Cuba : Des prisonniers fabriquent des cigares pour exporter, selon une ONG
Des prisonniers cubains fabriquent 7,5 % de la production de cigares destinés à l’exportation et reçoivent un salaire de 3.000 pesos cubains. Selon l’ONG Prisoners Defenders, environ 60.000 des 90.000 prisonniers sont soumis à du « travail forcé » dans les centres de détention cubains.
Des prisonniers de l’île de Cuba seraient-ils exploités pour produire des cigares et du charbon de bois destinés à l’exportation ? C’est ce qu’a révélé lundi une ONG espagnole, qui souhaite alerter les entreprises commercialisant ces produits en Europe.
Prisoners Defenders, organisation de défense des droits humains basée à Madrid, a examiné la production manuelle de cigares dans sept prisons du pays, où des centres de fabrication ont été installés. Selon les données analysées, 7,5 % de la production de cigares destinés à l’exportation proviennent de prisonniers qui perçoivent un salaire de 3 000 pesos cubains (7 dollars au taux de change informel). Le salaire moyen à Cuba est de 6 000 pesos. Pour comparaison, un « torcedor » de cigares de l’entreprise d’État Tabacuba peut gagner jusqu’à 25 000 pesos.
En 2024, les ventes de cigares cubains ont atteint 827 millions de dollars, un secteur crucial pour l’économie cubaine, qui subit sa plus grave crise depuis trente ans et fait face à une forte perte de main-d’œuvre en raison d’une émigration massive.
Plusieurs sources rapportent que la production de cigares en prison a débuté début 2024. Un prisonnier cité dans le rapport dénonce : « Le groupe Tabacuba est l’une des entreprises les plus puissantes du pays et il est plus avantageux pour elle de travailler avec des prisonniers, car ceux-ci sont payés à un salaire dérisoire, voire inexistant, pour des journées de 10 heures, sans conditions et très mal nourris. » L’AFP a contacté les autorités cubaines, qui n’ont pas répondu.
En plus de la production de cigares, les prisonniers cubains travaillent dans d’autres secteurs économiques. Les trois principaux sont la production de charbon de bois, la coupe de canne à sucre et la production agricole, tous gravement affectés par le manque de main-d’œuvre.
En 2023, les prisonniers cubains ont produit pour 61,8 millions de dollars de charbon de bois, selon l’ONG. Pour rédiger ce rapport, Prisoners Defenders a interrogé 53 détenus soumis à des activités de travail pendant leur incarcération et a mené 110 entretiens supplémentaires. À partir de ces données, l’ONG estime qu’environ 60 000 prisonniers sur un total de 90 000 sont soumis à du « travail forcé » au sein des établissements pénitentiaires cubains.
Des prisonniers ou proches de prisonniers, contactés de manière indépendante, ont déclaré que le travail était « volontaire », mais certains ont dénoncé une « exploitation » ou des traitements « arbitraires » de la part des gardiens.

