France

« Une passion dévorante »… Quand la Patrouille de France fascine

« Le graal de l’aviation », « des héros », « le top du top », la Patrouille de France (PAF), qui fête ce week-end ses 70 ans avec un meeting sur la base 701 de Salon-de-Provence, son aérodrome d’attache, est « une passion dévorante » pour Jérôme Ailé. Près de 80.000 personnes sont attendues pour l’événement dans cette ville de 45.000 habitants des Bouches-du-Rhône.

Jérôme, installé à Saint-Martin-de-Crau, commune située à une vingtaine de kilomètres à l’ouest de Salon continue de vivre sa passion avec la même intensité qu’enfant. Pour certain c’est l’OM, pour Jérôme c’était la Patrouille : « Ado et jeune adulte, ma chambre était tapissée de posters et d’affiches. Aujourd’hui encore, dès que je les vois dans le ciel, je file sur les hauteurs de Salon d’où l’on voit l’aérodrome pour ne pas rater l’atterrissage », témoigne cet AESH de 45 ans qui connaît par cœur « la musique » du leader. « Je dégauchis (mettre à plat l’avion) maintenant/Et on y va boucle/Barrique top/Fumée coupée top/Tonneau top », récite-t-il. Des paroles gravées dans sa mémoire par les heures d’écoutes de son récepteur radio UHF qu’il branche sur le canal des pilotes.

Vivre pour la Patrouille

Cette fascination, il l’a tient de son entrée son entrée en Sixième au collège Lurian à Salon-de-Provence, jouxtée à la base aérienne, après que ses parents ont déménagé de Marseille. « Ça a été le déclic. Avec mon meilleur ami, on s’est mis à sécher les cours deux fois par semaine pour aller voir les entraînements. Et le commandant de la base de nous ouvrait », se remémore-t-il. Des souvenirs heureux et mélancoliques à la fois. Un témoignage de la dimension dévorante, au sens littéral du mot, de cette passion. Son meilleur ami s’est suicidé il y a deux ans. « Je crois qu’il n’a pas supporté de ne pas devenir pilote. La Patrouille a survolé ses funérailles, à Lambesc, dessinant un cœur dans le ciel ».

Tous les fans de la PAF ne sont pas Provençaux, loin de là. Elle compte des « fans » dans toute la France qui n’ont pas le loisir de voir les pilotes s’entraîner quatre fois par semaine. Francky Maverick habite le Maine-et-Loire. La passion PAF, il est tombé dedans petit à l’occasion d’une démonstration sur l’ancien aérodrome d’Avrillé, à Angers, où travaillait son père. « C’était il y a cinquante ans, je devais avoir 10 ou 11 ans. J’ai trouvé ça tellement majestueux. Et surtout voir ce bleu-blanc-rouge dans le ciel, les figures, le cœur… ».

La météo pas au rendez-vous

Cet amour il explique le vivre « quotidiennement. Il ne se passe pas un jour sans que je regarde au moins cinq minutes de leurs vidéos sur Internet. Surtout depuis mon burn-out – je travaillais dans la petite enfance. Je le dis à femme et mes enfants :  »ce qui me fait vivre, c’est vous, et la Patrouille ». Ce sont des grands mots, je sais ». Calendrier, maquettes d’avions, DVD… Francky collectionne les goodies de la PAF.

« Ma dernière trouvaille, c’est le survêtement officiel de la Patrouille fait en partenariat avec Adidas ». Mais Francky ne sera pas du déplacement à Salon-de-Provence ce week-end. « L’un dans l’autre je me dis que c’est un mal pour un bien quand je vois la météo ». Orages, couverture nuageuse importante… la météo n’est pas au rendez-vous dans le ciel de cette commune choisie comme base parce que le soleil y règne en maître près de 300 jours par an.

La quête d’une vie

Un temps qui ne fait pas les affaires de Nicolas Simon, 40 ans. Lui est « spotter », cette communauté de photographes amateurs qui suivent la Patrouille. A ce titre, il a obtenu, comme deux ou trois cents autres personnes triées sur le volet, l’autorisation d’être sur la base, au plus proche de l’objet de sa fascination. Il est à Salon depuis jeudi, et repartira mardi.

S’il a rêvé d’être pilote de chasse, comme certains membres de sa famille, la vie en a décidé autrement pour ce gestionnaire de compte grenoblois victime à l’âge de quinze ans d’un accident qui l’a laissé en fauteuil roulant. « Mais quand on fait des photos, on s’imagine tous être à leur place ». Pour ce chasseur d’images, la Patrouille de France est le « graal de l’aviation ». « En étant chauvin, je vous dirais que ce sont les Français les plus forts. Mais honnêtement, je trouve les Italiens un peu meilleurs, plus rythmés ».

Des figures à 800 km/h

Pour ce meeting des 70 ans, les pilotes transalpins ne seront pas de la partie. Nicolas attend en revanche avec impatience la présentation des Saoudiens, une première. « J’espère aussi vraiment pouvoir photographier un mirage 2.000 », ajoute celui qui a mis plus de quatre ans à achever une de ses quêtes photographique. « Ce cliché est aujourd’hui encadré en grand chez moi. Je l’ai chassé pendant quatre ans. C’est une figure où l’un des avions passe en dessous de l’autre, à deux mètres d’écart, si bien qu’on a l’impression qu’ils se rentrent dedans ».

Les figures, c’est justement le credo de Stéphane. A cinquante ans, ce préparateur de commandes est l’administrateur d’un compte Facebook qui regroupe plus de 19.000 fans de la Patrouille de France. « Le Big-Bang, la Bombe, la Volute… », aucun des mouvements synchronisés des huit Alpha Jet ne lui est étranger. « Les figures et le programme changent chaque année. C’est bon pour les pilotes, afin d’éviter la routine et les accidents, et c’est bon pour notre plaisir », se réjouit ce Montpelliérain. Invité en avant-première pour visionner le programme de ce meeting, il n’a pas souhaité trop en dire. « Ce que je peux raconter, c’est qu’ils vont dessiner un 70, comme leur âge, dans le ciel et qu’ils reprennent de vieilles figures ». Et toujours à deux-trois mètres et à une vitesse comprise entre 300 et 800 km/h.