Des téléviseurs LED gigantesques vont-ils remplacer les écrans dans les salles de cinéma ?
La façade du complexe Gaumont-Opéra, à Paris a changé. Son nom aussi. Rebaptisé Pathé Palace, l’illustre temple du septième art parisien a opéré une nouvelle métamorphose. Physique, mais aussi technologique, avec six salles dans lesquelles les classiques projecteurs numériques et les écrans en toile ont été remplacés par des écrans Onyx LED, soit des murs de panneaux à base de LED. Derrière cette technologie, Samsung est à la manœuvre. Clap départ, 20 Minutes vous explique comment votre expérience cinéma change et va continuer de changer.
Style Art déco et technos dernier cri
Près d’un siècle après son ouverture en 1927 (il s’appelait alors Le Paramount), le prestigieux complexe cinématographique à deux pas de l’Opéra de Paris* a opéré une nouvelle mue. Après son rachat par Pathé en 2017 et des années de travaux, le Pathé Palace a ouvert ses portes. Ne pas se fier à la superbe déco intérieure, grandiose, de style Art déco, qui rend hommage à l’Histoire des lieux.

Dans six des sept salles du complexe que sa directrice, Lucia Anglade, définit comme « le plus beau cinéma de France, et peut-être du monde », ce sont des technologies dernier cri qui font surtout le spectacle. En l’occurrence, l’Onyx LED de Samsung. Elle est ici déployée sous forme de quatre écrans 4K de plus de 10 mètres de large, et de deux écrans 2K de 5 mètres de large.
26,4 millions de pixels sur dix mètres de large
« L’idée n’est plus de regarder son film sur un écran en toile, mais sur un écran géant à base de LED », explique à 20 Minutes Jeremy Taghon, directeur de la division CE B2B de Samsung France. Fin de la projection ciné classique, place à une « diffusion » ! L’écran ne reçoit plus l’image, il l’émet. Après le 35 mm, puis la projection numérique, la projection numérique avec source lumineuse laser, place aux écrans de cinéma LED.
Peut-on parler de téléviseurs gigantesques ? Oui et non. Ici, pas de dalle rétroéclairée, comme pour les TV LCD. Par ailleurs, l’écran Onyx est certifié DCI (pour Digital Cinéma Initiatives), une norme élaborée par les studios hollywoodiens pour garantir la qualité des projections numériques. Nos téléviseurs, eux, ne le sont pas.
S’ils sont composés d’une seule dalle, les écrans Onyx LED, eux, reposent sur l’association de dizaines de blocs de LED. Ainsi, pour un écran Onyx de 10 mètres, Samsung assemble 96 blocs (640 x 900 mm, pour 14,2 kg chacun) qui intègrent 2.304 modules LED avec, pour chaque diode, un pixel disposant lui-même de trois sous-pixels, soit… 26,4 millions de pixels ! « À part ça, c’est l’équivalent d’une TV LED ! », sourit Jeremy Taghon de Samsung France.
Contrastes infinis et salle vraiment obscure
Sans projecteur ni faisceau lumineux depuis la cabine de projection pour éclairer une toile blanche, la salle, plus obscure que jamais, est désormais plongée dans le noir absolu. Chaque LED à l’écran pouvant s’allumer ou s’éteindre selon les besoins de l’image du film, les contrastes affichés sont exceptionnels, avec des noirs infinis (ce que ne permet pas un classique projecteur).
L’image, qui est annoncée six fois plus lumineuse, « claque » véritablement, avec une dynamique dont on n’avait jusqu’alors pas idée et une colorimétrie exacerbée. Pour la rétine, s’en dégage un aspect plus « image vidéo », avec moins de texture, de grain, que ce à quoi nous étions habitués. Et le son, dans tout ça ?

