Coup d’État à Madagascar : le président militaire investi, l’Union africaine suspend.
À Antananarivo, le colonel Michael Randrianirina a été investi président de la « Refondation de la République de Madagascar » deux jours après la destitution d’Andry Rajoelina par l’Assemblée nationale. La communauté internationale a réagi à ce changement de pouvoir, l’Union africaine ayant suspendu Madagascar « avec effet immédiat » et excluant le pays de toutes les instances de l’organisation panafricaine.
À Antananarivo, la transition a été officialisée. Deux jours après la destitution d’Andry Rajoelina par l’Assemblée nationale, le colonel Michael Randrianirina, commandant du contingent militaire du Capsat, a été investi président de la « Refondation de la République de Madagascar ». « Ce n’était pas un coup d’État, c’était une prise de responsabilité parce que le pays était tombé au bord du gouffre », a défendu le nouveau chef de l’État à la télévision malgache. Il promet des élections d’ici 18 à 24 mois, ainsi que la mise en place rapide d’un « Premier ministre de consensus ». Les militaires ont également annoncé la suspension de la Constitution.
Critique virulent du régime d’Andry Rajoelina, le colonel Randrianirina avait été emprisonné pendant plusieurs mois à partir de novembre 2023 pour incitation à la mutinerie dans le cadre d’un coup d’État.
Le mouvement est né fin septembre, dans un contexte de coupures d’eau et d’électricité récurrentes. Mené par des jeunes se revendiquant de la « Gen Z », il a rapidement pris une tournure politique. Après plus de deux semaines de manifestations et de violences ayant causé au moins 22 morts et une centaine de blessés selon l’ONU, des militaires du Capsat (Corps d’Armée des Personnels et des Services Administratifs et Techniques, la contingence militaire au pouvoir) ont rejoint les manifestants et pris le contrôle de la capitale. Le soir même, le président Rajoelina a quitté le palais d’Iavoloha, se déclarant « réfugié dans un lieu sûr ». Selon RFI, il aurait été exfiltré vers La Réunion à bord d’un avion militaire français, avant de partir pour une destination inconnue.
La communauté internationale a immédiatement réagi. L’Union africaine a suspendu Madagascar « avec effet immédiat », dénonçant un changement de pouvoir inconstitutionnel. Cette décision exclut concrètement le pays de toutes les instances de l’organisation panafricaine, où il ne pourra plus siéger ni voter tant qu’un gouvernement civil légitime n’aura pas été rétabli.
À Paris, le Quai d’Orsay a jugé « essentiel que la démocratie, les libertés fondamentales et l’État de droit soient scrupuleusement préservés », appelant « l’ensemble des acteurs concernés, institutionnels, politiques et sociaux, à faire preuve de responsabilité, de retenue et de dialogue ». « Il est de leur devoir de garantir un climat serein et respectueux, où chacun peut s’exprimer librement, sans crainte ni pression ou ingérence étrangère », a ajouté le ministère. L’ONU a également exprimé sa « préoccupation face à tout changement de pouvoir inconstitutionnel ».
À Antananarivo, les blindés ont disparu, les barrages ont été levés et, sur la place du 13-Mai, la jeunesse célèbre sa victoire. « C’est pour célébrer le mouvement que la Gen Z a commencé. Ils ont gagné le droit de s’exprimer parce qu’avant on se faisait arrêter », se réjouit Fenitra Razafindramanga, 26 ans, capitaine de l’équipe nationale de rugby. Toutefois, la méfiance persiste : « On s’inquiète de la suite, mais on continuera à se battre. »
Pour la quatrième fois en quinze ans, Madagascar entre dans une transition militaire, tiraillée entre la soif de changement et la crainte d’un retour aux années de plomb.

