Pour les « exilés » de TikTok, Clapper est-elle un nouvel Eldorado ?
En 2025, l’agence Reuters a mentionné quelque 200 millions d’utilisateurs de TikTok en Europe. Clapper, qui se présente comme une alternative à TikTok, a revendiqué « dix millions d’utilisateurs actifs mensuels » dans un communiqué publié en janvier dernier.
On ne sait pas exactement combien d’utilisateurs TikTok a à travers le monde. L’agence Reuters, se basant sur des informations de la plateforme, annonçait environ 200 millions d’utilisateurs en Europe d’ici 2025. D’autres sources, moins fiables, évoquent près d’1,6 milliard d’utilisateurs à l’échelle mondiale. Cependant, cette domination a été légèrement compromise par l’arrivée de Clapper, un équivalent américain de TikTok.
Bien que certains avancent que les Chinois sont doués pour copier, cette fois, l’initiative revient aux Américains. L’application Clapper n’est, en effet, rien d’autre qu’une imitation de TikTok. L’interface, la disposition des éléments à l’écran et les fonctionnalités sont identiques, incluant les sections « pour toi » et la possibilité de faire des directs. Certes, l’outil de création de vidéos de TikTok est plus avancé, mais Clapper fournit tout de même l’essentiel.
Lancée à Dallas, au Texas, en 2020, Clapper a été créée par Edison Chen, qui cherchait à capitaliser sur le succès de TikTok tout en l’adaptant aux adultes. Bien que Chen vise une clientèle de trentenaires et plus, il est difficile de voir comment cet objectif se traduit concrètement dans l’application. Quoi qu’il en soit, Clapper progresse et revendique, dans un communiqué de janvier dernier, « dix millions d’utilisateurs actifs mensuels ».
De nombreux utilisateurs se sont identifiés sous le hashtag « TikTok refugee », notamment un nombre croissant de créateurs de contenu français. Selon David Dubois, professeur de marketing digital à l’INSEAD, « En France, l’engouement pour Clapper semble avoir connu une intensité particulière en novembre avant de s’amenuiser par la suite ».
Tiibox, dont les deux comptes TikTok ont été « ban pour rien », exprime sa frustration : « Trois ans de boulot pour rien ». Elle a également rejoint Clapper sans supprimer son compte sur TikTok, tandis que Marie, avec ses 100.000 abonnés, se plaint de ne pas avoir pu obtenir de certification. Damien, un autre utilisateur qui s’est tourné vers Clapper, se fâche car dès qu’il ouvre un direct, il reçoit une restriction pour ne pas présenter de produits de TikTok shop.
Parmi ceux qui ont migré vers l’application américaine, on remarque que beaucoup cherchent à vendre des produits. David Dubois souligne : « Beaucoup de créateurs voient en Clapper une voie plus directe pour convertir l’engagement en revenus, sans attendre les programmes publicitaires ». En effet, la plateforme propose divers moyens de monétiser, tels que des « pourboires, abonnements Clapper Fam, livestream payants et boutique intégrée ». Aurélien témoigne : « J’ai vraiment eu l’impression de découvrir une version »Black Mirror » de TikTok » en raison de la « pression constante aux cadeaux monétaires ».
Néanmoins, l’argent n’est pas la seule motivation, comme l’explique Zouzou : « Clapper c’est pareil que TikTok, mais sans aucune restriction ». Ce qui attire les utilisateurs, c’est la promesse de pouvoir s’exprimer librement sans risque de sanctions, surtout que Clapper est supposé être réservé aux plus de 18 ans. En tant que plateforme, Clapper prétend favoriser l’expression « authentique », avec une modération moins centralisée, attirant ainsi des créateurs qui se sentent pénalisés ailleurs, note l’expert de l’INSEAD.
Bien que Clapper ait des règles communautaires interdisant la publication de contenus illégaux, à caractère sexuel ou violent, l’application de ces règles reste nuancée. L’incitation à l’expression libre peut entraîner des dérives. En janvier 2021, après avoir été exclue d’autres plateformes, la mouvance complotiste pro-Trump QAnon a trouvé refuge sur Clapper, où ses contenus ont été largement diffusés dans les « pour toi » des utilisateurs, selon The Verge. Des comptes promouvant des idées antivax ont également prospéré.
Ces contenus problématiques ont finalement été supprimés après signalements, mais d’autres, jugés « olé olé » par les nouveaux arrivants, circulent librement. Il est facile de les rencontrer en scannant les directs. Bien que la majorité des directs suggestifs soient diffusés en mode « ne pas déranger » pour les abonnés, certains sont en accès libre. On peut par exemple tomber sur une caméra filmant un mouvement suggestif sous une couverture. En plus du sexe, d’autres thèmes prohibés sur les réseaux plus populaires sont également présents sur Clapper, comme des vidéos de personnes manipulant des armes ou montrant quelqu’un se préparant un bang.

