Des tarifs en hausse de 400 % : l’IA fait flamber les prix high-tech
Mercredi 3 décembre, Micron a annoncé se « retirer du marché grand public » en arrêtant sa marque Crucial. Selon le patron de chez 1Foteam, les tarifs grand public des ordinateurs sont déjà « extrêmement impactés » et seront « de l’ordre de + 50 à + 60 % pour les PC d’ici avril prochain ».

Il n’est pas nécessaire d’être un spécialiste de l’informatique pour comprendre qu’un ordinateur possède de la mémoire, qui se présente sous la forme d’un disque dur permettant de stocker le système d’exploitation, les applications et les photos de son animal de compagnie, ainsi que sous la forme de mémoire vive. Cette dernière, nommée RAM (Random Access Memory), se divise en deux types : la SRAM, liée au processeur, et la DRAM, une mémoire tampon dont on peut augmenter la capacité avec des barrettes supplémentaires. Actuellement, le prix de la DRAM augmente considérablement en raison de la demande croissante de l’intelligence artificielle, ce qui entraîne une hausse des prix des ordinateurs et d’autres appareils.
Le mercredi 3 décembre, Micron, un des principaux fabricants mondiaux de mémoire pour ordinateurs, a annoncé son intention de « se retirer du marché grand public » en cessant d’utiliser sa marque Crucial. Grâce à cette marque, les consommateurs pouvaient acheter à des prix accessibles des disques durs SSD et, surtout, de la DRAM pour améliorer leurs PC. Cette décision n’est pas liée à une éventuelle baisse du marché grand public, mais plutôt à la demande extraordinaire provenant du secteur de l’intelligence artificielle, qui nécessite beaucoup de mémoire et de stockage. L’objectif de Micron est donc « d’améliorer l’approvisionnement et le support pour ses clients stratégiques les plus importants dans des segments à forte croissance », a déclaré Sumit Sadana, vice-président exécutif de l’entreprise.
Une hausse anticipée déjà répercutée sur les consommateurs
Il existe seulement trois fabricants de puces DRAM dans le monde : Micron, Samsung et SK Hynix. Tout comme Micron, les deux autres entreprises sont également affectées par la forte demande des géants de l’IA, tels qu’OpenAI, dont le besoin en DRAM pour leurs centres de données explose. En conséquence, alors que la demande en modules DRAM augmente, la capacité de production demeure constante, ce qui entraîne une hausse des prix. « Les produits que l’on achetait 80 dollars il y a trois mois, on les achète aujourd’hui 400 dollars », admet Philippe Haneuse, directeur de 1Foteam, un grossiste en matériel informatique. Un revendeur de Lille partage ce constat : « On a des tarifs qui ont pris 400 % en quelques mois seulement », déplore Jérôme Hoarau, co-gérant de Ma boutique micro.
Le mécanisme est extrêmement simple. Les producteurs de modules DRAM, tirant profit de cette demande croissante, refusent désormais les contrats qui stabilisent les prix sur une durée déterminée. De plus, toute une chaîne de production est plongée dans l’incertitude. Les fabricants de barrettes de mémoire, « mais aussi tous les fabricants d’équipements électroniques intégrant des modules DRAM, comme les cartes graphiques, les téléphones, les téléviseurs, les voitures… », souligne Philippe Haneuse. Ne sachant pas comment leurs coûts vont évoluer, ils anticipent des hausses chez leurs fournisseurs et les répercutent sur les prix de vente publics de leurs produits.
La pénurie ne va rien arranger
Les détaillants et les grossistes n’ont eu d’autre choix que de s’adapter, même s’ils ont tous deux tenté d’anticiper en constituant des stocks. « Encore fallait-il avoir la trésorerie et qu’il y ait de la disponibilité auprès de nos fournisseurs », explique le responsable de Ma boutique micro. « Faire des stocks, oui, mais à quel prix ? Le tout étant de savoir à quel prix le consommateur va arrêter d’acheter », ajoute Philippe Haneuse.
De plus, au-delà des prix exorbitants, revendeurs et distributeurs doivent faire face à une pénurie qui ne va pas améliorer la situation tarifaire. Selon le responsable de 1Foteam, Samsung n’a aucune intention d’augmenter sa production de modules DRAM. « Ils ont été touchés lors de la période du Covid et se sont retrouvés avec des stocks à écouler en cassant les prix », affirme-t-il. Au contraire, le gigantesque conglomérat sud-coréen souhaite maintenir « une rentabilité à long terme », comme il l’a expliqué lors d’une conférence destinée aux investisseurs, rapportée par Frandroid. D’autant plus que l’engouement des géants de l’IA pour le matériel pourrait brusquement s’interrompre si la tant redoutée « bulle de l’IA » venait à éclater.
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Concrètement, les professionnels reconnaissent que les prix du grand public pour les ordinateurs sont déjà « extrêmement impactés » et le seront encore davantage. Dans une moindre mesure pour commencer, « entre 20 et 30 % aujourd’hui », estime Jérôme Hoarau. « Mais cela sera davantage de l’ordre de + 50 à + 60 % pour les PC d’ici avril prochain », ajoute Philippe Haneuse. Il n’existe aucune perspective de baisse à court terme, « du moins pas avant 2028 », précise-t-il.