Habituellement, il est restitué par des haut-parleurs répartis dans la salle de cinéma, mais aussi derrière l’écran pour les dialogues. Ici, un système (développé par la société ADDE), avec des enceintes notamment réparties en dessous et au-dessus l’écran, permet de contourner l’obstacle physique constitué par l’écran Onyx LED. C’est l’option qu’a retenue Pathé, alors que Samsung a développé parallèlement son propre système son avec Harman et un algorithme capable de restituer une voie centrale virtuelle.
Exception culturelle oblige, le Pathé Palace à tenu à conserver, en marge de ses six salles Onyx LED, une septième salle « d’apparat » (la plus grande) avec toile et projecteur Dolby Vision. Les 431 fauteuils en velours rouge n’y désarçonneront pas les puristes. Les six autres salles Onyx LED (entre 30 et 100 places chacune), disposent, elles, de fauteuils en cuir inclinables.
Une séance qui possède un «petit» surcoût
Le cinéma LED va-t-il enterrer le cinéma de papa ? À l’heure où les salles de cinéma tentent de se moderniser et de se réinventer pour conserver leur attrait, on peut effectivement se poser la question. Alors que le bilan 2024 fait état, selon le CNC, d’un total de 181,3 millions d’entrées dans les salles françaises (soit un million de plus qu’en 2023), un vent de renouveau souffle sur nos bons vieux cinoches.
Après un premier écran Onyx LED, discrètement installé au Pathé Beaugrenelle en 2020, juste avant le Covid, l’exploitant, qui vient également de réinvestir la Géode à Paris, veut offrir une nouvelle expérience avec son Pathé Palace. « Ce complexe est un flasgship technologique, qui offre un service premium, une expérience visuelle bluffante et une sonorité exceptionnelle, mais aussi un parcours visiteur. C’est un lieu de vie, un lieu d’hospitalité, où l’on peut privatiser une salle, faire des séminaires », constate Jeremy Taghon, directeur de la division CE B2B de Samsung France.
Il y a aussi sur place un vestiaire, un bar à vin, une conciergerie. Et pour le spectateur, un ticket d’entrée à 25 euros la séance, tout de même… Du coup, l’expression « se faire une toile » n’a peut-être pas encore dit son dernier mot…
Toute l’actualité des sorties «Cinéma»
Pour l’exploitant, l’investissement dans un écran Onyx LED de Samsung est aussi très conséquent, de l’ordre de quatre à cinq fois plus élevé que pour un système classique. Mais un tel écran est aussi parfaitement calibré pour l’e-gaming, ou la 3D. Avatar, Fire and Ash, de James Cameron, est attendu le 17 décembre 2025… De son côté, la durée de vie d’un écran Onyx est annoncé à 100.000 heures. Soit 17 ans en utilisation normale (10 ans si le mur devait diffuser ses images 24h/24). Et si la moindre diode LED était défectueuse, elle pourrait être simplement remplacée. Enfin, l’Onyx LED devrait prochainement évoluer vers la réalité augmentée. But : que le spectateur puisse, grâce à des lunettes, profiter d’un long métrage en VO en choisissant la langue de sous-titres désirée.
130 ans après les premières projections cinéma des Frères Lumière, une nouvelle séance semble s’ouvrir pour le septième art. Alors que parallèlement, de nombreuses salles s’équipent en Dolby Vision (mais avec un projecteur et une toile), Samsung avoue « discuter » avec l’ensemble des réseaux : Pathé, UGC, CGR, MK2 et Kinepolis autour de projets de rénovation de salles.
« Cela reste un marché jeune, à explorer. D’ici fin 2025, nous avons une vingtaine de projets identifiés », précise Jeremy Taghon, de Samsung France. En attendant une concurrence qui semble se profiler, le constructeur entend parallèlement se diversifier grâce à son écran microLED The Wall. Lesté de la certification DCI, il va pouvoir, avec des images de 3 mètres de base, intégrer de nouveaux lieux, comme des restaurants avec des salles de cinéma pour dîner. Ou des chambres d’hôtel.
* 2, boulevard des Capucines, 75009 Paris.