Voyages scolaires : Et si les parents échangeaient leurs enfants pour en réduire le coût ?
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Il y a les classes de neige ou de mer, les séjours linguistiques à l’étranger ou les sorties à la journée. Même s’ils deviennent de plus en plus galère à organiser, les voyages restent toujours un moment fort dans la scolarité des enfants. Loin de leurs parents et déconnectés des écrans, c’est un moyen pour eux de changer d’air, de s’ouvrir au monde, d’apprendre les règles de vie en groupe et de développer leur autonomie. Malgré des aides, le coût de ces voyages peut toutefois représenter un frein pour certaines familles. Un crève-cœur pour ces enfants qui voient leurs camarades partir sans eux mais aussi pour les enseignants, bien en peine de laisser certains de leurs élèves sur la touche.
Au collège Thérèse-Pierre de Fougères (Ille-et-Vilaine), l’équipe éducative a toujours refusé que la question financière soit un obstacle, se battant sans relâche pour que tous les enfants puissent partir. Il y a quelques années, après un séjour au ski qui avait coûté bonbon, trois des enseignantes ont ainsi réfléchi à la manière de réduire le coût de ces voyages pour qu’il ne soit plus une barrière. « On s’est dit que c’était quand même dommage car ils ont la montagne et nous la mer. Alors pourquoi on n’échangerait pas ? », raconte Anne Bannier, professeure du français.
Un premier échange entre Fougères et Evry
Les bases du projet, un peu dans l’esprit de l’échange de maisons, étaient posées. Mais avec le Covid et des lenteurs bureaucratiques qui ont freiné l’élan, il faudra finalement attendre 2022 pour que leur idée prenne forme. Cette année-là, des élèves de 4e du collège breton sont partis quatre jours en voyage scolaire à Évry. Dans le même temps, des élèves de 5e du collège Montesquieu de cette commune de l’Essonne ont fait le trajet inverse pour découvrir la ville médiévale de Fougères et les charmes de Saint-Malo. « On a contacté un professeur de ce collège qui a compris le principe et tout s’est rapidement mis en place », explique Vinciane Debled, professeure d’histoire-géo.
Sur place, les collégiens de Fougères ont pu profiter d’une séance d’escalade dans la forêt de Fontainebleau, encadrée par des profs d’EPS du collège d’Evry, et d’une visite guidée du musée d’Orsay sur le thème du romantisme, animée par une professeure de français du collège francilien spécialiste de la question. Les élèves de Montesquieu ont également bénéficié de « ce partage des supports et ressources pédagogiques » pour visiter le quartier médiéval de Fougères, la baie du Mont-Saint-Michel et Saint-Malo.
Le coût du voyage réduit « de 30 à 50 % »
Mais cela ne s’arrête pas là. Chaque élève de Fougères était ainsi hébergé dans la famille d’un collégien d’Evry qui leur fournissait également un pique-nique pour le déjeuner et partageait avec eux le repas du soir. Et inversement pour les élèves franciliens. « En faisant ce type d’échanges, on supprime de fait les frais de restauration et d’hébergement, précise Clara Gougay, professeure documentaliste. C’est une belle expérience pour tout le monde, pour les élèves qui découvrent d’autres familles mais aussi pour les parents qui échangent leurs ados. »
Un voyage plus solidaire et collaboratif donc mais qui permet surtout de réduire son coût « de 30 à 50 % », selon les trois enseignantes bretonnes. En 2023, leur projet a tapé dans l’œil de l’Éducation nationale avec une aide de 70.000 euros qui leur a été allouée dans le cadre du Conseil national de la refondation pour développer la plateforme Collège Bn’B, mise en ligne en juin. « Chaque équipe pédagogique peut s’en saisir pour trouver des échanges en renseignant ce qu’elles peuvent proposer en termes d’activités, détaille Anne Bannier. Car beaucoup n’ont pas conscience de toute la richesse qu’elles peuvent apporter à d’autres élèves. »
Le lancement de la plateforme est pour l’heure timide avec seulement une quinzaine d’établissements qui se sont inscrits. « Il faut que la communication autour de ce programme d’échanges se fasse et on compte pour cela sur l’appui du ministère », espèrent les trois enseignantes, convaincues « que ce système pour favoriser les voyages scolaires a du sens ».