Avec la fermeture du réseau cuivre, que va faire Orange de tout son magot enterré sous nos pieds ?

Le signal a été définitivement coupé. Depuis ce mercredi, Rennes est la première grande ville de France à faire ses adieux à l’ADSL, cette technologie qui a permis l’arrivée de l’Internet haut débit dans les foyers français dans les années 2000. Le déploiement progressif de la fibre optique a en effet donné un sacré coup de vieux au réseau cuivre, dont les prises en forme de T permettent encore à certains de téléphoner et de naviguer sur la Toile.
Avec la montée en puissance de nouveaux usages qui nécessitent toujours plus de bande passante, le bon vieux réseau déployé massivement dans les années 1970 par France Télécom est aujourd’hui incapable de suivre la cadence. Quatre fois plus énergivore que la fibre, le réseau cuivre coûte également très cher à l’opérateur historique, devenu entre-temps Orange, qui investit 500 millions d’euros chaque année pour entretenir le million de kilomètres de câbles enterrés sous nos pieds et les 15 millions de poteaux installés sur le territoire.
Une fermeture progressive jusqu’en 2030
Autant de raisons qui ont signé l’arrêt de mort du cuivre, acté fin 2019. Mais débrancher tout ce réseau ne se fait pas en un claquement de doigts sachant que des millions de lignes, tous opérateurs confondus, sont encore actives. La disparition du cuivre va donc se faire de manière progressive jusqu’en 2030. Ce vaste chantier a démarré le 31 janvier 2025 avec 162 petites communes débranchées, juste avant Rennes. Et d’ici à 2030, toutes les communes françaises suivront, avec une fermeture du réseau par lots qui aura lieu chaque année.
« Les zones de fermeture sont déterminées en fonction de critères d’éligibilité comme l’avancée du déploiement de la fibre dans telle ou telle commune ou le nombre de lignes qui sont encore actives sur le réseau cuivre », souligne Eric Grand, directeur d’Orange dans le Grand Ouest. Pendant au moins cinq années, les agents de l’opérateur vont donc avoir du boulot pour retirer tous les câbles de cuivre enterrés dans le sol. « On a déjà commencé à en enlever mais c’est vrai que ça va s’accélérer dans les prochains mois », indique Jan Charny, chef du projet arrêt du cuivre pour Orange dans le Grand Ouest.
Un trésor enfoui de plusieurs milliards d’euros
Colossal, le chantier est aussi sensible. Car si ces fils enrobés de plastique ne serviront bientôt plus à rien, ils valent tout de même de l’or, avec un prix de la tonne de cuivre qui s’est envolé ces dernières années pour s’approcher des 9.000 euros. Un trésor caché sous terre qui suscite bien des convoitises, avec des vols qui explosent. Rien qu’au premier semestre 2024, Orange a ainsi enregistré plus de 1.300 vols sur son réseau, contre 1.500 sur toute l’année 2023 et 200 en 2021. « C’est infernal », assure Eric Grand, évoquant le chiffre « d’un vol par jour » sur sa zone. « Mais je n’en dirai pas plus pour ne pas donner de mauvaises idées », prévient-il.
On l’aura compris, chaque chantier de dépose du réseau cuivre se fera donc sous étroite surveillance et dans la plus grande discrétion. Une fois le magot caché sous terre récupéré, il sera confié à des entreprises de recyclage pour être revendu. Un trésor que le quotidien La Tribune avait estimé en 2022 à plus de 8 milliards d’euros, un chiffre que l’opérateur n’avait pas confirmé, le jugeant même « excessivement élevé. » « Ce démantèlement a aussi un coût, et l’argent récupéré servira à financer le coût du chantier », précise Eric Grand, qui n’en dira pas plus.