France

Villes et livreurs : comment gérer les « attroupements gênants » ?

Depuis l’été 2024, la ville de Nancy a mis en place des zones blanches pour interdire la prise de commandes aux livreurs à certains endroits. À Reims, des points dédiés pour l’attente des commandes ont été créés, et le maire a pris des mesures similaires pour réduire les attroupements des livreurs dans le centre-ville.


Des trottoirs encombrés, des passages difficiles à négocier et, parfois, un quotidien devenu compliqué… Cette scène se répète dans de nombreuses villes. Aux heures de repas, des livreurs s’entassent à proximité de certains restaurants, ce qui engendre des « nuisances ».

« Oui, les riverains et les commerçants nous interpelait régulièrement à ce sujet. Cela posait même des troubles à l’ordre public », se remémore Mounir El Harradit. Le conseiller municipal délégué à la médiation sociale à Nancy évoque ce « problème » au passé, car il a été en grande partie résolu.

Depuis l’été 2024, la ville de Nancy a ainsi mis en place différentes mesures. La première a consisté à établir, grâce à l’entreprise américaine Uber Eats, des zones blanches. Ces zones sont des aires où les livreurs ne peuvent plus prendre de commandes, les obligeant ainsi à se déplacer. Puis, au printemps dernier, un arrêté a été pris pour interdire à ces livreurs l’accès à certaines portions de rues à des horaires précis. Par exemple, il est désormais interdit de stationner dans la rue des Tiercelins, entre les numéros 1 à 8, entre 11h et 15h, puis de 16h30 à 23h.

« Maintenant, ils se répartissent mieux sur le centre-ville, cela fonctionne plutôt bien », apprécie l’élu, tout en notant que des attroupements demeurent occasionnellement. « Quand il pleut, nous ne pouvons pas empêcher les livreurs de se mettre à l’abri devant un bâtiment ou un commerce. Tant qu’ils n’auront pas de salle de repos ou d’attente proposée par ces plateformes, le problème restera présent. Elles ne peuvent pas laisser gérer les villes en prétextant qu’ils ne font appel qu’à des autoentrepreneurs », ajoute l’élu socialiste, reconnaissant le caractère « militant » de son propos.

« Quoi qu’il en soit, cela va beaucoup mieux », réagit un opticien d’une rue concernée par l’arrêté. « Auparavant, les livreurs pouvaient rester une bonne demi-journée, ce qui pouvait faire fuir des clients. D’autant plus que l’on assistait à l’émergence de marchés parallèles avec ces attroupements… Maintenant, la police passe régulièrement et cela se passe très bien. »

À Reims, le climat est également ressenti comme « plus apaisé » au centre-ville depuis plusieurs semaines. Cela fait suite à des mesures similaires prises mi-juillet par le maire Arnaud Robinet. « Certains livreurs s’adonnent à d’autres activités que la livraison de repas », avait alors souligné l’édile, incitant les plateformes à agir. Quelles sont les conséquences ? « Des points dédiés à l’attente des commandes ont été mis en place, et cela est plutôt bien accepté, tant par les utilisateurs que par les livreurs », précise Vincent Mansecal, restaurateur et président de l’association des commerçants de la ville, les Vitrines de Reims.

« C’est indéniablement mieux qu’auparavant », dit-il encore. « Nous avons travaillé en bonne intelligence pour que les livreurs ne puissent plus attendre sur un chemin très fréquenté entre la gare et la cathédrale. Cela contribue à l’attractivité de la ville. Un attroupement de vélos sur la magnifique place d’Erlon n’était pas très esthétique pour les touristes ! »

Dans cette ville, les plateformes de commande de repas en ligne ont joué un rôle actif dans l’élaboration des solutions. Ce n’est pas la première fois qu’elles agissent ainsi. « Je ne sais pas quelle collectivité en France a été la première à soulever ces problèmes d’attroupements, mais nous essayons de les soutenir pour intégrer au mieux le service dans la réalité du terrain », explique Rémi Mulemba, responsable des affaires publiques chez Deliveroo France.

« À Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) par exemple, nous avons collaboré avec la mairie pour identifier deux places de parking où les scooters peuvent se garer. Ils ne sont plus dans une rue problématique, mais sur une avenue déjà très fréquentée », poursuit-il. « Et dans le 16e arrondissement de Paris, nous avons récemment établi une charte avec la mairie pour encourager les bonnes pratiques. Ensuite, nous nous rendons sur place avec des équipes de sensibilisation pour rencontrer les livreurs et discuter avec eux. »

Rémi Mulemba reconnaît que la livraison de repas reste une activité « encore nouvelle ». « Il y a encore des aspects avec lesquels il faut s’ajuster. » Comme ces fameux attroupements.