High-tech

Si vous aimiez torturer vos Sims, pas de panique, vous êtes comme tout le monde

«Humple Borpnah », ça veut dire bon anniversaire dans la langue des Sims. La série de jeux vidéo de simulation fêtait mardi ses 25 ans. Elle a marqué plusieurs générations de joueurs occasionnels et ses quatre épisodes (et quelques spin-off) se sont vendus à environ 200 millions d’exemplaires. Le principe est aussi simple qu’efficace : créer un personnage et éventuellement sa famille, lui construire une maison, et le guider ensuite dans tous les aspects de sa vidéo. Et ce qui était pensé comme une petite simulation critique de la vie américaine est devenu une franchise tentaculaire, où il est possible de faire tout et n’importe quoi, de s’inventer une carrière d’astronaute à la construction de la maison de ses rêves façon Valérie Damidot.

Si beaucoup de joueurs passent des heures à construire la vie idéale pour leurs personnages, il y a une expérience qui unit tous les amateurs de Sims : le plaisir sadique de faire mourir son Sims. Lâchés la piscine sans échelle pour sortir, enfermés dans des pièces d’un mètre carré, forcés de réparer un grille-pain en sortant de la douche, les Sims ont pris cher. « C’est une sorte de curiosité, confesse Gwladys, joueuse depuis de la première heure. Combien de temps mon Sims va mettre à mourir ? De quoi va-t-il mourir en premier, de faim ou de soif ? »

« Je ne suis pas un serial killer »

Ces actions virtuellement cruelles sont souvent réalisées par curiosité ou pour tester les limites du jeu, que Will Wright, le créateur des Sims, avait pensé comme une « coquille vide » laissée aux mains des joueurs. Le jeu offre aussi un espace sécurisé où les conséquences réelles sont minimes, permettant ainsi d’expérimenter des situations interdites ou moralement répréhensibles dans la vie réelle. « C’est marrant de voir toutes les différentes morts qui existent, d’autant que certaines sont complètement barrées, raconte Eve, qui diffuse aussi sur Twitch sous le pseudo Bubulles. Et c’est un défouloir comme un autre, ce n’est pas pire que de tirer sur des gens dans Call of Duty. »

La communauté a même adopté la mort des Sims dans ses défis. Comment faire quand, comme Gwladys, on a 600 heures de jeu et l’équivalent de 1.000 euros dépensés dans les différentes extensions du jeu ? Pour renouveler le plaisir de jouer, les internautes s’affrontent dans des challenges. Il faut construire la maison sur un thème donné, devenir riche ou… tuer le plus de Sims sur un temps imparti, par exemple. Sur Speedrun.com, le record du monde est capable de donner la mort en à peine quinze secondes (dans un incendie provoqué par une plaque chauffante). Essayer d’accumuler le plus de morts insolites dans une même partie devient aussi un jeu dans le jeu. « Je suis pas un serial killer, je suis en quête de quelque chose de rare », résume Gwladys.

Une communauté de spectateurs attentifs

« Les développeurs ont voulu créer une simulation de vie assez simple, mais ça peut devenir lassant tu fais le tour du jeu », estime Eve. Et le public est au rendez-vous sur ce genre de défis, qui se regardent parfois comme des épisodes de sitcom ou de téléréalité. « Ça donne de l’inspiration pour ses propres parties, poursuit la jeune femme. Et sur Twitch, les gens peuvent aussi communiquer avec le streamer et participer à la partie. »

Au fur et à mesure des épisodes, Maxis et Electronic Arts, les équipes derrières Les Sims, ont embrassé ces pulsions violentes et en jouent, avec l’humour un peu absurde qui caractérise la série. « Les créateurs du jeu ont surfé sur la vague et ont proposé du contenu spécifique, comme la possibilité de séduire la Faucheuse qui vient chercher les Sims morts, rapporte Gwladys. Au lieu de bannir ce genre de pratiques, ils ont plutôt adopté le truc. » Et si les développeurs ont annoncé qu’ils n’avaient toujours pas de plan pour la suite de l’épisode 4, sorti en 2014, les fans ont bien assez d’imagination pour prolonger la torture de quelques années.