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Costumes, durée et déroulement de la cérémonie, traditions et nouveautés… Couronnement de Charles III, mode d’emploi

Sous les rois saxons, la cérémonie était moins formelle car elle suivait la plupart du temps l’élection du roi, une sorte de nomination par ses pairs”, explique Alice Hunt, professeur d’histoire à l’université de Southampton et spécialiste de la monarchie. “Il a fallu attendre le VIIIe siècle pour qu’elle se déroule dans une église et qu’elle prenne une connotation religieuse. Enfin, c’est Guillaume le Conquérant qui a choisi en 1066 qu’elle ait lieu à l’abbaye de Westminster.” Les précédents couronnements s’étaient déroulés à Kingston-upon-Thames et à Bath.

Charles III, une vie à attendre… (Podcast)

”Liber Regalis”, le mode d’emploi du couronnement

Le déroulement du couronnement est minutieusement décrit dans le Liber Regalis (le Livre royal), rédigé en 1382 et préservé à l’abbaye de Westminster. Suivant ses indications, les rois Edouard VII, George V, George VI et la reine Elizabeth II ont tous porté des vêtements et robes similaires pendant leur couronnement respectif. “Il est probable que Charles III entrera en habit militaire, contrairement à ses prédécesseurs, et qu’il se changera ensuite”, indique Alice Hunt. Il devrait avoir les épaules couvertes d’une robe d’État.

À l’image des rois des France, le souverain anglais est oint d’huile sacrée, une tâche accordée ici à l’archevêque de Canterbury, le primat de l’Église d’Angleterre. Cette huile est censée marquer sa relation avec Dieu. Dieu lui transmet son autorité et en contrepartie il s’engage à être le défenseur de la foi anglicane. Biographe de la famille royale, William Shawcross a ainsi écrit que pour Elizabeth II, ”ce fut le moment le plus solennel et le plus important de toute sa vie”.

Elizabeth II, 70 ans de pouvoir et d’influence

Détail important : “L’onction d’Elizabeth II, réalisée sous une canopée et donc à l’abri des regards de la congrégation, n’avait pas été filmée, car le moment a été considéré comme trop solennel”, indique Alice Hunt. “Le déroulement très public des funérailles d’Elizabeth II laisse à penser qu’elle sera cette fois-ci filmée.”

La cuiller qui sera utilisée par l’archevêque Justin Welby pendant l’onction est le seul insigne royal d’origine. “Tous les autres objets du couronnement, c’est-à-dire les couronnes, le sceptre, les différentes épées, etc., avaient été fondus lors de la révolution anglaise de 1649”, précise l’historienne. “Un geste fort pour marquer une rupture avec le passé et interdire le retour de ce régime. Mais cela n’a pas duré et ils ont été recréés à l’identique lors de la restauration de la monarchie en 1660.”

Pour l’onction, Charles III revêtira la Colobium Sindonis, une tunique en lin représentant la pureté. Il se couvrira ensuite de la Supertunica, une tunique de soie dorée destinée à rappeler le lien avec Dieu, sur laquelle sont cousus la rose, le trèfle et le chardon, les symboles de l’Angleterre, de l’Irlande (du Nord) et de l’Écosse. Enfin, il enfilera la robe impériale et tiendra à la main le sceptre et l’orbe.

Les quatre missions du Roi Charles III

Alors que Charles portera la couronne de saint Edouard, Camilla a choisi celle de la reine Marie, couronnée avec son époux George V en 1911. Des diamants transmis par Elizabeth II y seront ajoutés pour lui rendre hommage, en remplacement du Koh-i-noor, le plus grand diamant taillé du monde, retiré en raison d’une polémique autour de son acquisition par la couronne britannique.

FILE - Britain's Queen Elizabeth II, carrying the orb and the scepter, enters Buckingham Palace after her Coronation ceremony in London's Westminster Abbey, June 2, 1953. The crowning of Charles and Camilla, the queen consort, will feature many of the elements of coronations past, the hymns, the prayers, the anointing with scented oils — all of which are designed to remind the world of the history, tradition and mystery embodied by the monarchy. (Pool via AP, File)
Elizabeth II, entre à Buckingham Palace portant le sceptre et l’orbre, après avoir été couronnée à l’Abbaye de Westminster, à Londres, le 2 juin 1953. Ce 6 mai, c’est pour son fils aîné, le roi Charles III, que se déroulera la cérémonie au rituel millimétré. ©1953 AP

Une cérémonie plus courte que le couronnement d’Elizabeth II

Événement on ne peut plus traditionnel, comment le couronnement sera-t-il accepté par les Britanniques ? “La monarchie britannique repose sur ses traditions et cette pompe, nécessaires à la continuité de la couronne et de l’État”, rappelle Philip Kyle, dont la biographie en français de Charles III vient de paraître. “Il faudra donc trouver un équilibre pour préserver cette magie tout en ne paraissant pas trop anachronique”.

La cérémonie sera écourtée : le couronnement d’Elizabeth II avait duré plus de trois heures, alors que celle de son fils devrait durer aux alentours d’une heure et demi. Alors qu’Elizabeth II avait effectué un circuit de 8 kilomètres dans le centre de Londres avant la cérémonie, Charles III prendra le chemin le plus direct entre le palais de Buckingham et l’abbaye de Westminster, long de 2 kilomètres. Un moyen pour le souverain de naviguer habilement entre traditions et modernité, pour satisfaire les uns sans enrager (trop) les autres. Pour le plus grand désarroi des badauds et des admirateurs, forcés de s’amonceler autour d’une courte route pour apercevoir le couple royal.