement parlé au Times qui avait publié dès le lendemain un article sur le sujet. Sans que personne ne s’en émeuve à l’époque… et ce jusqu’au début des révélations.

Boris Johnson survivra-t-il à cet épisode ? Difficile à dire, tant ses adversaires au sein du comité semblaient refuser d’accorder le moindre crédit à ses explications. Et ce même s’il espère que le comité conclura qu’il n’a pas “sciemment ou imprudemment induit en erreur la Chambre des communes et qu’aucun outrage n’a été commis”.